Clairo, Charm (Clairo Records)

Clairo En 2017/2018, la jeune chanteuse Claire Cottrill se fait connaître via internet avec ses chansons Pretty Girl ou Flamin Hot Cheetos, et la voilà devenue égérie de la bedroom pop sous le nom de Clairo. Deux albums suivent logiquement en 2019 et 2021. Clairo travaille alors avec Rostam (Vampire Weekend) sur Immunity en 2019. Le décrié faiseur de hits Jack Antonoff (Taylor Swift, Lorde, Lana Del Rey…)  prend le relais sur Sling deux ans plus tard. Loin de se laisser impressionner par leurs CV, Clairo y développe une pop boisée, délicate, entre folk et indie. Pour Charm (2024), Clairo s’extirpe de cette case fort pourvue et concurrentielle, à la recherche d’autre chose.

Clairo
Clairo / Photo : DR

Ses influences, elle les puise désormais dans les grands albums de soft rock des années 70. Si Carole King, Carly Simon, ou la moins connue Laura Allan viennent tout de suite en tête, Clairo développe surtout sa propre voie. Epaulée par Leon Michels, tête pensante d’Els Michels Affair et du label Big Crown (Bobby Oroza, 79,5…), la chanteuse nord-américaine déploie une œuvre groovy et chaleureuse. L’album de la maturité, serions-nous tentés de dire si l’expression n’était pas aussi galvaudée ! Il n’empêche, Charm (2024) a de nombreux atouts dans sa besace. La production vintage sied comme un gant aux compositions touchantes de Claire Cottrill. Loin d’être un exercice pointilliste rétro, cette approche donne à l’ensemble une couleur un peu brute, un peu fragile. L’album vit, arrive avec ses défauts, sans chercher à tout planquer sous le tapis. Aux guitares acoustiques et pianos se joignent mellotron, synthétiseurs analogiques et batteries funky, le tout couché sur bandes dans une ambiance que nous imaginons enthousiaste et détendue. Des méthodes à l’ancienne certes, mais sans nostalgie : Clairo n’est pas ici en quête d’un hypothétique âge d’or. Forme et fond dialoguent sans hausser la voix, chacun trouve donc parfaitement sa place.

Charm se pare d’une humilité rafraichissante. Pourtant, sa simplicité cache une réelle finesse d’écriture, parfaitement mise en valeur par les excellents arrangements. Les morceaux entraînants (le tube Sexy To Someone, la soul d’Add Up My Love) répondent à aux instants suspendus (Echos, Pier 4). Le refrain de Terrapin s’envole tandis que Juna réimagine le R&B des années 90, à travers les seventies. Glory of the Snow nous plonge dans un océan placide avec sa boîte à rythmes désuète et ses touches de guitares parcimonieuses. Comme d’autres (Drugdealer, Michael Rault, The Lemon Twigs, Natalie Prass…), Clairo partage ici, une certaine idée de la musique pop, un pied dans le passé, l’autre fermement dans le présent. Ces onze morceaux dessinent alors l’un des plus beaux albums de 2024, de quoi nous accompagner un long moment. Charm a aussi une qualité très rare, la capacité de pouvoir toucher un public au-delà des habituelles chapelles.


Charm par Clairo est disponible sur le label Clairo Records.

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