Mount Eerie, Now Only (P.W. Elverum & Sun)

Mount EerieLe bouleversant A Crow Looked At Me paru l’an dernier a marqué les esprits. Une mise à nue complète, et rare, d’un artiste qui ressassait le long d’une dizaine de chansons fragiles, émouvantes et éprouvantes la disparation trop brutale de sa compagne, la bédéiste et musicienne québécoise Geneviève Castrée, alors même que le couple venait de donner naissance à une petite fille.

Phil Elverum, dont on connait le gout pour la chronique intime, ne pouvait éluder le sujet dans son œuvre et avait choisi assez naturellement le retour à l’épure do-it-yourself des débuts (sous le nom des Microphones), montrant qu’aucun artifice n’était de rigueur en tel moment. Le disque, exceptionnel, ne s’écoute pourtant que très difficilement, charriant trop de larmes et de chagrin pour ne pas troubler l’auditeur le plus sensible. Now Only, enregistré dans la foulée, poursuit cette démarche de deuil mais laisse cette fois-ci sentir que le machine se remet doucement en marche. L’américain renoue ainsi de façon parcimonieuse avec les expérimentations sonores qui ont fait, depuis déjà une décennie, le sel d’une discographie impressionnante, accueillant de nouveau batterie, synthétiseurs et guitares saturés et délivrant quelques triturations soniques dont il a le secret. Une manière de montrer par le geste sa propre reconstruction, celle d’un homme en train de réapprendre à vivre, notamment sur Distortion, longue complainte de 11 minutes consacrée à son amour disparu s’ouvrant sur des nappes de guitares vrombissantes pour redescendre ensuite sur des atmosphères plus acoustiques, une mise en forme assez familière de son auteur. Car si musicalement, le reclus d’Anacortes reprend tout doucement des forces, se fait moins ascétique que sur A Crow Looked At Me, les mots sont toujours rois. Elverum a besoin de parler et se livre sans filtre, s’adressant à l’auditeur comme à un proche, entre confessions intimes impudiques et réflexions personnelles souvent crues et désorientées (Earth, Crow, Pt. 2), parfois sarcastiques (Now Only) mais toujours férocement humaines.

https://pwelverumandsun.bandcamp.com/album/now-only

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