Et alors, on écrit quoi ? On écrit quoi sur un groupe au sujet duquel on a déjà tant écrit ? On écrit quoi sur un groupe qu’on chérit – et peut-être le dernier groupe pour lequel on serait encore prêt à en venir aux mains ? On écrit quoi sur un groupe dont on pense à chaque disque qu’il a réalisé son meilleur album alors que bien évidemment, le suivant nous fout à nouveau par terre, nous laisse le souffle coupé, nous donne envie de nous servir un dernier verre ? Alors, on écrit quoi ? Des faits, peut-être.
Le 18 septembre, Peter Milton Walsh, le Samouraï de The Apartments, va réaliser le septième album studio d’un groupe né en 1978, à la destinée marquée par les disparitions impromptues, par les retours inattendus, à la destinée marquée par un drame, par une résurrection – mais ça n’a rien à voir avec la religion. Alors, c’est vrai : je croyais que l’homme ne ferait jamais mieux que No Song No Spell No Madrigal, un disque qui m’a accompagné au quotidien pendant au moins deux ans. Jusqu’au soir de juin où j’ai écouté – un peu avant certains – les huit chansons de In And Out Of The Light, un disque qui je crois traduit définitivement une idée qui me poursuit depuis si longtemps : Walsh est le seul songwriter de sa génération – non, de plusieurs générations en fait – qui est à la fois Burt Bacharach et Hal David alors qu’ils imaginent leurs plus belles chansons pour Scott Walker. Il y a quelques jours, j’ai écrit que cet album était un disque qui rend les nuits plus belles que les jours. Un disque qui permet de croire que la beauté est dans la rue. J’ai juste envie d’ajouter que c’est aussi un disque qui érige la mélancolie en art de vivre. Et moi, ça me va bien. C’est un disque rare. Un disque qu’il faudra écouter. Prendre le temps d’écouter, surtout. Après que quelqu’un d’autre en ait beaucoup mieux parlé que moi . Mais avant, je me suis dit que ce serait bien de retracer le parcours qui a mené Peter Milton Walsh jusque-là, jusqu’à un label bordelais – sa francophilie et son penchant pour le bon vin expliquent peut-être en partie cela. Alors, en vingt-six chansons choisies de la plus arbitraire des manières, retour sur une discographie toujours guidée par la recherche de l’excellence, de la note juste, de l’émotion qui serre le cœur, des mots qui résonnent comme des dialogues tout droit sortis d’un film de Melville, d’un film de Truffaut. Des mots qui résonnent comme s’ils étaient les devises qui, depuis (presque) le début, régissent notre vie. Des mots qui claquent parfois comme des Slogan(s). Des mots qui sont tout simplement beaux. Des mots comme “If I could, I’d put some blue sky in your head”. Des mots comme “What’s beauty to you? It’s a light in the dark”. Des mots comme “Some are for remembering and some are for forgetting / Either way, it’s gone”. Des mots comme “I’m tired of living / Or maybe I’m just tired of who I am”. Des mots comme “You’re not lost or broken yet”. Ou des mots comme “You were a running spring of fresh hopes, you had your pockets full of sunshine / I had my hands full of rain”. Des mots comme ça. Des mots qu’habille une musique taillée bien sûr sur mesure. Une musique qui sublime les petits et grands riens du quotidien. Une musique qui ne subit pas l’épreuve du temps. Une musique qui, je crois, peut changer le cours d’une vie.
TRACKLIST
01. Welcome To Walsh World*
02. What’s Beauty To Do
03. The Goodbye Train
04. Thank You For Making Beg (Fête Foraine version)
05. The Shyest Time
06. Great Fool
07. Help
08. Could I Hide Here? (A Little While)
09. No Song No Spell Madrigal
10. Nothing Stops It
11. All You Wanted
12. Attention To Life**
13. Mr Somewhere
14. She Sings To Forget You
15. Knowing You Were Loved (Fête Foraine version)
16. Twenty One
17. What’s The Morning For (Fête Foraine version)
18. World Of Liars (Seven Songs version)
19. Black Ribbons (Spring mix)
20. Breakdown In Vera Cruz
21 Things You’ll Keep
22. Please Don’t Say Remember
23. Everything Is Given To Be Taken Away
24. The Failure Of Love Is A Brick Wall (You Prayed For Me To Hit It)
25. Pocketful of Sunshine
26. We Have All The Time In The World
+ morceau caché
*Le texte est du poète américain Robert Lowell ; Dave Graney le chante et
Peter Milton Walsh l’a mis en musique.
** Cette chanson est en fait une collaboration de Peter Milton Walsh avec le groupe anglais Piano Magic, parue sur l’album Closure (2016).
Pour être précis, le texte de « Welcome to Walsh World » est l’adaptation par Robert Lowell de « Au lecteur », le poème qui ouvre « Les Fleurs du mal » de Beaudelaire :
https://genius.com/Charles-baudelaire-to-the-reader-trans-by-robert-lowell-annotated
Baudelaire, pardon…