Qui ?
Une jeune femme prénommée Swan, qui rêvait enfant de devenir compositrice de musiques de film et déjà croisée il y a quelque temps au sein de Shadow Motel, un trio mixte défendant à mains nues un rock abrasif et sous tension – l’album Ausfahrt Nach, paru en 2013 chez Cranes Records, en témoigne. Désormais, elle jongle (presque) seule entre ses synthés – dont un clavier midi pour les rythmiques – et sa basse. Mais quand même, elle précise : “Le projet est solo mais pas complètement solitaire, parce que je suis bien entourée par des amis qui, même s’ils ne prennent pas part à la composition, s’impliquent de plein de manières différentes – en me trouvant des dates, en créant des visuels, en écoutant mes mix et mes expérimentations”.
Où ?
Swan a quitté la cité du nord pour s’installer il y a un peu plus d’un an au Mans, la préfecture de la Sarthe. Elle a emmené avec elle tous ses disques, et en particulier Juju de Siouxsie and The Banshees, Washing Machine de Sonic Youth, Emperor Tomato Ketchup de Stereolab, Odyshape des Raincoats et les deux albums de This Heat.
Quoi ?
En deux cassettes – I Don’t Know What I’m Doing (paru il y deux ans) et Expiration Date (paru cet été) – et dix chansons, la jeune femme a dessiné les contours en clair-obscur d’un univers où l’onirisme et le mystère règnent en maitre. D’ailleurs, ce n’est pas un hasard si elle s’est retranchée derrière un nom qui résonne comme un vrai piège : “C’était absolument volontaire. Je ne suis pas pas plus italianophone que toi et c’est précisément le faux-ami qui m’a frappée ! J’adore la façon dont les faux-amis révèlent de façon percutante le sens des mots dans sa langue maternelle. En l’occurrence, ça me plaisait qu’on pense à quelque chose de sombre en entendant morbidi, alors que cela renvoie à quelque chose de doux, de mœlleux”. Mœlleuses, elles le sont les compositions de Molto Morbidi, mais ce seul adjectif ne suffit bien sûr pas à résumer cette post-pop labyrinthique, où la jeune femme prend par la main les auditeurs les plus aventureux pour les mener où bon lui semble. Basse caoutchouteuse et synthés en nappe, en boucle, en rythmique accompagnent une voix en équilibre parfait entre force et fragilité, qui chante des textes teintés parfois d’ironie et d’auto-dérision.
Tube absolu
Ce n’est sans doute pas l’appellation la plus appropriée, tant les chansons de Molto Morbidi ne sont pas de celles qui se livrent dès la première fois – et bien sûr, c’est tant mieux. Mais avec ses liens de parenté avec certaines compositions des Young Marble Giants – dont on célèbre cette année le quarantième anniversaire de leur unique album le temps d’une énième réédition –, I’m Calling You At Night, et son très joli clip bleuté dévoilé mardi dernier dans nos colonnes, est peut-être la plus… douce des invitations à pousser la porte qui ouvre sur le monde envoûtant de Molti Morbidi.
Futur proche
Si tant est que la situation le permette, Molto Morbidi a une poignée de concerts à donner entre la fin octobre et la fin novembre. Sur le plan artistique, on tient à rester sur le qui-vive du côté de chez Swan. “La porte reste complètement entrouverte”, précise-t-elle. “J’essaie d’ailleurs de sortir de ma zone de confort et je travaille sur des collaborations. Je ne sais pas si ça va aboutir, mais c’est très enrichissant parce que c’est encore une nouvelle manière de travailler, complètement différente du travail en groupe”. Et puis, il lui faut aussi finaliser les maquettes de son premier album. Et à ce sujet, on n’a pas osé lui dire qu’on était impatients.