Tout l’été, les morceaux qui ont sauvé notre adolescence.
Mon morceau est Smells Like Teen Spirit par vous savez qui. Mon frère avait le CD de Nevermind, et avait l’habitude de l’écouter, ainsi que d’innombrables autres classiques des nineties derrière la porte close de sa chambre, quand j’étais un kid. J’ai appris à comprendre et à composer mes premières pop songs en chantant seul sur ses disques, devinant comment les changements intervenaient dans le morceau, et où les refrains et couplets allaient se placer. Dans ma petite bulle pré-internet, j’ai grandi dans une banlieue où Nirvana était l’alpha et l’oméga de la culture, de la musique et du cool. Je le voyais à la fois comme un échappatoire et un moyen de rentrer dans le genre, si ça fait sens.
De temps en temps, je piquais les CD de mes frères pour les écouter dans ma propre chambre. Teen Spirit représentait une pure euphorie pour moi, je fermais ma chambre à clé et je me lachais complètement en l’écoutant. Le CD sautait tellement je dansais dessus comme un fou… Quand j’ai eu environ 12 ans, c’est devenu mon objectif de vie : apprendre à jouer de la guitare et commencer à faire de la musique comme celle-là. C’est l’héritage essentiel de ce morceau, qui m’a inspiré et donné envie de faire ce que je fais depuis. J’ai demandé à mes parents de m’acheter une guitare et pour mes 13 ans j’ai eu une Squire Stratocaster, devenue assez vite la chose la plus importante dans ma vie. J’ai commencé à jammer avec des ados du coin et j’avais un groupe appelé Ipecac, un sirop oldschool qu’il fallait prendre pour vomir en cas d’ingestion de poison (cool, non ?).
J’ai retrouvé cette photo d’époque avec moi au centre et deux amis avec qui j’avais un autre groupe, dont je ne me souviens plus du nom. Les deux autres gars étaient mes amis les plus proches : Tim, à gauche, jouait de la batterie et son grand frère James, à droite, était à la basse. J’ai encore des cassettes enregistrées quand on s’entrainait dans ma cave moisie. Elles sont embarrassantes à un point assez exceptionnel… Quand je parlais de banlieue pré-internet, – j’ai grandi à White Plains, état de New York, au fait – c’était en quelque sorte la clé pour comprendre combien cette chanson a compté pour moi. La façon dont on percevait la culture était incroyablement prescrite et marchandisée : toute la musique était alors un marché de masse, on n’avait accès ni aux blogs ni aux recommandations des plateformes de streaming. Aucun pote sympa ne nous disait où se trouvait le meilleur magasin de disques ou la salle de concert la plus cool. C’était un vrai désert culturel, le summum étant le Borders Books and Music au centre commercial du coin. Du coup, le moindre morceau de musique avait une valeur canonique pour nous, dans un certain sens. Je me souviens aussi de ce poster de Kurt accroché dans ma chambre. Je l’ai retrouvé il y a quelques années et je l’ai remis sur les murs du studio où je bosse actuellement. Je crois que je l’ai acheté chez Hot Topic.
Smells Like Teen Spirit est sorti sur l’album Nevermind, paru en septembre 1991 sur le label DGC / Sub Pop
En 2018, Peel Dream Magazine délivre son premier album Modern Meta Physic, alors présenté comme un hommage à la dream pop de la fin des 90s. Polyphonies, sonorités dronesques et autres vocalises habitent Agitprop Alterna, deuxième album brillant sorti en 2020 dont nous vous avions parlé ici. Joseph Stevens s'apprête à sortir son nouveau disque sous peu.
Bonus : la VO !
My song is Smells Like Teen Spirit by you know who. My brother had Nevermind on CD, and used to listen to that and countless other 90s classics on the other side of his bedroom door when I was a kid, which would be closed while he was in there. I learned how to write pop songs by privately singing along to his records this way, and guessing where the changes would take place, where the chords/melodies would go. To my small little pre-internet era, suburban brain, Nirvana was the be all and end all of culture, music, and « cool ». I think I saw it as a « way out » and a « way in » at the same time if that makes any sense. I would eventually take my brothers CD’s and listen in my own room. Teen Spirit was complete euphoria to me – I’d lock my door and go absolutely crazy listening to that song. The CD would skip from just literally jumping. When I was around 12, I made it my life’s mission to learn how to play guitar and start making music like that. That might be the essential legacy of that song for me – that it literally inspired me to want to make the kind of music I do. I asked my parents for a guitar and got a used Squire Stratocaster for my 13th birthday, which became the most important thing in my life. I started jamming with neighborhood kids and had a band called « Ipecac » which is an old timey thing you take to make yourself throw up after swallowing poison (cool, right?)
I found a picture of me (center) from that era with two friends who I had another band with. For the life of me I cannot remember the name of this other band but these were two of my closest friends Tim (left – drums) and his older brother James (right – bass). I’ve got cassettes of us playing. They are fabulously cringe-worthy. We’d practice in my musty basement. When I say I grew up in the pre-internet era suburbs – that’s the key to understanding why this song meant so much to me (I grew up in White Plains, New York by the way). The way us kids got doses of culture was incredibly prescribed and commodified. All music was essentially mass-market back then – we didn’t have access to blogs or spotify recommendations, or cool friends who could drive us to independent record stores or venues. We were in a cultural desert – the pinnacle of which was Borders Books and Music at the local mall – and every little bit of music we could get our hands on was canonical in some way. I’m also sharing a poster of Kurt that I had up in my room. I found it a few years back and hung it up in the studio I currently work out of. I think I bought it at Hot Topic.