Pour tout être à fait honnête, nous n’avions pas vraiment prévu de parler de Shack et des rééditions de H.M.S. Fable (1999) et de … Here’s Tom With The Weather (2003). Tout a été écrit sur la carrière des frères Head, ex-Pale Fountains. Une photographie de Mick et de son frère John tenant le vinyle de H.M.S. Fable dans leurs mains a changé irrémédiablement la donne. Et si… Et si… John pouvait revenir aux affaires. Écrasé par la figure de son frère aîné, John Head a tout encaissé et a claqué la porte laissant à son frère le rôle du héros à la carrière solo au final assez heureuse. Ce billet d’humeur ne doit son existence qu’à une envie. À savoir celle de voir John Head publier son premier disque solo.
En 2024, tout va bien pour Mick Head. Remis en selle grâce au travail acharné de Violette Records (l’EP Artorius Revisited en 2013 puis l’album Adiós Señor Pussycat quatre ans plus tard), l’aîné de la fratrie Head est bien loin des années d’addiction qui ont ruiné sa carrière dans les années 80 et 90. Accompagné d’un groupe (The Red Elastic Band), il poursuit ses lubies que sont sa dévotion pour Arthur Lee et sa volonté d’écrire la chanson pop parfaite. Son petit frère, épaule rassurante et pilier de Shack, a disparu des écrans radar depuis une dizaine d’années. On ne peut pas vraiment lui en vouloir… Il a encaissé la dissolution des espoirs qui résidaient dans la carrière des Pale Fountains. Pire, en 2005, il s’est retrouvé backstage avec son frère et Liam Gallagher. En effet, Shack avait signé sur Sour Mash, le label de Noel Gallagher et ouvrait pour Oasis sur les dates anglaises de la tournée Don’t Believe The Truth. On conclura sur le fait que John Head a vraiment tout encaissé.
Shack revient dans l’actualité car Mick Head a donné son feu vert pour la remasterisation et la réédition de deux disques de Shack. On redécouvre donc avec bonheur H.M.S. Fable et Here’s Tom With The Weather. Attention, on est chez Mick Head donc on tient entre les mains une réédition sans bonus… Un sou est un sou chez les Head, un morceau est un morceau chez Mick Head.
H.M.S. Fable conclut de la plus belle des manières les années 90 de Shack, de Liverpool, de l’amicale des orphelins des Pale Fountains et au final de tous les amoureux d’une certaine idée de la pop. Un an avant le bug de l’an 2000, Shack est le gardien du temple. Noel Gallagher est lessivé après les trois premiers disques d’Oasis, Paul Weller silencieux depuis deux ans… Et Embrace est presque respectable grâce The Good Will Out. Bref, tout va mal.
Les frères Head n’ont pas perdu leur temps lors de cette décennie. Ils étaient même très en avance avec Waterpistol, le précédent disque de Shack. Avec ce disque, Mick Head définissait le son des années 90. Le report de la sortie du disque en 1995 à cause de l’incendie du studio d’enregistrement annula cette prise de pouvoir. En 1999, Shack a toutes les cartes en main. Le groupe a signé chez London Records, une filiale de Decca, qui compte notamment dans ses rangs Echo & The Bunnymen. Le groupe peut donc se permettre de recruter Nick Ingman et Will Malone pour les arrangements. Martin Duffy (Felt / Primal Scream) fait même une apparition. Les chansons sont évidemment au rendez-vous. Même quand elle est au plus bas, la fratrie Head publie des chefs-d’oeuvre. Un an plus tôt, elle a enregistré The Magical World Of The Strands grâce au soutien du label français Megaphone Music. Alors quand tout va bien…
H.M.S. Fable est le seul disque de Shack qui écho à son époque. Il présente une ou deux faiblesses comme le titre d’ouverture ou encore comme Lend’s Some Dough dont l’écoute laissera à jamais perplexe. Pour le reste… C’est un voyage qui fait oublier la déconfiture de The Verve et d’Oasis et qui est un refuge pour les futurs déçus de Kid A. Écouter un titre comme Comedy était le meilleur anti-douleur pour les fans de britpop. Le public ne s’y est pas trompé d’ailleurs : c’est l’album de Shack qui s’est le plus vendu au Royaume-Uni et qui a permis aux frères Head de se stabiliser (pour quelques mois).
C’est peut-être aussi le disque dans lequel la présence de John Head se fait le plus ressentir. Et il suffit de tomber nez à nez avec Pull Together pour se dire que le silence de John Head n’a que trop duré.