Alors que l’Académie de médecine préconise le port du masque obligatoire, me voilà affublé d’un cache-œil du plus bel effet.
Satanée tondeuse à gazon.
A l’heure exagérément matinale où d’habitude je me mets à taper sur ce clavier, j’étais encore aux urgences ophtalmologiques de l’hôpital Cochin. Moi qui n’avais plus mis les pieds à Paris depuis plus de trois semaines et cet exquis dîner chez Thomas B., je n’imaginais pas y effectuer mon piteux retour, escarbille en tête, sous de tels auspices. J’ai le plus souvent associé le terme de projection à son acceptation cinématographique, et donc à un plaisir certain de l’œil. Depuis hier je sais qu’on peut aussi plus prosaïquement la prendre de plein fouet dans la cornée. Si subsistait en moi ce vieux fond janséniste, je dirai que mes vilaines pulsions scopiques trouvaient là leur châtiment – certes moins pénible que celui subi par Abélard. Pour ma femme, tout cela relevait plutôt de l’acte manqué, et de mon peu d’empressement à tondre la pelouse – ce qui est totalement faux, j’ai toujours considéré cette activité – pas pire qu’une autre – comme un moment privilégié où me venaient les idées les meilleures, et le plus justement exprimé. Inutile de dire que pour aujourd’hui, on repassera. Car me voilà contraint, pour quelques jours au moins, à passer entre les gouttes et ne plus écrire que d’un œil – déjà que je tapais à deux doigts.
Il va de soi que le 45 tours du jour a été sélectionné essentiellement pour sa pochette, dessinée par Joel Meadows. Quitte à piocher chez Sarah (n’attendez pas de moi quinze feuillets sur le label de Bristol, je ne suis définitivement pas en état), plutôt ratisser Wild Grass Pictures, la face B du troisième simple des Sea Urchins – puisqu’il est dit, et tant pis si je malmène Richard Brautigan, que je prendrai ma revanche sur la pelouse. Mais Ahprahan par les Sugargliders tient la route, en dépit de sa petite cylindrée.
Seconde formation australienne après Even As We Speak (de Sydney, les premiers qui dès 1987, et donc avant Devine & Statton, reprendront Bizarre Love Triangle en version Fisher Price) à rejoindre la maison de poupée pop de Clare Wadd et Matt Haynes, The Sugargliders (de Melbourne) auront jusqu’au bout défendu l’adage du small is beautiful. Josh et Joel Meadows tiraient ainsi leur nom d’un marsupial riquiqui (20 cm sous la toise, grand max) adepte du vol plané. Après trois singles en balsa pour Summershine, ils atterrissent à Bristol en 1992, avec l’intention d’entamer une tournée anglaise comme on part en camp scout – en short et la guitare acoustique sous le bras. Ils enregistreront cinq références pour Sarah, dont ce Ahprahran produit par Ian Catt (ingénieur du son formé chez Field Mice et Saint Etienne). Empreint de mélancolie suburbaine (Prahan est une banlieue de Melbourne, LGBT-friendly durant les 90’s), c’est probablement le morceau le plus abouti des frères Meadows. Avec pour vigie trois régimes de guitare prompts à maintenir les lyrics hors de l’eau (Can’t believe I’ve sunk this low / Is there something in it that I don’t know ?), l’esquif navigue ici pas loin de certaines merveilles de Shack échouées sur la grève une paire d’années plus tôt (Hazy ou Undecided, dans leur version Jérôme de Missolz). Ahprahan ne prétend pas nous faire voir la vierge ni briguer un trône au royaume des borgnes, mais on a connu bien pire comme collyre.
tu souviens des THE STEINBECK? https://youtu.be/Z6Ibq8l4UVo
Le groupe d’après pour les frères Meadows ? J’avoue n’avoir jamais écouté. A la limite, je me souviens des Becketts, voire des Keatons. Et je me suis toujours demandé s’il existait, dans le comté de Yoknapatawpha ou ailleurs, un groupe baptisé The Faulkners.
le groupe d’apres oui ,il faut que tu achete d’urgence c’est aussi bien que the sugagliders (c’est quoi ton facebook?)