
En de nombreuses occasions, un peu pour le plaisir de faire chier mais surtout parce que je le pense vraiment et sincèrement, il m’arrive d’inclure une ou deux saillies d’Iron Maiden première période dans ma liste des meilleurs morceaux post punk de tout l’étang. Prowler, Running Free, Women In Uniform, Iron Maiden, Drifter, Wratchild (une ligne de basse introductive à faire caguer JJ Burnel et Peter Hook de concert), Killers (chédeuvrabsolu, dans le genre les Allemands ont essayé de tuer nos parents pendant quatre longues années, seul le Section 25 de The Beast – Matrixmix —, sorti 6 mois plus tard, est à niveau), Purgatory, n’en jetez plus.
Pour un certain nombre d’initiés le Maiden des deux premiers albums , celui de la NWOBHM, sont le vrai truc. Pour ma part, ayant possédé plus de 48 badges du groupe dans une période allant du CM1 à la 4e, je valide quasiment tout jusqu’à Powerslave (1984). Mais, et j’en ai encore parlé il y a moins de 48 heures (to midnight) avec l’un des pontes de la clarinette basse internationale ayant travaillé avec Stockhausen, Ligeti, Boulez, et Luciano Berio (Alain Billard, pour ne pas le nommer) en dehors des deux premiers albums Iron Maiden (1980) et Killers (1981), point de salut. Et je pense que vous pouvez aussi lancer Ben Chasny (Six Organs of Admittance) sur le sujet si vous avez une petite quinzaine de temps libre et une connaissance parcellaire des écrits de Gaston Bachelard devant vous. Vous ne serez pas déçus.
Parce qu’avant l’arrivée de l’ex Samson, Bruce « air raid siren » Dickinson le chanteur de Maiden c’était Paul Di Anno. De son vrai nom Paul Andrews, né d’un père brésilien, cas métis rare dans la perfide Albion. Un type qui insuffle par la seule force de caractère de ses cheveux mi-longs un peu ébouriffés et de son chant alliant rage et fermeté, loin des falbalas parfois châtrés du métal de l’époque, une once de crédibilité punk à un groupe pas encore tout à fait formaté. Un groupe exceptionnel, brillant, racé, intouchable et dont le secret réside justement dans la fêlure et la sauvagerie de ce personnage pas tout à fait à la hauteur.
Ce que raconte assez bien le début du documentaire de Wes Orshoski* avec les témoignages des usual suspects (il n’y a exceptionnellement pas Flea, ni Thurston Moore mais des membres de Metallica parlent en leur âme et conscience et c’est ok) et un retour salutaire mais trop court sur cette période incroyable, que dis-je, sacrée. Contrairement aux autres qui visent en pure myopie ou en pur cynisme le marché mondial, ce bon Di Anno continue le train de vie d’un metalhead de l’époque : au pub jusqu’à la fermeture, et avec un peu de pouvoir d’achat une addiction à la cocaïne est savamment entretenue. Ça passe au national mais lorsque le groupe se lance dans d’aberrantes et bienvenues tournées européennes en première partie de Kiss ou Judas Priest puis finalement déjà en tête d’affiche, l’épuisement (le sien mais surtout celui des autres) finira par une éviction pure et simple après le Killers tour.

Paul Di Anno n’a alors que 23 ans et le reste de sa vie pour la foutre en l’air. Ce qu’il fera assez consciencieusement, lesté d’une belle indemnité de départ, 50 000 livres Sterling de l’époque. Qu’il va assez vite dépenser dans ses addictions tout en tentant de se croire chanteur de heavy metal dans des formations, qui, si elles bénéficient toujours de son aura d’ex de (Battlezone, Gogmagog, Killers) ne perceront jamais au-delà d’un cercle restreint d’initiés un peu aveugles et sourds**. La chute est longue et dangereuse, pudiquement évoquée jusqu’au moment ou le réalisateur retrouve la piste d’un homme en perdition et en fauteuil roulant, qui a préféré le système de santé des anciens pays de l’Est à la bienveillance britannique*** pour une opération vitale du genou dont il attend la concrétisation à Zagreb, vous imaginez le glamour absolu de la situation. Et là j’aime autant prévenir les téléspectateurs (dont certains fans de Die Form ou de Carcass, et c’est ok) que si vous kiffez les actes chirurgicaux filmés de près ou de loin, vous allez être servis. Pour les autres, un sac à gerbi ou une pause pipi sera plus que bienvenue. Bref, et puis il est mort, l’an dernier. Et on a tous eu une petite larme devant tant de gâchis. Puis on a headbangé comme des gros connards en réécoutant Wratchild. Un des meilleurs morceaux de l’after punk, je vous le confirme pour de vrai.
Séance à ne manquer sous aucun prétexte puisque la rencontre avec le réalisateur sera animée par le sémillant Guillaume Gwardeath, un des pire punk lettré néanmoins suppôt de Satan, auteur de la plus belles phrases des phrases cultes : « Je veux bien partir sur une île déserte mais seulement si je peux emmener mes cassettes de Slayer. » Gloire au malin et à Paul Di Anno, qui l’était moins, pour lui.
Paul Di Anno, Iron Maiden’s Lost Singer de Wes Orshoski sera diffusé dans le cadre du festival Musical Ecran ce mardi 11 novembre à 17h30 au Théâtre Molière à Bordeaux.
* Déjà responsable du super fendard Lemmy, The Movie et d’un documentaire ok sur l’un des groupe les plus mesestimés de tous les temps, The Damned. ** Les douze cent fans de Dominique Dalcan en PLS, déso les gars. *** Pas tout à fait chiens, Steve Harris et les autres l’aideront à régler ses frais médicaux.