On avait peu de nouvelles depuis ce qui paraissait des lustres de l’ami Pain-Noir, une grande chanson, des échos de déménagements, quelques mots de chaleur lors du premier confinement, ce moment que des majorités silencieuses ont dédié, comme souvent le font les majorités silencieuses, à la fraternité.
On a le droit d’aimer ces silences-là, apparents, calmes. Ça va bien avec l’idée que je me fais de Pain-Noir, peu de bruit et peu de fureur, mais des chansons qui de loin en loin, quand on s’y attend le moins, vous explosent en plein cœur.
Dans d’autres de nos vies, nous avons été camarades de jeu, déjà occupés de ses chansons, parfois des chansons des autres. Puis les années se sont empilées, les mésententes, puis nous avons atteint cet âge où l’on se retrouve enfin et finalement, benêts, autour du cercueil d’un autre camarade. Et les obsèques servent à ça, se retrouver, en toute polysémie. Et les drames précédents semblent d’autant plus stupides. Je n’ai jamais connu Balzane en tant que Balzane, mais en tant qu’amie. Depuis, elle écrit et chante ses propres chansons, et c’est un nouveau moment de notre amitié — l’amitié est une suite de moments, proches ou éloignés, je trouve celui-là assez beau. Je leur ai demandé, à elle et à Pain-Noir, s’ils voulaient bien offrir une reprise aux lecteurs de Section 26, comme si je leur demandais des nouvelles, et ils ont répondu avec cette merveille qu’on pourrait croire traduite de Bob Dylan par Christophe — il s’agit d’une des nombreuses merveilles inaperçues de Francis Cabrel.
Le pourquoi et le comment, on s’en cague enfin, pour quelques instants.