
Jeudi 10 avril, excitation générale, Pulp est de retour avec un nouveau titre annonciateur d’un album à paraître le 6 juin, 24 ans après We Love Life. Texto cryptique d’un ami (qui a le 06 de Lawrence) « Si jamais tu l’as pas écouté en direct, Candida aimerait jouer dans Tame Impala. Je ne divulgache rien d’autre. » Je comprends immédiatement, mais non, depuis que Lauren Laverne est passée en milieu de matinée sur la BBC6, je n’ai plus le plaisir d’entendre ses invités, venus autant en promo qu’en amis, livrer au vaste monde leurs nouvelles productions. Après The Divine Comedy et Stereolab, sans oublier Miki Berenyi trio, si ces dernières semaines ont évoqué la « grande » période des Inrockuptibles – celle où quiconque portait un costume et savait lire se voyait qualifier de dandy -, on est loin d’une nostalgie nauséabonde.
Preuve en est le videoclip réalisé par Jarvis à l’aide de l’IA, qui joue avec les photos de Different Class pour leur donner vie. Étonnant, si l’on considère le mal qu’avait eu le groupe à se débarrasser de l’association Britpop sur les deux albums suivants, qui évoquait la gueule de bois du succès mal digéré pour This Is Hardcore, et la recherche d’une forme de paix bucolique pour We Love Life. Après deux ans de tournée This Is What We Do For An Encore, Pulp s’est plus que réconcilié avec son passé, comme pour mieux regarder vers le futur. Et cette fois, M. Cocker le promet, il fera ça bien « This time I’ll get it right ». Il est là pour en profiter, et assumer son statut de (anti)-héros des common people en mal d’idoles. « I was born/ to perform/It’s a calling/I exist to do this/ Shouting and pointing. » (Je suis né/Pour jouer/C’est une vocation/ J’existe pour faire ça/ Crier et pointer du doigt). Il est loin le temps où Jarvis chantait avec mélancolie « I’m not Jesus/Though I have the same initials/I’m just the man/Who stays home and does the dishes. » (Je ne suis pas Jésus/Bien que j’ai les mêmes initiales/ Je suis juste l’homme/ Qui reste à la maison et fait la vaisselle.) sur Dishes.
Spike Island, composé par Jason Buckle (des All Seeing I) qui a rejoint le groupe à la guitare, revient sur le légendaire concert des Stone Roses, simplement parce que Jarvis, qui n’y était pas, aimait la phrase prononcée entre chaque morceau par un DJ « Spike Island/Come Alive ». Peut être que Dave Haslam, qui avait joué ce fameux 27 mai 1990, saurait identifier l’auteur de ces mots à qui l’on doit, si ce n’est une résurrection, un retour aussi joyeux qu’inespéré. Car si « en effet, lorsque l’époque où un homme de talent est obligé de vivre est plate et bête, l’artiste est, à son insu même, hanté par la nostalgie d’un autre siècle » comme l’écrit Huysmans, Spike Island semble moins « hanté » que mu par une volonté de nous inviter à continuer à danser contre vents et marées.
En attendant More, enregistré en trois semaines, j’ai finalement pu écouter cette fameuse chanson, après le déluge de messages et de posts. Sauf exception, j’ai toujours aimé les disques de Pulp à rebours, comme si j’avais besoin de calme pour les apprivoiser. Néanmoins à l’heure où comme pour beaucoup, ma vie ressemble davantage à Help the Aged qu’à Disco 2000, il ne m’aura fallu que deux écoutes pour l’aimer et me déhancher. On parlera donc de léger différé.