LA PLAYLIST DES NOUVEAUTÉS DE FÉVRIER 2023

Pauline Nuñez
Graphisme : Pauline Nuñez

Allez, un aller simple pour les montagnes russes de la Pop Moderne. Celle qui s’étourdit dans le tourbillon de la ligne de guitare entêtante, celle qui déteste la monotonie et la redite, celle qui unit ses forces pour mieux lutter, celle qui colore nos cieux trop lourds. En avant pour 35 nouveautés à l’éclectisme idéal, histoire de croire un peu plus encore en son futur.

Écoutez cette playlist sur votre plateforme favorite : YouTube, Deezer, Spotify ou (à venir) en version mixée sur Mixcloud. Et aussi, sur agnès b. radio.

NDLR : Les playlists Deezer et Youtube ne comportent pas l’intégralité des titres de cette sélection.

1. Lael Neale, I Am the River (Sub Pop)

Lael Neale augmente le tempo pour son nouveau single qui fascine malgré sa colonne vertébrale fragile. Elle réussit l’exploit de contrebalancer la monotonie apparente du morceau par une ligne de guitare entêtante. DJ

2. The Go! Team, Stay and Ask Me in a Different Way (Memphis Industries)

La bande de Brighton, menée par Ian Parton depuis maintenant plus de 20 ans, présente la suite de Get Up Sequences Part One, paru en 2020. La Part Two, toujours aussi éclectique et dynamique, nous met en joie, plus particulièrement encore l’addictif Stay and Ask Me In a Different Way dans lequel s’invite Margot Manière de Tapeworms (nos Lillois préférés). CG

3. Ada Oda, Avevo Torto (62 TV Records)


Ça se passe à Bruxelles et ça combine une powerpop bien uptempo à un chant en italien. Attachant comme un chewing-gum sous la semelle, même si l’album frôle un peu la variétoche. TS

4. Dancer, Arch Nemesis (GoldMold Records)


Quoi, un supergroup ? Du post-post-post avec des membres de Current Affairs (Tough Love Records), Nightshift (Trouble in Mind Records), Order of the Toad (Gringo Records) et Robert Sotelo (Upset the Rhythm). Dancer sort un premier EP sur le label glaswégien GoldMold. PN

5. Eyedress (Kevin Shields remix), House of Cards (Lex Records)

« A dream come true » pour le musicien Philippin basé à Los Angeles : Kevin Shields ne remixe pas les chansons de n’importe qui mais il a accepté de le faire pour Eyedress et son titre House of Cards, paru sur son album de 2022, Full Time Lover. Comme un soulagement de percevoir dans ce geste un peu de reconnaissance pour ce jeune homme au talent immense et pourtant encore si confidentiel. CG

6. Ulrika Spacek, If the Wheels Are Coming Off, the Wheels Are Coming Off (Tough Love Records)

A l’écoute de ce single, le nouvel album d’Ulrika Spacek s’annonce être dans la même veine que le récent album solo de leur leader, Astrel K. Et c’est une excellente nouvelle. DJ

7. Avey Tare, Cloud Stop Rest Start (Domino)

Je ne vais pas faire semblant de connaître Avey Tare ; je ne savais même pas qu’il avait co-fondé Animal Collective avant de le Googler il y a quelques jours [ma culture musicale a sauté la décennie 2000]. Disons juste que je suis tombée sur son nouvel album et que j’ai trouvé ces 7 titres tous très inventifs, très addictifs. Le dernier plus encore, qui frappe pendant plus de six minutes des accords sombres sur lesquels se déposent, très distinctement, des mots encore plus forts. CG

8. Thurston Moore, Hypnogram (Thurston Moore + Radieux Radio)

Cette vieille ganache de Thurston Moore ne serait-elle pas en train de rentrer dans sa phase « hommage au Captain Beefheart commercial honni des puristes » ? On jugera à l’aune de l’album mais là, la question mérite d’être posée. Et je ne serais pas déçu qu’il y réponde par l’affirmative sur la longueur d’un album. Wait and see. EG

