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Nico, The Marble Index (Elektra, 1968)

Nico, The Marble IndexC’est un calvaire, un Golgotha, un disque qu’il vaut mieux avoir sur la table qu’à l’esprit. Ce qu’un John Cale coupable en sourdine mais à peine, avait pris comme justificatif d’une déroute marchande annoncée.

« The Marble Index is an artefact, not a commodity.
You Can’t Sell Suicide. »

Cette image quand même, grand résumé parfait et moqueur de cette adolescence, la nôtre en adoration devant la figure d’un suicidé et la lente, patiente, archéologie de fait qui telle une enquête fantastique de Lovecraft nous ferait tracer les lignes de la connaissance rétrospective entre les Doors, l’incalculable Velvet Underground, et les inestimables Kraftwerk,  puis Can, trois groupes qui ont eu beaucoup de mal à descendre de l’ignoble piédestal où nous les avons placés pour l’éternité au nom de notre idolâtrie puérile mais toujours vivace pour Joy Division.

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Pernice Brothers, Who Will You Believe (Ashmont/New West)

Growing old seemed like death
to me when I was young.
Now I want to grow old.
And I want to belong.
Joe Pernice, How Will We Sleep

Dans Haute Fidélité de Nick Hornby (1995), le héros et ses adjuvants en érudition musicale éprouvaient toutes les peines du monde à concevoir la playlist idéale pour un enterrement – celui du beau-père de Rob. Cinq bonnes chansons évoquant la mort ? En dépit de leur connaissance encyclopédique des recoins les plus confidentiels de la pop, les trois disquaires ramaient lamentablement et finissaient par contourner la difficulté avec une pirouette et quelques rires. Trente ans plus tard, la tâche semble moins insurmontable. Nos figures de référence ont vieilli, et nous avec elles. Ou l’inverse. Continuer la lecture de « Pernice Brothers, Who Will You Believe (Ashmont/New West) »

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Pan American & Kramer, Reverberations Of Traffic on Redding Road (Shimmy-Disc)

Pan American & Kramer, Reverberations Of Traffic On Redding Road (Shimmy-Disc)La plaie infestée du monde récent grouille de vers immondes. La saloperie la plus vile s’immisce partout, ça fait longtemps. Mais elle se cache de moins en moins. Avant les barricades, la nausée ultime ou plus vraisemblablement un suicide collectif, un sursaut illusoire, un peu de recul.

Le silence. Solution / Négation.

Les deux individus qui sévissent ici en sont grandement coutumiers. Gloire à eux, au plus haut des cieux. D’un côté Mark Nelson, sylphidre ambassadeur d’une contusion neigeuse chez Labradford, puis plus exotique en solitaire sous bannière Pan American. Puis récemment Anjou, vin de Loire qui a ses qualités. De l’autre Kramer, qui en dehors d’un CV de butor agrégeant les saintes écritures de notre grand monde parallèle en tant que producteur, restera aussi et surtout comme l’homme, qui, l’air de rien ou presque, amena un groupe de pop perverse qui s’ignorait encore (Galaxie 500, pour ne pas les nommer) vers un Everest de l’espace dans la dilution sonique. Continuer la lecture de « Pan American & Kramer, Reverberations Of Traffic on Redding Road (Shimmy-Disc) »

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41 is 30

Le label bordelais Talitres réédite un des grands albums des américains Swell.

Swell
Swell / Photo : DR

« La France a toujours été accueillante pour Swell », écrivit laconiquement David Freel sur son clavier d’ordinateur en 2019 quand il répondit (par miracle) à un mail que je lui avais écrit. Swell était en pause plus ou moins définitive mais nous étions nombreux à espérer la fin de la retraite monacale de Freel. Le 12 avril 2022, cette retraite est devenue éternelle. Il y a quelques jours, le label bordelais Talitres a annoncé la réédition en vinyle de 41. Publié par American Recordings en 1994, ce disque eut fort à faire pour s’imposer dans les charts. Coincé entre Vauxhall and I de Morrissey et The Downward Spiral de NIN, 41 affronta également le dernier concert de Nirvana et l’arrivée d’Oasis. Les délicats clairs-obscurs de Swell échappèrent donc à la grande majorité. Éternel outsider, Freel noua une relation singulière avec la France. À tel point que ce fut Talitres qui s’occupa de la sortie de South Of The Rain And Snow (2007) et de Be My Weapon, le side-project d’un Freel en perdition. A l’occasion de cette réédition, retour sur les origines et le contexte de production du disque à l’époque avec Monte Vallier et David Freel.
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Julia Holter : « La pop obéit à une logique qui est au-delà de moi »

