Selectorama : Biche

Biche / Photo : Greg Ponthus
Biche / Photo : Greg Ponthus

Avec en signal annonciateur fort, le single Déjà-Vu sorti en catimini l’année dernière, on sentait une petite révolution en mouvement chez Biche. Le quintette a mis son temps pour réfléchir à l’évolution de leur projet, parti d’une pop alanguie aux guitares boisées, aux influences marquées sixities et seventies, que Burgalat himself n’aurait pas renié. Petits crépitements parasites et sonorités résolument plus électroniques viennent donner le ton, et soulignent la présence grandissante des machines dans nos vies. Avec Le Code, leur deuxième single, tout semblait plus clair, Alexis Fugain, Thomas Subiranin, Alexis Croisé, Brice Lenoble et Florian Adrien ont eu envie d’accélerer le tempo, beaucoup plus élastique et rebondissant que précédemment. Ils auront peut-être tardé à revenir, mais B.I.C.H.E. est une superbe collection de petits tubes (Americanism) et de chansons attachantes (Labrador), et de merveilles bubble gum pop (La Spirale) interprétées avec la douceur d’un Pierre Barouh par Alexis, qu’on a adoré revoir sur scène en cette fin janvier en format trio aux côtés de En Attendant Ana. Pour nous, il révèle quelques-uns des titres qui ont compté pour la création de ce nouvel album autoproduit.

01. Water From Your Eyes, When You’re Around

C’est le morceau le plus pop de l’album dont il est tiré, Structure. Globalement, je suis impressionné par la liberté dont fait preuve ce duo au sein de sa discographie, qui présente en majorité des sonorités et des genres musicaux plutôt “extrêmes”. Je trouve que cette chanson témoigne d’un talent de composition et d’arrangements assez dingue. D’ailleurs, le fait qu’elle soit placée en préambule d’un album aussi conceptuel la rend d’autant plus belle et unique.

02. Daniel Rossen, It’s A Passage

Être exposé tous les jours à de la musique en travaillant en studio, ça a inévitablement changé ma façon d’en écouter, et je peux difficilement me soustraire à la première écoute super analytique qui s’impose à moi. Ça me pousse à me demander comment ça a été écrit, enregistré et mixé avant même de pouvoir m’émouvoir de l’essentiel. Eh bien voilà typiquement un morceau (et un album) qui me renverse à tous les niveaux et qui m’évite de me poser un milliard de questions. C’est juste beau, en plus d’être produit à la perfection.

03. Stereolab, Refractions in the Plastic Pulse

Impossible de ne pas mettre Stereolab dans cette sélection. Ce groupe est trop important pour moi. Pas facile non plus de faire un choix quant au titre à partager ici. Du coup, j’ai choisi le plus long de Dots and Loops, parce que 17 minutes de plaisir, c’est pas négligeable. Plus largement, ce disque rassemble autour du groupe des personnes que j’admire beaucoup : Sean O’Hagan (High Llamas) aux arrangements cuivres et cordes notamment, et John McEntire (Tortoise) à l’enregistrement et à la production. Je ne peux pas m’empêcher de penser que ça devait être une sacrée expérience de mettre ce disque dans la boîte.

04. Belvoir, Le Serpent

Je crois pouvoir dire que Belvoir est un ingrédient constitutif de ce que je suis à ce jour, et de ce qu’est la musique de Biche sur ce nouvel album (même si c’est pas forcément flagrant). J’ai eu la chance de passer un peu de temps en studio avec François et Romain, qui joue d’ailleurs de la clarinette sur notre disque, et je me suis régalé de voir le leur s’assembler entre les mains de Vincent Hivert (mon binôme depuis les premiers jours du studio Claudio).

Je trouve que l’écriture de François est d’une finesse extrême, ultra poétique, qu’elle transpire l’intelligence et qu’il la restitue toujours de façon poignante ; c’est pas rien quand on sait à quel point le français est lourd à manier. S’ajoute à ça le talent de Romain, qui rebondit sans cesse sur des idées ultrasoniques d’arrangements et de sons drastiques au possible. Bref, je leur ai déjà dit, mais Belvoir, c’est mon groupe préféré, et je trouve que c’est une musique importante à avoir aujourd’hui en France.

05. Surface to Air Missive, Time Being

Surface to Air Missive, c’est un gars (Jake Tobin) qui pense comme 12 personnes en même temps. Ça va très vite, ça déroule une grille d’accords pas possible qui nous emmène toujours là où on ne s’attend pas, le tout surplombé par sa voix que j’adore et qui me rappelle un peu celle de Thomas Mars (Phoenix). Le profil obsessionnel de ce gars-là me parle particulièrement.

06. UTO, Unshape

Unshape est tiré de l’album que j’ai préféré écouter et découvrir en 2024.
Je ne le savais pas, mais c’était exactement le disque dont j’avais besoin au moment où je l’ai écouté pour la première fois, et ça ne m’était pas arrivé depuis un petit moment. Je l’aime de long en large, mais ce que j’aime le plus, c’est de l’écouter très fort en conduisant sur l’A13 pour rentrer de Paris un peu tard dans la nuit.

07. Marius Atherton, Mes amis

Marius fait des chansons, et il les fait admirablement bien. Quelle que soit l’émotion ou le propos qu’il met en musique, c’est toujours fait avec beaucoup de justesse, d’intelligence et d’humour. Je trouve qu’il chante le réel avec une décontraction contagieuse, et en tant que personne plutôt pudique, ça me fait beaucoup de bien.

08. Pearl & The Oysters, Triangular Girl

J’aime tout dans la musique de Pearl & The Oysters : la manière dont elle est écrite, jouée, les influences qu’elle convoque, le fait qu’elle soit toujours aussi chaleureuse et généreuse, exactement à l’image des personnes qui la composent : Juliette et Joachim. Le seul détail qui me tracasse finalement, c’est que 9 125 km nous séparent au quotidien, mais je me console en pensant au moment où on pourra se retrouver à nouveau ensemble en studio.

09. Côme Ranjard / Gaétan Nonchalant, Pop-Corn

Il y a trop de chansons superbes sur ce disque qui vient tout juste de sortir, et il y aurait beaucoup de choses à en dire. Mais si j’ai choisi ce duo avec Gaétan Nonchalant, c’est pour souligner l’importance de l’entourage quand on fait de la musique. Je trouve ça génial de voir deux meilleurs potes avancer côte à côte, se tirer vers le haut, partager des influences communes et finalement faire une chanson ensemble. Dans le secteur ultra compétitif et assez superficiel qu’est celui de la musique (qu’on se le dise), je trouve vital le lien qui nous unit en tant que faiseur·euses de musique.

10. Chris Cohen, Monad

Chris Cohen est un héros. Il écrit les plus belles chansons, il les joue en live à la perfection, même dans des conditions franchement difficiles (cf. son dernier concert à l’Olympic Café). Toutes les cases de ma sensibilité sont cochées dès la première seconde d’écoute. Bref, Chris Cohen est un héros à mes yeux.


B.I.C.H.E. par Biche sort le 7 févier sur le label Ça Va Sound

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *