Studio Electrophonique, Happier Things (Violette Records)

Il y a le rose des lettres qui sent bon le parfum du bubblegum. Il y a l’élégance de la typographie qui évoque quelques autres disques que l’on chérit depuis longtemps – des disques de Factory, oui, mais de Tamla Motown aussi. Il y a des notes de pochette au verso – et depuis les premiers disques de The Style Council, on sait qu’au même titre qu’une chanson, une mélodie ou quelques mots glissés dans un refrain, elles peuvent changer une vie (ou au moins quelques années d’une vie et entre nous, ce n’est déjà pas si mal). Il y a les titres de chansons qui semblent en annoncer la couleur (et parfois la douleur), mais on ne l’apprendra qu’un peu plus tard, ce sont souvent des chausse-trappes. Il y a toujours ces titres de chansons qui, croit-on, font des clins d’œil appuyés à un univers qu’on croyait être le seul à partager – parce que dès avoir lu All-Time Biggest Fans, sont venus à l’esprit ces quelques mots-là : I’m your biggest fan cos’ you don’t give a damn”… Il y a, de part et d’autre de la Manche, ces ainés qui ont baissé la garde dès les premières notes, deux types pas nés de la dernière pluie et auxquels (après tout) on a le droit de reprocher beaucoup mais sans doute pas la presque perfection de leurs gouts musicaux et de leurs coups de cœur – Étienne Daho et Richard Hawley. On a connu pire comme thuriféraires. Et il y a James Leesley.

Pour celles et ceux qui ont raté l’épisode précédent, James Leesley est Studio Electrophonique. Un gars de Sheffield (et ça, on dira ce qu’on voudra, c’est plutôt bon signe), aujourd’hui tout juste trentenaire mais qui en parait dix de moins ; un gars à la gueule d’ange et au regard qui trouble ; un gars qui écrit des chansons avec quelques bouts de ficelle et beaucoup de talent, de ces chansons de peu (une voix troublée et troublante, une guitare électrisante, un orgue bouleversant et puis, deux ou trois autres petites choses par ci par là), qui disent absolument tout de ces (ses ?) amours déchues, tordues, fichues. Presque trois ans après la première rencontre – à une époque où tout semblait plus doux (pêle-mêle, le bleu du ciel, le blanc des cumulus, le jaune du soleil) et où on nourrissait une certaine obsession pour les chansons avec un prénom féminin dans leur titre –, ce sont les retrouvailles avec un ami qui chante comme (plus) personne le romantisme à fleur de peau, la mélancolie en bandoulière. Qui interprète des saynètes dont on connait tous la langue, dont on connait (presque) tous l’issue, malgré toutes les questions qu’on ne cesse de se poser – alors que les réponses sont d’une évidence absolue bien sûr. En cinq nouvelles chansons parfaites dans leur nudité – comme leurs six ainées du déjà légendaire ELP Buxton Palace Hotel –, James Leesley brosse la fragilité d’un quotidien sans fard, que la beauté des mélodies et la douceur des mots suffisent à rendre un peu plus supportable, sans pour autant masquer les doutes, les inquiétudes, les tâtonnements . “So I get back in bed and try and think of happier things”, chantonne-t-il ainsi sur Happier Things. Et vous savez quoi ? Avec son disque en boucle en guise de bande originale, c’est peut-être la plus belle chose à faire par ces temps qui courent à leur perte.


Happier Things par Studio Electrophonique est sorti chez Violette Records.

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