Julia Holter / Photo : Camille Blake
Julia Holter / Photo : Camille Blake

C’est toujours un plaisir de s’entretenir avec Julia Holter, même quand le jetlag amplifie sa tendance à hésiter et chercher ses idées en triturant ses longs cheveux, parsemant ses réponses de silences. La Californienne, qui fêtera ses quarante ans en décembre prochain, était de passage à Paris il y a quelques semaines pour présenter son nouvel album Something in the Room She Moves (clin d’œil plus ou moins fortuit aux Beatles). Plus de cinq ans après le profus et labyrinthique Aviary, magistralement porté sur scène avec une formation élargie, ces dix compositions marquent le retour à une forme plus compacte, mais pas exempte d’expérimentations (Meyou, Ocean…) parfaitement maîtrisées. Continuer la lecture de « Julia Holter : « La pop obéit à une logique qui est au-delà de moi » »

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Adrianne Lenker, Bright Future (4AD)

Is this what you wanted ?
To live in a house that is haunted
By the ghost of you and me

Un grain de sel, jamais sur les plaies.

Qui publie donc entre deux tours de Terre en 2024 un disque enregistré en 2022, si vraisemblablement brut que l’on pourrait oublier de se cogner dedans, glisser entre des ondes, pleurer des fantômes. Lenker en est à plus d’une demi-douzaine de merveilles de disques, seule ou avec Big Thief, et l’on craint pour elle, chaque nouvelle fois, pour nous : sera-t-on déçu·e ? Continuer la lecture de « Adrianne Lenker, Bright Future (4AD) »

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The Tyde, Season 5 (Spiritual Pajamas)

The Tyde Season 5Trois points de Mellotron et une cascade, que dis-je, une myriade d’arpèges spleenétiques, ce petit motif imparable, cette chanson de rupture, de renonciation, de colère rentrée, de cœur en morceaux. All My Bastards Children, en ouverture de Once, premier album de The Tyde paru en l’an 2000 sur Track & Field. Il ne s’en est pas fallu beaucoup plus pour que le grand* Darren Rademaker devienne immédiatement un ami. Et infuse par la suite des évènements que ce soit sous l’alias matrimonial Frausdots ou une proximité de fait (de Felt ?) avec les faux jeunes de Girls, une présence discrète mais effective dans les grands moments de la RPM. The Tyde, en outre, fera à maintes occasions une sorte d’unanimité écrasante dans nos cœurs, d’une façon rarement aussi unanime, une trop rare collégialité rédactionnelle. Continuer la lecture de « The Tyde, Season 5 (Spiritual Pajamas) »

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Les blagues qui tuent d’Amen Dunes

Amen Dunes / Photo : Michael Schmelling
Amen Dunes / Photo : Michael Schmelling

L’outsider et voyageur américain Damon McMahon revient avec son septième album Death Jokes à paraître chez Sub Pop Records en mai prochain. Avec l’envie de se dépasser et de sortir de sa zone de confort, celle où il à toujours su bricoler de magnifiques chansons avec la volonté de peu de moyens. Purple Land est une chanson en trois temps, qui débute comme un simple morceau pop et migre en essai où il apprivoise le synthétiseur, la boîte à rythmes et les superpositions de sons. En retrait, une guitare et une basse en clôture pour mieux nous laisser envoûter par sa voix qui illustre les fragilités de la vie dans ses paroles. Continuer la lecture de « Les blagues qui tuent d’Amen Dunes »