Selectorama : Silver Fox (Camisole Records)

Détail de la pochette de La Stèle Des Pleurs (Camisole Records)

Depuis 2014, le label Camisole Records alterne nouveautés et rééditions, toujours avec précision. L’esthétique est téméraire : elle trace les contours d’une mélancolie froide jusqu’à l’exploration sans démarcation du patrimoine synthétique français. New Age médiéviste (Les Légendes De Brocéliande de Serge Bulot, 1981), Library Music (la compilation Business Class Library Music), post-punk glacé (la récente réédition de l’unique single de Cold Dreams) ou disco cosmique (Thierry Meyer)  côtoient des nouveautés toutes aussi élégantes telles que La Stèle des Pleurs (minimal-synth dont l’album est à découvrir), Shelter ou Volcan, auteur d’un splendide EP, quelque part entre Tangerine Dream, Pointe du Lac et Jonathan Fitoussi. Adrien Barrière, alias Silver Fox quand il passe derrière les platines ou à la curation de compilations, fait ainsi cohabiter au sein de son label tout un angle mort (mais bien vivant) des musiques underground françaises. Sa sélection est à son image, alternant morceaux cultes indés, nouveautés pointues et classiques de la musique électronique.

01. Chris & Cosey – Heartbeat (1981)

J’admire assez peu de personnes, mais Chris Carter en fait partie. Avec T.G.T. ou en duo avec Cosey Fanni Tutti, il a toujours été en avance sur son temps, faisant de la musique industrielle alors que le monde venait de découvrir le punk et de la proto-techno, voir la trance au moment où les synthétiseurs venaient d’être introduits dans la musique populaire. Heartbeat est symptomatique de cet état de fait, et préfigure beaucoup de mouvements de la musique actuelle.

02. The Field Mice – Clearer (1990)

J’ai sûrement découvert The Field Mice et Sarah Records par l’intermédiaire d’un de mes groupes favoris : The Wake. En amateur de musique quasi exclusivement synthétique, je pense que c’est l’utilisation d’une boîte à rythmes qui m’a séduit de prime abord dans leurs productions. Par la suite, j’ai découvert leurs morceaux plus pop dont je n’ai pas besoin de faire l’apologie ici… J’ai toujours eu l’impression que Skywriting, l’album dont est tiré ce morceau, est délaissé par les popeux en anorak pour son côté électronique, voire acid-house, mais peut-être que je trompe.

03. The Wake – Melancholy Man (1985)

Here Comes Everybody est un des albums de post-punk que j’ai le plus écouté. Je dois avoir toutes les versions vinyles, rééditions comprises, et je l’ai permanence dans mes ipods et autres smartphones qui leur ont succédé. Ce disque est tellement juste, tout y est suggéré, malgré la mélancolie et la tristesse apparente, les mélodies sont légères et cristallines.

04. Testpattern – Ocean Liner (1982)

Mon morceau préféré de ce LP produit par Harumi Hosono de YMO. Un voyage au fond de l’océan, d’ou l’on remonte petit à petit pour finalement jaillir à la surface. L’ensemble du disque est un joyau de synth-pop d’une incroyable variété, on navigue entre un morceau critiquant la société japonaise sur un ton enjoué (Modern Living), à des morceaux de pop balnéaires (Sea Breeze) ou de la techno pop mélancolique en franponais (Souvenir Glacé).

05. Coldreams – Eyes (1986)

Coldreams était un groupe de Clermont-Ferrand, actif entre 1984 et 1986. Les morceaux reflètent parfaitement ce sentiment d’être délaissé par quelqu’un qui a beaucoup compté pour vous. Une mélancolie froide et obsessive imprègne les deux faces de ce 45T subtil, ne tombant jamais dans le piège du pathos que l’on reproche souvent à leurs contemporains de la cold wave.

06. Snowy Red – Never Alive (1982)

Il y a tellement de bons disques 80’s belges, que faire un choix est vraiment difficile. Ce morceau résume bien l’œuvre de Snowy Red, sincère et torturée. Il est devenu, sûrement malgré lui, une légende de l’underground du plat pays en démarrant dans le punk pour finir avec un des premiers classiques de la new-beat naissante. Il est malheureusement disparu il y a 10 ans.

07. John T. Gast – Angela (2018)

Un des meilleurs tracks de 2018. De la new-beat industrielle triste et nostalgique, matinée de grime. John T. Gast est un artiste anglais assez mystérieux, dont les morceaux ont apparemment été produits il y a plusieurs années. Ils semblent épargnés par une quelconque influence de la dernière « mode du moment ».

08. Moderne – Mercenaire Solitaire (1981)

Ambiance de polar, paroles intelligentes et drôles sur fond de synth-pop. Les anglo-saxons disent qu’on est les seuls à pouvoir faire ça.

09. New Order – Subculture (1985)


Quand on dirige un label assez pointu, il n’est pas toujours facile d’avouer que le groupe que l’on a le plus écouté est New Order. Le snobisme vous guette souvent et il est difficile de ne pas y succomber. Cependant, ce groupe m’accompagne depuis bientôt plus de 15 ans et j’assume parfaitement…

10. Vanderschrick – Ongehoord (2018)

Habiter dans un village nuageux de Flandre aide sans doute à écrire des morceaux de wave dépressive… Stroom est sûrement le label de rééditions le plus intéressant du moment. Beaucoup de choses très variés allant d’obscurités synth-pop à des compilations de virtuoses de l’ambient tel que Benjamin Lew. Le label ne néglige pas les artistes actuels, à l’image de ce 45T aux tonalités plus pluvieuses qu’une journée d’automne à Anvers.

11. The Other People Place – Let me Be (2001)

L’album dont est tiré ce morceau narre une histoire d’amour, de la rencontre à l’acceptation de la rupture. Chaque morceau est dédié à un moment clé de celle-ci. The Other People Place nous replonge aussi à l’époque des débuts d’internet avec ses cafés, ses chats et l’omniprésence du multimédia. Presque de la nostalgie rétrofuturiste aujourd’hui.

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