C’était il y a 25 ans presque jour pour jour. Le premier numéro de la RPM (qui en fait était le douzième – vous comprendrez pourquoi si vous suivez) atterrissait dans les kiosques à journaux et autres Maisons de la Presse avec quelques jours de retard – une tradition que le magazine a bien pris soin de respecter pendant plusieurs années. Aujourd’hui encore, je ne sais pas comment nous sommes arrivés à publier ce numéro et concrétiser ainsi un projet entériné en décembre 1994 dans un bar de la rue de Lappe, quelques heures après que Les Inrocks aient annoncé leur passage en hebdo et après avoir beaucoup bu (de margaritas, je crois).
Pourtant, à cette époque, nous avions décidé d’arrêter ce qui allait finalement devenir la genèse de ce projet un peu fou, le fanzine Magic Mushroom, dont le nom nous avait rendus très populaires auprès des artistes anglo-saxons – “Vous en avez sur vous ?” – et qui plus qu’un fanzine, était une répétition grandeur nature du magazine que nous allions réussir à publier, avec un graphisme épatant, des photographes qui savaient ce qu’ils avaient à faire et des gens qui essayaient d’écrire pour convaincre d’hypothétiques lecteurs que le groupe dont ils parlaient allait changer leur vie – enfin quelque-chose dans ce gout-là.
Aujourd’hui, à des années et à des kilomètres de cette genèse abracadabrante – mais qui je crois donna le « la » de cette épopée moderne –, je me demande encore comment on a réussi à sortir ce premier numéro. Je me demande aussi parfois comment on a pu en sortir d’autres. Entre moyens du bord et système D, en squattant de nuit les bureaux des agences où travaillaient les deux graphistes définitivement géniaux Serge Nicolas et Éric Pérez (ils prenaient des photos et écrivaient aussi, tant qu’à faire), en comptant sur le savoir-faire tactique de Philippe Jugé ou la vision de Jean-Fabien Leclanche, on a fini par fonder une société de presse (ça en coutait 300 FF à l’époque) et réussi à embringuer avec nous d’autres passionnés, croisés à la sortie de concerts, en Black Sessions, chez les disquaires. On partageait tous une certaine insouciance, une envie d’en découdre avec les mots et la ferme volonté de réparer des injustices – enfin genre. Ce premier numéro – pour lequel on avait choisi en une un groupe qui sortait son premier album, un peu comme une déclaration d’intention – a marqué le début d’une aventure assez folle, assez belle, qui nous a menés de la rue du Départ (ça ne s’invente pas) au boulevard de Ménilmontant, puis rue du Sentier et rue Vivienne. Une aventure marquée par beaucoup de chouettes rencontres et beaucoup de beaux souvenirs – sans oublier quelques anecdotes plutôt drôles. Une aventure qui aujourd’hui se poursuit, différemment mais avec toujours autant de gens de talent avec Section26, qui fête aujourd’hui ses deux ans.