C’est comme un conte de fées. Comme un film de Frank Capra. Comme un fantasme. Voilà : c’est ce genre d’histoire improbable qui a priori ne peut pas être vraie, avec des héros qui n’ont pas des corps d’athlètes mais des têtes de dieux grecs, des héros qui ne marchent jamais seuls. C’est la fin des années 1970, dans une Grande-Bretagne déjà meurtrie. Ce sont des jeunes gens qui n’ont pas beaucoup d’avenir – “On n’a pas le choix pour s’en sortir : footballeur ou rock star” (rock star martyr était aussi une option) –, écrasés par le passé de leur ville portuaire – un passé incarné par un quatuor qu’on n’a pas le droit de ne pas aimer sous peine d’être excommunié. Oui, mais.
C’est toujours la fin des années 1970 et dans le pays, certains groupes mènent plus de 45 révolutions par minute et laissent entrevoir un (no) futur à ces gamins qui ont presque tous vécu le passage de David Bowie à Top Of The Pops en 1972 comme une épiphanie. Ils ont un disquaire (Probe Records, une caverne d’Ali Baba post-punk où ils étoffent une culture qui va devenir ahurissante) et un club (le Eric’s) comme points de chute, de dispute, de discute. Ils fricotent ensemble, tirent des plans sur la comète, jouent assez mal des instruments qu’ils ont choisis, chantent plutôt faux. Mais tous ont cette conviction qui permet d’ouvrir toutes les portes. Ils forment des groupes au line-up dingo (The Crucial Three, Big In Japan), très vite victimes des querelles des ego surdimensionnés de la plupart de leurs membres. Ils érigent The Fall comme modèle, s’acoquinent avec le label indépendant du coin (Zoo Records, dirigé Dave Balfe – qui signera Blur quelque temps plus tard – et le fantasque Bill Drummond – un gars ayant la réponse à la seule question qui vaille, What Time is love?), piquent des noms dans les comics américains, chantent les louanges de Robert Mitchum, pensent que Scott Walker – dont tout le monde alors se contrefout – est un génie, écoutent en boucle Forever Changes et l’intégrale de Burt Bacharach. Alors, c’est une histoire où les plus grandes gueules réalisent leurs rêves, chantonnent en français, fricotent avec une Courtney Love même pas majeure ou affirment enregistrer le meilleur album de tous les temps. Une histoire où des surdoués ne sont pas reconnus à leur juste valeur, où des gamins s’habillent en boys-scouts, où des chanteurs qu’on croit destinés aux teenagers manquent de sombrer dans la folie (avant de revenir à la vie), où le plus timide de la classe finit par tutoyer le sommet des charts, où certains ne cessent de se réinventer – musicalement comme physiquement –, où d’autres meurent beaucoup trop jeunes. C’est une histoire aussi triste et aussi belle que ça. C’est une histoire à laquelle aujourd’hui presque plus personne ne croit. C’est une histoire dont on a adoré qu’elle soit vraie.
Juste MERCI! Superbe tracklist pour de super morceaux!
Bravo continuez!
Je reve d’un beau mensuel papier Section-26!…
Merci ! Sinon, au vu de l’état de la presse musicale, il y a peu de chances que cela arrive… Habituez-vous plutôt à nous rendre visite sur le site !