Pendant longtemps, bon nombre des groupes que nous chérissions étaient ceux avec lesquels nous avions grandi. Désormais, il y a ceux avec lesquels nous choisissons de vieillir. Parfois, ce sont les mêmes. Mais pas toujours. En musique comme en amour, la nuance est d’importance. A la simple continuation nostalgique des émois de jeunesse, dont l’intensité initiale suffit parfois à retarder la dissipation inévitable, il faut parvenir à substituer une autre source d’enchantement. Moins bouillonnante, sans doute. De celle qui puisse survivre à la dissipation des attentes illusoires de la nouveauté radicale, d’un chef d’œuvre susceptible de rebattre l’ensemble des cartes usées aux encornures d’un jeu distribué il y a plusieurs décennies. Les albums de Nada Surf se suivent, plus ou moins régulièrement. Ils se ressemblent aussi, souvent, et ça n’est pourtant jamais un motif de déception. Le sillon creusé avec persévérance par Matthew Caws et ses camarades est suffisamment profond et fertile pour y replonger à chaque occasion. Comme tous ses prédécesseurs sans exception, Moon Mirror contient sa douzaine d’excellentes chansons, alternant entre accélérations powerpop électrisées et ballades méditatives. Comme à chaque fois, l’impression s’impose d’entendre se renouer les fils d’une conversation intime avec l’un des auteurs les plus touchants dans les évocations honnêtes de ses fragilités. Continuer la lecture de « Matthew Caws (Nada Surf) : « Les chansons sont un espace de sécurité totale » »