« Ouais… C’est super ! C’est génial ! «
Marrant d’évoquer des oeuvres si minuscules (après Les Sapins de la nuit de Renz, ça va devenir une habitude), celle-ci tirée en vinyle 45t à 10 exemplaires par le label suisse bien nommé Poor. Son support, sans doute épuisé en quelques minutes, qu’en reste-t-il après le jour (l’heure) de sa sortie (jeudi dernier)? Il en reste déjà une empreinte numérique augmentée de trois inédits qui permettra à ceux à qui l’objet des Porta’s aurait échappé de se rattraper. Et surtout, une étrange vibration, celle de sa chanson titre Insupérable, néologisme (je comprends : « qui ne peut être qualifié de super »?) qui met sur la piste de la nature même de sa petite musique : impure, mutante, amateure, spontanée, elle émerge en petit comité d’un terreau familial et amical qu’on devine patient, passionné, artisanal.
Les instrumentaux (excepté Insupérable) révèlent leur nature profondément bancale dans leur production (le 4-pistes en pierre angulaire et l’ordi sur les genoux en bout de chaîne) tout en dégageant une liberté qui rappelle le rock allemand des années 70, on pense à du Faust de poche, ou du Neu! en version brocante (quelque chose du motorique du Quickspace Supersport en moins sur vitaminé, ou d’un Stereolab perdu à la campagne) ou une nouvelle vague du terroir, certains membres du groupe évoluant dans le milieu vivace des musiques qui n’ont pas d’gêne de marcher dans la boue (le label Pagans). Derrière des titres énigmatiques (Saccage dit, Retour à rien, Le troisième pôle), L’Argenté du Népal creuse cette veine de musique cosmique et répétitive à base d’instruments chinés, de jouets sonores, empilant couches de sons et textures, comme on construit le muret de son jardin, avec du matériau de récup, tranquillement, la tête dans les étoiles. La soucoupe volante des Porta’s laisse un bel agrogramme dans les blés du Lot-Et-Garonne, à chérir sur le champ.