Thomas Pradier, Tout passe (Lunadélia)

« Les conflits m’épuisent, et me désespèrent,
chacun se pense en noyau de l’univers »

On a du mal à mettre des mots sur l’attirance qu’on éprouve pour les disques de Thomas Pradier. Depuis La nuit au ralenti qui fête ses dix ans cette année, on n’a eu un peu le temps d’y réfléchir, mais c’est toujours un peu mystérieux. Comme on a notre propre histoire, on s’est d’abord dit qu’on tenait en ce jeune homme chic un cousin au Dean Wareham de Galaxie 500, même voix un peu perchée, fragile, même poésie teintée de mélancolie et d’humour léger, mêmes obsessions velvetiennes. A force, on s’en fiche un peu de ce truc de similitudes avec les anglo-saxons qu’on a vénérés, parce qu’à l’heure de ce troisième album, on ne pense plus qu’aux chansons si personnelles du musicien toulousain.

Tout nous va chez Thomas, cette façon d’assembler ses mots teintés de romantisme un peu désuet et ses sons de guitares carillonnantes, tournoyantes, ses basses qui font tantôt plop plop tantôt doudoudou, ses nappes d’orgues en soutien, et ses mélodies qui tiennent à un fil. On parlait d’élégance, de fragilité, on pourrait aussi ajouter une sorte de modestie reposante qui s’appuie sur une science du recyclage des textures anciennes, un peu de folk, de songwriting, d’électricité mesurée avec ce sentiment de flotter, de marcher sur le chemin de crête, surplombant un volcan possiblement éruptif et psychédélique.

Tout passe creuse toujours plus profond ce que Thomas Pradier avait posé avec ses deux précédents albums : des chansons immédiatement attachantes (par un gimmick d’instrument, une phrase très belle, une mélodie évidente) qui s’assemblent dans ce style désormais reconnaissable : il s’amuse en stéréo avec des choses intemporelles qu’on ne sait plus datées réellement (écho, reverb, grelots), et dont il a fait sa signature. On aime sa gravité flottante (Tout autour de moi), ses doutes intimes (Retour à la normale) ou ses énergiques résolutions (Faire la fête) qui ponctuent un ensemble de chansons auto réflexives. Un disque qui dégage beaucoup de douceur, comme refuge parfait à la brutalité du monde.


Tout passe par Thomas Pradier est disponible sur le label Lunadélia Records

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