Le californien Alex Izenberg a tout de l’élève trop doué et fantasque qui sait qu’il n’a pas besoin d’en faire trop. Son premier album Harlequin, paru en 2016, en a sûrement perdu plus d’un alors que celui-ci célébrait une belle folie dandyesque masquée par un certain je-m’en-foutisme. Il faut reconnaître au garçon, par ailleurs diagnostiqué schizophrène, le don de frustrer son auditoire et maquiller sous des faux airs de démos à peine abouties des compositions pop baroques et psychédéliques pourtant au final vraiment exquises. Quelque chose comme les ambitions démesurées d’un jeune Van Dyke Parks enregistrées sur un 4-pistes de seconde main et accompagnées par la fanfare de la MJC du coin.
On citera au hasard une merveille comme le titre Grace qui débute en rengaine vicieuse à la Randy Newman pour se terminer sur des accents universalistes à la McCartney, le tout sagouiné par un piano brinquebalant et des cassures de rythme dégueulasses. Le reste était du même acabit, souvent aussi génial que pourtant (faussement) produit à la truelle. Caravan Château, son deuxième effort, ne jouit toujours pas d’une production décente et conserve ses tics finalement un peu maniéristes. Le californien a pourtant, peine perdue, sollicité Chris Taylor (Grizzly Bear) ou Jonathan Rado (Foxygen) pour produire quelques-unes des compositions d’un LP qui démarre difficilement sur quelques tentations orchestrales surtout un peu paresseuses et cheap. La belle balade mid-tempo aux accents soul Disraeli Woman, croisement entre le Gruff Rhys solo et le Harry Nilsson éthylique, élève le niveau d’un disque qui ne perdra plus son rythme. Izenberg simplifie ensuite ses études pop baroques aux sonorités sixties retrouvant son fil émotionnel (Lady, Dancing Through The Turquoise), traine sa voix pâteuse sur une jolie balade country folk qui fera songer au regretté Richard Swift (Saffron Glimpse) ou expérimente avec succès la sunshine pop neurasthénique (December 30th). Sans conserver la fraicheur de son premier LP, Caravan Château pêche par son amateurisme surjoué mais confirme néanmoins la singularité d’un auteur dont les talents de mélodiste et les ambitions pop démesurées font plaisir à entendre.