L’idée m’est venue en parcourant le journal d’adolescente de ma mère, journal que j’ai découvert près de son lit après son décès. J’ai tout d’abord été surprise de trouver ce cahier d’écolière à petits carreaux encore en sa possession, mais surtout à son chevet, comme si ces souvenirs l’avaient accompagnée pendant ses derniers moments. J’y ai découvert la liste des prénoms des amoureux de ma mère au lycée, Bruno, Michel, Pascal, Claude (mon père) … ainsi que le récit de ses premières fois. Autant d’histoires d’amour qui m’étaient inconnues et qui lui appartenaient à elle, dans sa jeunesse. A la lire, il me semble qu’elle évoque un paradis perdu, ce moment où l’insouciance et la légèreté l’emportent sur le réel, ainsi elle écrit : « Comme mon cœur bat fort, comme je suis inquiète aussi … mais peu importe car il fait si beau et je suis si jeune ». Alors que la vie nous apprend souvent que les premières amours ne sont pas toujours les plus intenses, elles ont pour elles l’immense avantage d’être les premières.
Premiers regards échangés, premiers mots griffonnés, premier baiser à la sortie d’un cours, première peau touchée, premières mains qui nous touchent, première rupture qu’on pense insurmontable et qui nous donne envie de mourir. Tout commence à l’école, dès les petites classes, on a des amoureux, des copains qui sont un peu plus que des copains, cela fait battre notre cœur plus vite, et puis au collège, au lycée, les choses prennent une tournure plus sérieuse, on se drague, on sort ensemble, on « couche » pour la première fois, maladroitement, dans des endroits improbables. J’ai gardé la nostalgie de cette période où, pour dire à une personne qu’on l’aimait, on mettait en place toute une stratégie, quelqu’un allait dire à quelqu’un de dire à cette personne qu’elle nous plaisait bien. Et on attendait la réponse, fébrile et exalté, « alors qu’est-ce qu’il/elle a dit ? », comme si notre vie en dépendait. Et d’ailleurs c’était un peu le cas, notre vie dépendait souvent de ces émotions-là, tellement plus que des cours qui ne présentaient que l’intérêt de nous permettre de nous tourner autour. Je ne sais pas si les ados aujourd’hui agissent toujours ainsi mais j’aimerais bien. A l’époque où les choses se disent par sms, où on se ghoste sans scrupule, où amour et désamour sont si expéditifs, je repense à mes premiers émois avec tendresse, à ces heures passées à espérer un coup de téléphone (fixe), à guetter une silhouette dans les couloirs du lycée, à se demander qui est cette autre avec qui il parle dans la cour. Mais je crois qu’en fait tout ça ne disparaît pas, je suis encore cette fille capable d’attendre des heures un coup de téléphone, le cœur battant.
Les chansons qui évoquent les amours d’enfance, d’adolescence, sont innombrables et la sélection proposée est tout sauf exhaustive, parce que l’adolescence est aussi cette époque où on découvre l’amour, la musique, et le besoin de faire coïncider les deux. Je n’ai jamais autant écouté un titre en boucle que lorsque j’étais amoureuse, d’autant plus quand celui en face n’en avait rien à faire. Les chansons qui suivent parlent donc de ça, des premiers coups de foudre pendant la récré, de l’angoisse de se mettre en maillot à la piscine, de l’année scolaire qui se déroule de septembre à l’été qu’on espère ou qu’on redoute, de l’école qui nous fait rencontrer des visages, des prénoms, qu’on oubliera jamais vraiment, alors qu’on oubliera les théorèmes de maths et le nom de la prof d’allemand qu’on avait en 5ème. Mais je suis certaine qu’on n’oublie jamais la première fois où sur une page de notre agenda, on a écrit des centaines de fois un prénom et on a osé penser le premier « je t’aime ».
I Like 2 Stay Home #34 : Highschool Lovers
Un mix thématique par jour à écouter en temps de confinement.