9. Deerhoof, Wedding, March, Flower (Joyful Noise Recordings)

Deerhoof nous a tellement habitué à des expérimentations plus ou moins digestes que cette superbe ballade au piano chantée en japonais va prendre tout le monde par surprise. DJ

10. En Attendant Ana, Wonder (Trouble In Mind Records)

Deviendraient-ils trop gros pour nous? Les franciliens En Attendant Ana – que nous avions mis très tôt Sous Surveillance en fin 2017 dans le préquel à ce site, le fanzine Mushroom (bien avant d’autres, eh oui) – et beaucoup soutenus depuis, ont fait bon chemin, malgré un second album passé un peu sous silence pendant la pandémie. Il annonçait pourtant l’envol d’un groupe parti de répètes dans un garage jusque sur les plus grandes scènes actuelles, avec toujours plus d’audace, d’inspiration et d’ambition, comme en témoigne ce merveilleux Wonder. D’un début dans la douceur, il s’émancipe à coup de guitares, puis explose d’une deuxième salve plus forte encore. La voix de Margaux, plus Stereolabienne que jamais, s’envole, répétant à l’infini : « I’m a good human being, my mama said, and I hope she’s right ». On la croit, ça se voit dans son regard sur les couvertures de magazines. TS

11. Lana Del Rey, A&W (Polydor/Universal)

Pendant longtemps je n’ai pas trop su quoi penser de Lana del Rey, probablement parce qu’il n’y a pas grand intérêt à avoir un avis à propos de celle qui a su s’imposer dans les cœurs de beaucoup grâce à un envoûtement qui n’appartient qu’à elle. A&W est le deuxième single du nouvel album à venir le 24 mars, Did you know that there’s a tunnel under Ocean Blvd, et se pose là, comme on dit, dans une sorte de sincérité brutale à laquelle il est difficile de ne pas céder. Joyau à deux facettes, face pop, face trap, qui disent à peu près la même chose et saura tordre les viscères de celles et ceux qui ont vécu les coups de la mélancolie désabusée avec laquelle Lana sait si librement composer. PN

12. Caroline Polachek, Billions (Perpetual Novice)

Impossible depuis quelques semaines de passer à côté du phénomène Caroline Polachek : elle est partout, jusqu’aux couloirs du métro parisien, et à raison : Desire, I Want to Turn Into You, une semaine seulement après sa sortie, s’impose déjà comme l’album pop de l’année. C’est ultra travaillé, efficace et moderne ; génial, tout simplement. CG

13. Lady Apple Tree, Didn’t Want to Have to Do It (autoproduction)

Une reprise terrassante de The Lovin’ Spoonful, découverte en live en première partie de Weyes Blood le 4 février dernier au Trianon. Avec le génial Sam Burton à la guitare ; la première sortie d’une Californienne à suivre. CG

14. Laure Briard, Au diable le coeur arraché (Midnight Special Records)

Toulouse, capitale du Brésil ? Les voyages de Laure Briard là-bas ont forcément renforcé sa façon d’aborder la musique : mélodies vaporeuses, placements de la voix flottants et aisance dans le changement d’atmosphère dans la même chanson. Qui a dit prog ? On appelle ça « Liberté », monsieur. RS

15. Cory Hanson, Housefly (Drag City)

On avait adoré Pale Horse Rider en 2021. Avec Housefly, le leader de Wand annonce son troisième album solo, prévu pour le 23 juin. Les guitares sont très rock, très américaines, plus lourdes qu’à l’accoutumée – ce n’est pas pour nous déplaire – ; la voix toujours aussi mélodieuse. Un combo qui présage le meilleur. CG

16. Glyders, Smooth Walker (Drag City)

Avec leur son un peu gras et un peu noir, les Glyders de Chicago poussent le maxi au mini et le mini au maxi sur l’autoroute des grands classiques du rock racine. PN

17. Afflecks Palace, Holidays (Spike Island Records)

Les Mancuniens d’Afflecks Palace continuent à ne pas révolutionner la musique tout en produisant des morceaux tout à fait réjouissants. Sciemment ou non, ils poussent désormais jusqu’à référencer Oasis (« caught in a landslide », Champagne Supernova) et possiblement The Jam (« what you [see] is what you get », Start!) sur fond de guitare très House of Love, dans une évocation des vacances britanniques aussi clichée que plaisante pour les amateurs du genre. PR

