Captain Wilberforce, When The Dust Just Won’t Settle (Blue Tuxedo)

L’artifice rhétorique est souvent associé aux tentatives de réhabilitation des œuvres jugées trop confidentielles par ceux mêmes qui les louent. Pour mieux inciter, sans doute, le lecteur avide de découverte distinctive à leur emboiter le pas, les critiques ont pris l’habitude d’abuser de la métaphore du secret : ceux que l’on garde jalousement et que seuls les initiés dévoilent et se partagent avec une parcimonie qui permet d’entretenir le sentiment du mystère et du privilège. En dépit de son absence à peu près totale de notoriété ou de  reconnaissance publique – à l’exception, certes notable, de quelques passages sur les ondes nationales britanniques – Captain Wilberforce n’évoque pourtant ni de près, ni de loin ces arcanes musicales énigmatiques qui ne se découvrent qu’au terme d’un cheminement tortueux. Aucune épine ne semble ici entraver l’accès au pot aux roses – en l’occurrence le cinquième album du groupe de Leeds – dont la floraison printanière et resplendissante s’offre sans réticence à toutes les contemplations. Nulle trace ici de ces divulgations savantes ou de ces délits d’initiés. Rien d’autre qu’une évidence pop qui incite irrésistiblement au partage le plus large possible, ou à baliser un accès qui serait simplement à la dimension des efforts et des soins attentifs apportés à leur œuvre par ces artisans à la fois inspirés et laborieux.

Même si Captain Wilberforce a publié ses premières œuvres en 2004, il aura mis plus d’une décennie à se muer en un véritable groupe. Depuis 2016,  Simon Bristoll – seul et unique songwriter – s’est entouré de trois collaborateurs réguliers qui confèrent une robustesse et une cohérence nouvelles aux deux derniers albums Black Sky Thinking (2017) et When The Dust Just Won’t Settle, donc. On y découvre une collection de douze chansons pop à la fois très accessibles et rigoureusement construites qui viennent, l’air de rien, s’inscrire dans la plus haute tradition britannique, intelligente mais jamais cérébrale, qui s’étend de Squeeze à Doves.

D’emblée, Sad Machine s’empare des cœurs et des neurones avec un riff de guitare simplissime mais instantanément mémorable, et un pont à l’ancienne ou résonnent à l’unisson les trompettes de Love. En dépit de son titre anglocentré, The View From An English Breakfast embarque du côté des antipodes de Crowded House alors que les rebonds rythmiques de When It Rains prolongent indéfiniment cette excursion dont on ne cesse de différer le terme. Bristoll s’y montre tout autant à son avantage dans un style lyrique que n’aurait pas renié le Mansun de la grande époque (We Don’t Know Anything) que dans le registre mélodieux des ballades amoureuses mélancoliques (I Think She Knows). Pas de secret donc. Rien d’autre qu’une réussite flagrante.

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