À la faveur d’une vidéo virale sur les réseaux sociaux, nous avons découvert Louis Cole. En un peu plus de 4 minutes, le Californien déploie une pastille typique de l’humour internet (bricolée mais réalisation maline, blagues méta, etc.) et d’une musicalité étonnante. Les aventures de Louis Cole rappellent ainsi les mises en scène de Vulfpeck, un autre groupe phénomène de Youtube ayant imposé leur funk instrumental aride mais marrant à une échelle surprenante. Nous ne serons donc guère étonnés que les intéressés aient justement réalisé une vidéo ensemble. Ils partagent d’ailleurs plus que leurs mises en scène débridées : un vrai amour pour la musique noire et une qualité instrumentale virtuose. Time, son troisième album en solo, sans compter les quatre du duo qu’il forme avec Genevieve Artadi (Knower), sort sur la prestigieuse maison Brainfeeder, créée par Flying Lotus et hébergeant entre autres Thundercat ou Mr. Oizo. Si Louis Cole nous parvient par une voie sur laquelle nous sommes parfois circonspects, Time évite les deux écueils majeurs tendus à ce cheminement. Ni une démonstration technique fébrile de musicien, ni un produit dérivé de youtubeur : Time est un beau disque réalisé avec goût, adresse et énormément de maîtrise. Au-delà de l’esthétique, l’influence de Prince infuse chez Louis Cole dans un contrôle très poussé du processus artistique. L’intéressé joue, enregistre, mixe et réalise lui même le mastering du disque. Il y a certes quelques invités (Thundercat, Brad Mehldau, Genevieve Artadi, etc.) mais le Californien assure le gros du boulot chez lui, à la maison. Le résultat impressionne, tout ici semble facile, aisé et inéluctable. À deux pas d’une bacchanale crâneuse, Louis Cole joue les funambules dans le déploiement de ses talents et garde ses esprits pour les mettre au service de vraies bonnes chansons. Time offre une immersion dans une pop tirant vers la funk, le jazz, la soul, les musiques électroniques mais aussi, dans une moindre mesure, la pop sixties. Louis Cole passe de l’un à l’autre sans peine, avec fluidité. Sur Last Time You Went Away , le spectre de Michael Brown rode: la chanson invente une suite à She’s Alone de Montage. Plus loin, Louis Cole s’empare de The Assocation sur la charmante A Little Bit More Time. Freaky Time célèbre les noces du funk fiévreux dans une débauche rythmique, qui, à n’en pas douter, s’enchaînerait dans le tempo avec un classique 2-step de MJ Cole ou une obscurité broken beat du West London. La frénésie groovy s’empare aussi de la fantastique Real Life, chevauchée sauvage sur une route californienne. Quand Louis Cole ralentit la cadence, cela fonctionne encore. Tunnels in the Air tutoie les cimes et constitue l’un des sommets de Time, les arrangements évoquent en filigrane les aventures 80’s de Quincy Jones. Le tapis d’accords de Phone et Trying Not To Die nous enivre d’euphorie, la voix de Cole s’y faufile gracieusement. Si la production pourrait être un peu plus aérée, Time n’en constitue pas moins un disque réjouissant, une actualisation sans nostalgie de la musique funk, puisant à la fois au source du genre mais aussi aux formes plus contemporaines (R&B, dance music) avec une agilité déconcertante.
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Beau disque même si la production un peu lourdaude ne m’a pas emballé au départ… Mais en effet, tout a l’air simple et évident dans ce disque.
Hello ! Clairement Louis Cole gagnerait à confier les clefs à quelqu’un d’autre sur certaines parties du processus, notamment au mixage pour aérer l’ensemble.