Edité dans la nuit du lundi 23 avril via bandcamp uniquement (et pour 1 euro non négociable, obole unique), L’Autre Jeu était annoncé par son auteur dès le mois d’octobre dernier : « Ce que je fais n’est pas vraiment de la chanson, ceci explique peut-être cela. Une formule parmi d’autres, valables aussi : le jeu normal, c’est se mesurer à l’autre; l’autre jeu, c’est se mesurer à soi. » Et les six titres de nous donner des nouvelles d’Arnaud Michniak (ex Diabologum), et de cette dimension infra de la réalité dont il semble être aujourd’hui l’unique habitant.
Mots simples, poésie morcelée, comme si la vie avait explosé sous les coups de butoir du monde réel, et s’était éparpillée dans une longue traîne. Un sentiment profond d’isolement se dégage de ce paysage dévasté musicalement : quelques claviers, quelques guitares, de longs silences, ou plutôt de longues traces magnétiques qui n’enregistrent rien. Sentiment de vide aussi porté par une voix affaiblie, qui a perdu sa ferveur et son assurance, comme éteinte par l’âge – elle semble avoir vécu 500 ans – qui apparaît et disparaît, se fait attendre, entre les notes égrainées presque par accident. Elle joue avec notre impatience, déçue, frustrée, forcément, tant ce qu’elle charrie destine son auteur au néant, de façon imméritée, sans doute, mais voulue après tout, programmée. Et si Michniak évoque L’autre Jeu comme (peut-être) son « adieu aux ténèbres », on l’espère sincèrement, mais on a du mal à y croire. Tout le paradoxe de cette oeuvre unique et impressionnante, au-dessus ou au-dessous de toutes les autres (peu importe, finalement), qu’il faudra continuer coûte que coûte à porter aux nues, malgré lui, malgré tout.