Farmer Dave & The Wizards Of The West – S/T (Big Potato)

Son C.V. parle pour lui. Peut-être un peu trop souvent à sa place. Diffuseur, à ses heures perdues, de friandises chocolatées estampillées à son nom – Farmer Dave’s Roasted Hot Nuts – spécialiste éminent de l’herboristerie chamanique  – il a gagné son surnom lors de ses stages plus ou moins qualifiants dans un domaine agricole du côté d’Ojai, Californie  – Dave Scher s’est surtout taillé une solide réputation de virtuose de la pedal steel en prêtant ses services d’instrumentiste à tout ce que le gotha du folk-rock et de l’indie-rock américain compte de figures marquantes. Compagnon de route de Beachwood Sparks, acolyte de Kurt Vile ou Rich Robinson, force d’appoint chez Will Oldham ou Animal Collective : on l’excusera aisément du peu ! Malheureusement pour tout le monde, ce séjour prolongé dans l’arrière-scène a eu tendance à éclipser les quelques étapes marquantes mais très fragmentées d’une carrière autonome qui s’est tracée en pointillés estompés. Il y a bien eu cet unique album d’All Night RadioSpirit Stereo Frequency (2004) – enregistré en duo avec le batteur Jimi Hey et qui mériterait amplement d’être un jour extirpé des limbes dans lequel il a sombré dès sa sortie, ne serait-ce que parce qu’il s’y redéfinissait déjà une bonne partie des potentialités du néo-psychédélisme contemporain. Un Lp méconnu qui n’est pourtant pas complètement tombé dans les oreilles des sourds – au moins dans les esgourdes voraces de MGMT, on serait prêt à parier très gros sur ce point. Et puis il y a eu Flash Forward To The Good Times (2009) première et seule œuvre signée en nom propre par Farmer Dave qui laissait, elle-aussi, entrevoir une capacité certaine à nouer des liens entre passé et présent que ses confrères, moins dilettantes ou plus ambitieux, de la scène californienne se sont empressés de prolonger à sa place. Jusqu’à ce beau jour de janvier 2021, donc.

Enregistré à la cool, dans des conditions presque identiques à celles d’un concert semi-improvisé dans les clubs de Venice Beach où ces chansons ont d’abord été portées à maturation, Farmer Dave & The Wizards Of The West baigne tout entier dans cette atmosphère de camaraderie bonhomme qui invite l’auditeur à partager, sans pression ni contraintes, une revisite, plus inspirée que vraiment guidée, de quelques-uns des monuments de la culture musicale locale. Sans application apparente, Scher et ses camarades rêvassent en chansons, entre divagations psychédéliques – Exgesis, Right Vibration – et funk planant – Bohannon. L’équilibre entre les instruments est si parfaitement maîtrisé qu’il en vient ici à estomper toute trace trop audible d’effort ou de virtuosité. Les tâtonnements à la marge du rythme ou de la mélodie ont souvent été conservés, comme pour mieux restituer la spontanéité initiale des plaisirs du jeu collectif. Étonnamment peu complaisant pour un album de musiciens, chargé qui plus est de nombreuses références – Crosby, Quicksilver, Grateful Dead et bien d’autres encore – cet ensemble de neuf chansons a été condensé – c’est tant mieux – en une grosse demi-heure. Un temps limité qui suffit à concentrer l’essentiel : le charme approximatif et modeste de la passion musicale partagée.

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