Nuage de lait et paysages qui blanchissent, l’heure est à des explorations plus intériorisées favorisées par le solstice d’hiver. La musique des genevois de Citron Citron évoque les brumes matinales du Bain des Pâquis, les cimes enneigées Alpines et Jurassiennes ainsi que les ombres de la villa Diodati et de Frankenstein… Point de marée dans les eaux du bleu Léman mais Maréeternelle embarque un univers vaste de flux et reflux et de paysages sonores au romantisme contemporain désabusé et aux accents exploratoires orbliviens.
Zoé et Augustin, frère et sœur à l’état civil, composent des morceaux majoritairement synthétiques et écrivent des textes navigants entre mélancolie, poésie et rêveries. Zoé et Augustin chantent par alternance leur ambiant pop, parsemée de violon, de guitare, de synthés et d’orgue Bontempi, de percussions et clochettes. Ce deuxième album s’inscrit dans la lignée de leurs collaborations au sein de diverses formations genevoises dont Burning Spiaggia et de leur premier album Chagrin Bleu sorti en 2022. Le ton est intime et très personnel jusque dans le nom de leur groupe, un hommage à leur feu petit chat jaune Citron qui a marqué leur enfance et a accompagné leur passage à l’âge adulte et l’apprentissage de la perte d’êtres chers. Le duo compose une musique à la fois abstraite, intimiste et pop. Ils se disent volontiers inspirés par Brigitte Fontaine, Kae Tempest, Angelo Badalamenti et les vinyles de leur père, de la new wave principalement, dont on retrouve quelques sonorités deci delà. Avec des parents musiciens qui les poussent très tôt à jouer d’un instrument, Zoé au violon et Augustin à l’accordéon, le duo compose à partir des textes inspirés de Zoé, improvise, copie-colle et structure petit à petit sa démarche intuitive.
Avec un premier concert au festival de la cité de Lausanne donné le 9 juillet 2019 puis un deuxième premier concert le 9 juillet 2021 à Bongo Joe, Citron Citron a pu enchaîner les scènes jusqu’à ce deuxième album réjouissant sorti à l’automne 2024. Les morceaux agissent comme des vignettes, fumetti aux univers insulaires, parfois uniquement instrumentaux (Portamento, Ruines) rappelant un François de Roubaix, où parfois la voix d’Augustin firte avec celle d’un Daniel Darc époque Taxi Girl (Par un temps pareil), où les inflexions de Zoé nous prend par la main avec une naïveté désarmante et une singularité planante, où, en duo lynchien, hypnotisés par l’harmonie, on pourrait bien se retrouver à l’Hôtel du Grand Nord de Twin Peaks, (Mer du Nord), tout nous ramène à des réalités flirtant avec le fantastique en brouillant subtilement les frontières (Crise d’aaaangoisse, Chant de bataille) et, enfin, le morceau d’ouverture, Nuage défile, réconforte immédiatement sur le fait qu’il ne fait pas toujours beau au-dessus des nuages… Citron Citron est comme une bulle voyageuse, rassurante d’étrangeté et d’organique, qui commence tout juste son périple.