Love And Rockets, Express (Beggars Banquet, 1986)

Dans une perspective un peu déceptive de l’ordre du mouvement d’humeur, j’ai nourri le projet de diversifier un peu cette rubrique passant du Mardi Oldie au Merdique Oldie. Soit répertorier (et pourquoi non ?) les pires daubes que la bêtise de l’adolescence, et plus si affinités, voire une bonne vieille chronique de Best, pour ceusses qui plus proches de l’Ephad que des résultats du BEPC, nous auraient fait, dans un grand moment d’inconscience acheter en prix vert. Ceux qui se souviennent du terrifiant sentiment de soulagement au moment de reposer par exemple Outland de Spear Of Destiny (1987) sur le rayonnage de la fédération nationale d’achat des cadres* au profit d’un meilleur disque sauront de quoi je parle. Et puis, au détour d’un post nostalgique d’un vieux sage (Bonjour chez vous, Maître Billing) sur une plateforme sociale, ne voilà pas que je retombe sur le second album de Love And Rockets.

Love & Rockets
Love & Rockets

Love And Rockets, c’est la suite de Bauhaus sans la pantomime Peter Murphy, or ayant découvert l’œuvre en question, la question ne se posait pas, j’ai donc inclus Express dans ma liste de courses. Et alors que presque quatre décennies plus tard j’avoue avoir laissé en fond de cale les autres projets (Tones On Tail, Dalis Car) post Bauhaus, pourquoi ne pas réécouter rapido cet Express là ? Je ne vais pas être très long, enfin j’espère d’autant plus qu’il n’a même pas été prévu un vin d’honneur après.

Déjà parés d’un petit succès d’estime avec l’inaugural Seventh Dream Of Teenage Heaven (1985) enregistré par John A. Rivers au désormais mythique Woodbine Street Studios** de Leamington Spa dans l’arrière pays de Birmingham, Daniel Ash, Kevin Haskins et David J remettent ça en visant plus haut tout en gardant à l’esprit qu’après toutes ces années de sombre malheur relatif (en dépit de sa variété, l’œuvre de Bauhaus reste injustement assimilée au rock dit gothique) il est grand temps de pervertir la pop dans les souvenirs brillants qu’ils en gardent, Roxy Music (puis Eno en solo) et T. Rex en tête. Et j’en fais d’ailleurs une drôle de tête en découvrant It Could Be Sunshine, morceau d’ouverture façon chausse trappe, agrégeant de manière merdique tous les travers de l’époque (saxophone, rythme dada, guitares de bourrins). Le niveau remonte prodigieusement dès Kundalini Express, véritable décollage ferroviaire avec riff Bolan-esque de circonstance. On peut d’ailleurs légitimement avancer qu’il ne soit pas tout à fait absurde que nos Rita Mitsouko nationaux (métaphore ferroviaire incluse) n’ait pas jeté une oreille ou deux sur ce disque avant de rentrer en studio en compagnie de Tony Visconti (et les Sparks) pour l’impeccable Marc Et Robert paru deux ans plus tard. Ou même carrément pour The No Comprendo sorti la même année, preuve étant que le morceau de Love And Rockets s’achève avec un gout de déjà vu (C’est Comme ça). En fermant les yeux et avec beaucoup d’imagination, All In My Mind serait d’une essence pop non loin des Pale Fountains, du Jazz Butcher (avec lequel deux d’entre eux collaboreront) voire des Television Personalities. Heureusement qu’un refrain totalitariste et simplet de type Oasis vient saloper le tableau. Dans le genre T. Rex avec les travers de la new wave, Life In Laralay fait son travail avec un petit rythme fracturé à la She’s Lost Control du meilleur effet, par contre pour les guitares on tombe parfois pas loin d’un Killing Joke période Brighter Than A Thousand Suns (un bon Merdique Oldie, ça, je le note). Autre « tube » : Yin And Yang (The Flowerpot Man) croise bien des écueils sans tous les éviter mais à cette vitesse d’exécution, on peut apprécier la prise de risque. On ne serait pas surpris non plus que notre Kid Loco national ait jeté une oreille distraite sur Love Me, ballade romantique striée de bandes acides qui s’achève malheureusement en eau de boudin. Un peu comme l’album qui finit piteusement avec An American Dream qui en dépit de ses arpèges prometteurs tourne vite court en cramant des points de permis psychédéliques, on se demande même où est passée la chanson comme parfois chez The Brian Jonestown Massacre. Nonobstant c’était bien vu ce rêve américain, étant donné le succès inexplicable (deux morceaux dans le top 5 du Billboard) que le groupe rencontrera en terres yankee quelques saisons plus tard.
En conclusion, et j’espère ne pas vous avoir fait perdre trop de temps, Express n’est pas vraiment un disque merdique mais très loin d’un chédeuvrabsolu. Il semble plus riche et intéressant (c’est peut être notre discothèque qui s’est considérablement étoffée depuis son achat) qu’à l’époque, il en reste une borne appréciable, sans plus.


Express par Love And Rockets est sorti sur le label Beggars Banquet en 1986.
*La Fnac, pour ceux qui n’avaient pas la ref 
**The Pastels, Swell Maps,The Loft, Felt, Spacemen 3, The Jazz Butcher, Nikki Sudden, Buzzcocks, The Specials… la liste des usagers est plus que conséquente…

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *