Prefab Sprout, le voyage immobile

Les 35 ans de album « Steve McQueen »

Prefab Sprout

Quand tu es ado dans une contrée où les climatologues avertis sont persuadés que l’hiver est aussi doux qu’à Verkhoïansk, tu comprends rapidement pourquoi les années 1980 sont faites pour toi. Ça tombe bien, la Grande-Bretagne regorge de groupes qui tirent la tronche. Les mecs ont une excuse bien légitime : ils viennent de choper Maggie – mais ils ne savent pas encore que c’est pour un paquet d’années. Et pour appréhender la complexité de cette nouvelle réalité géopolitique anglaise, il existe donc un cas d’école.

Prefab Sprout, c’est d’abord Paddy McAloon, un type un peu frêle mais qui ose quand même intituler son deuxième album du nom du maître du cool, Steve McQueen. Et la pochette annonce les couleurs (de l’automne, les couleurs) : nos champions se partagent à quatre une moto engluée dans la gadoue. Évidemment, on se doute rapidement que le bolide ne servira jamais à rien : tu te rêves en McQueen dans La Grande Évasion et tu finis en Jean des Esseintes – tu parles d’un postulat de départ.

Alors, tu es forcément fébrile à la première écoute parce que quand même, tu te demandes comment les gamins vont s’en sortir. Et c’est le choc, c’est le grand jour, celui où tu découvres ta voie – et sa voix par la même occasion. Après, il peut venter ou neiger, tu es peinard à rêvasser dans ta chambre – pas une rêverie qui suinte la chouinerie à la Jean-Jacques : là, tu es transporté dans À Rebours et c’est Byzance jusqu’à la fin des temps. Tu optes pour ton premier acte de résistance culturelle dans une région qui repousse encore et toujours le Brennus mais qui laisse passer, pépouze, le mal incurable – le métal. Résistance donc, avec le transistor collé contre ta joue en attendant la sainte parole de notre général à nous, Bernard Lenoir.

Ça donne une poignée de chansons forcément sublimes à une époque où la pop anglaise vise d’abord le cœur. Elles flirtent avec le mièvre pour mieux lui faire un bras d’honneur et foncer à toute berzingue vers les cimes de la mélancolie. L’air se raréfie, le pouls s’accélère. C’est peut-être cela la pop, une musique légère, qui l’air de rien te permet de toucher le Sacré – parce qu’entre nous, le gamin réalise le tour de force de sortir l’album solo que Macca n’a jamais su faire. Une musique délicate, des chansons qui tiennent par un bout de ficelle et d’ailleurs, tu t’inquiètes pour elles tant elles semblent chanceler… Et pourtant, ce sont elles qui finissent toujours par t’allonger.

2 réflexions sur « Prefab Sprout, le voyage immobile »

  1. Dans mon histoire très personnelle de la musique ,l’album Steve McQueen n’est pas du tout un disque culte car en terme d’arrangement et de production il regorge de tic et de toc typique des productions des années 80’s , je trouve qu’a ce titre il a vraiment mal vieilli je lui préfère et de loin l’album Andromeda Heights paru en 1997.

  2. Prefab Sprout…. Une musique qui a changé la vie de pas mal de personnes…Et non, je ne trouve pas que les arrangements de Thomas Dolby déservent Steve Mac Queen, langley park ou Jordan, the comeback…….. Quand retrouverons nous de ces héros aux talents stratosphériques, ces Paddy MacAloon, ces Andy Partridge, ces Green Gartside…

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