Il s’agit d’un phénomène bien connu : l’omniprésence d’une tendance musicale, la généralisation de ses gimmicks d’écriture ou de production, provoque quasi-systématiquement une forme de réaction ou de contrepied. Celle du laptop dans la musique expérimentale du début des années 2000 a logiquement contribué à ce que ce développe son contraire, à savoir la montée en puissance d’une esthétique de l’analogique, du matériel retro, de la circuiterie et du câblage. On ne pourrait comprendre la renouveau de la synthèse modulaire autrement, ou encore l’essor de labels comme Da ! Heard It Records ou Tanzprocesz. Car cela fait maintenant une bonne quinzaine d’années que se développe une scène mutante aux contours en perpétuelle évolution, qui réinvestit différents genres allant de l’indus oldschool aux entreprises électroniques concrètes ou aux différentes formes de bruitisme DIY.
Au sein de cette « mouvance », le projet Dottie Doppler pourrait faire figure de « super-groupe ». En l’occurrence, il s’agit de Philémon Girouard, figure bien connue des musiques noise avec Napalm Jazz, Oïmiakon ou Lubriphikatttor, associé à Blason, duo emblématique de la scène modulaire et analog synth française (jetez une oreille à beautiful interface panel sur Scum Yr Earth, magnifique proposition d’électronique abstraite). Pour un disque qui pourrait évoquer la rencontre entre les derniers travaux de Peter Rehberg et ceux de Thomas Ankersmit, ou encore avec certaines expérimentations hardware de Keith Fullerton Whitman. Des titres comme Radar ou Mustang Repetitor illustrent de manière particulièrement frappante cet art de l’électronique buggée et du psychédélisme déviant. Et aboutissent avec Plays à l’un des disques les plus impressionnants de l’année dans le domaines des musiques exploratoires. Saluons donc comme il se doit, et avec un petit décalage de quelques mois, cette sortie du label parisien Fréquences Critiques, qui rend magnifiquement compte de la vitalité de l’underground expérimental
Dottie Doppler plays par Dottie Doppler est sorti chez Fréquences Critiques.