Après deux EPs en 2020, Dummy publiait l’année suivante Mandatory Enjoyment, un premier album remarqué. Dummy s’y emparait, entre autre, de l’héritage de Stereolab, le revigorant d’une frénésie rare, proposant un rock hypnotique, nerveux et électrique. Trois ans plus tard, nous sommes ravis de retrouver les Californiens, autour de la promesse d’une Free Energy, toujours chez la solide maison de disque Trouble In Mind (En Attendant Ana, Melenas, The Tubs, Klaus Johann Grobe etc.). Joe Trainor, Emma Maatman, Alex Ewell et Nathan O’Dell reviennent gonflés à bloc. Là où Dummy aurait pu se contenter de faire fructifier les idées du précédent, les quatre musiciens ont expérimenté et se sont mis en danger.
Dummy embrasse désormais les années 90 de tout son être. Après nos locaux Bryan’s Magic Tears, les Américains s’emparent de l’héritage du son baggy britannique (Nullspace). En effet, le groupe se frotte aux programmations, un pied dans la salle de concert (Minus World, Soonish…), l’autre sur la piste de danse. Il émane ainsi de Free Energy un enthousiasme contagieux. L’album est un grand huit de sensations avec ses montées vives et ses descentes vertigineuses. Dummy gère ici merveilleusement les tensions, créant du contraste et de la surprise.
La paire Opaline Bubbletear / Blue Dada constitue alors un véritable manifeste des intentions du groupe. Le voyage démarre en douceur sur une longue introduction planante. Un saxophone y déambule sur une tapis de synthétiseurs empruntés à Klaus Schulze. À ce moment-là, Blue Dada se présente à nous sur un tempo modéré. La caisse claire millésimé (empruntée à l’Amen Break) répond à la voix d’Emma Maatman. Enfin Dummy s’emballe. La chanson se métamorphose dans une chevauchée survoltée space rock : un coup de maître !
Autre fantastique idée, l’enchaînement entre Dip in the Lake et Sudden Flutes. Là aussi, Dummy joue la carte du clair-obscur. À l’éthéré Dip In the Lake (et son usage malin du piano) répond l’irrésistible Sudden Flutes. Cette dernière porte l’héritage de Stereolab encore un peu plus loin dans une bacchanale de guitares noisy et pop, avant de tout fracasser avec des flûtes. Au-delà de ses intentions, la grande réussite de Free Energy se trouve aussi dans une production impeccable et des idées d’arrangements ingénieuses. Dummy opte pour un son maximaliste. Le groupe est fier, il ne s’excuse pas d’exister et l’affirme haut et fort ! Free Energy est un album vibrant et jubilatoire. D’influences connues et retraçables, Dummy tire une énergie pétaradante grâce à beaucoup de passion, une pointe d’ambition et d’audace.
