Shinichi Atobe, Yes (DDS)

La biographie de Shinichi Atobe est pour le moins parcellaire. Pendant de nombreuses années, le nom du japonais ne résonnait aux oreilles des connaisseurs que pour un mythique maxi d’ambient crépusculaire, Ship-Scope, sorti en 2001 sur le label Chain Reaction de Moritz von Oswald et Mark Ernestus. Trop peu pour laisser une trace indélébile, certains en étaient même venus à suspecter un avatar d’un des artistes phares du label allemand (René Löwe) mais c’était sans compter sur la force des réseaux sociaux et autres sites participatifs qui allaient, le temps passant, faire de ce maxi un trésor caché.

Ainsi, courant 2014, non contents d’avoir enfin retrouvé la trace du bonhomme, Sean Canty et Miles Whittaker, qui oeuvrent au sein de Demdike Stare et leur label associé DDS, apprennent que ce dernier n’a jamais cessé de produire de la musique et réussissent même à le convaincre de publier un LP (le très beau Butterfly Effect). L’artiste ne cessera pour autant pas de cultiver l’art du secret, ne transmettant ses albums à son label qu’en simple CD-Rom par voie postale. Cinq disques au compteur plus tard ont toutefois fait de lui l’un des producteurs les plus singuliers et talentueux du genre. Yes, le dernier en date sorti en plein été, constitue à cet égard le meilleur point d’entrée d’une discographie essentielle même si parfois rigoureuse et exigeante. Car au-delà de l’immédiateté de certaines des productions, leur attrait provient également du travail assez inédit de déstructuration pointilleuse des compositions auquel s’adonne le producteur, en rechercher la plus simple substance pour ensuite reconstruire l’ensemble à la façon d’un lego, laissant coutures et motifs apparents, ce qui rend l’écoute aussi ludique que parfois cérébrale.

Shinichi Atobe
Shinichi Atobe

Le natif de Saitama, lointaine banlieue de Tokyo, c’est du moins ce qu’affiche sa bio officielle, s’amuse notamment sur certains titres à introduire à contretemps des briques musicales dont la cohérence ne prend sens que de nombreuses mesures plus tard (le motif de piano sur Ocean 1). Cela posé, plus marquant que ces considérations assez abstraites, le compositeur japonais possède aussi un sens de l’accroche mélodique remarquable, d’autant plus palpable sur ces dernières productions qu’il y enchaîne les titres destinés au dancefloor ; des accents baleariques du formidable titre éponyme, la transe tribale irriguée de dub techno de Lake 3, le clin d’œil appuyé aux pionniers de Detroit (Rain 3 et ses faux-airs d’inédit de Drexciya) ou encore la basse purement funk et badass de l’irrésistible Ocean 1 qui vient clore un disque qui, moins que ses velléités formelles incontestables et passionnantes, est d’une rare accessibilité et intensité.

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