18. Gina Birch, I Play My Bass Loud (Third Man Records)

« Si a 20 ans tu ne connais pas l’intégrale des Raincoats sur le bout du coeur, tu as loupé ta vie » avait l’habitude de claironner mon excellent ami Kurdt Kobain…. EG

19. Django Django feat. Self Esteem, Complete Me (Because Music)

Cinq ans après une première collaboration sur le charmant Surface to Air, les Londoniens de Django Django retrouvent Self Esteem pour ce morceau ultra 90s, breakbeat à souhait et suffisamment efficace pour lorgner davantage vers la Haçienda que Dance Machine. En attendant l’album complet à paraître le 16 juin, les cinq titres de ce Off Planet Part 1 rétro-futuriste donnent envie de suivre les aventures interstellaires de Django Django, chacune des quatre parties représentant une planète. PR

20. Blackploid, Planetary Nebula (CPU Records )

Nouveau LP du producteur Blackploid, sur l’excellent label de Shefflield Central Processus Unit Records. Un sommet de purisme électro et techno, fidèle à l’esthétique typique du son Detroit. Pour les amateurs de Doplereffekt, Ectomorph ou Cybotron. VC

21. slowthai, Selfish (Method Records)

Sur ses deux premiers albums, slowthai semblait peiner à trouver la bonne formule. En s’éloignant du rap, il gagne en efficacité et en conviction, comme en témoigne cet extrait entre la paranoïa et le chaos. DJ

22. DAMEFRISØR, The Grip (Permanent Creeps Records)

Ultra référencé, le premier EP de ce groupe de Bristol a tout pour faire croire à l’imposture. Pourtant cette fausse froideur révèle toutes ses subtilités au fil des écoutes, comme en témoigne The Grid. DJ

23. Trainfantome, New Mistake (Howlin’ Banana Records/Influenza Records)

Les quatre gars de Lorient et Nantes envoient un mélancolique single dark pop qui préfigure l’album attendu cet automne. CM

24. dirishu6, Ritournelle (Hidden Bay Record)

Une ritournelle joliment entêtante sur fond de skate dans cette vidéo des shoegazers qui assureront la première partie de House of Love à Dijon. CM

25. Squid, Swing (In a Dream) (Warp Records)

Il faut beaucoup de talent pour toucher avec le chaos, mais Squid y parvient parfaitement avec Swing (In a Dream), premier extrait de leur deuxième album prévu le 9 juin. Nés de leur première tournée post-confinement, durant laquelle les cinq musiciens improvisèrent énormément sur scène, ces nouveaux morceaux ont nécessité beaucoup de travail pour parvenir à créer une unité dans un capharnaüm d’idées. Servi par un videoclip très réussi, les cinq minutes du morceau sont le reflet prometteur de ce numéro d’équilibriste. PR

26. Depeche Mode, Ghosts Again (Columbia)

L’intro résonne comme une adaptation du Bizarre Love Triangle de New Order, la vidéo rend hommage au Septième Sceau de Bergman, la mélodie est d’une perfection absolue : encore en deuil, Martin Gore et Dave Gahan signent le premier vrai tube de Depeche Mode depuis une décennie (et Precious). La mélancolie se porte en étendard, sans espoir de retour. CB

27. Marie Madeleine, No Love (autoproduction)

Marie Madeleine revendiquait une culture très large dans une interview : « du rap au jazz, de la chanson française aux divers folklores et musiques traditionnelles, du plus underground au mainstream dégueulasse ». Les voilà de retour, en enfants cachés « de Johnny Cash et Donna Summer« , avec un single posté pour la Saint-Valentin – coldwave bien dark et tripal. CM

28. Les Fils de Joie, Adieu Paris (Pop Sisters Records/PIAS)

Au début des années 1980, la vie n’était pas forcément rose à Toulouse, en témoignent certaines chansons des Fils De Joie, fans des Ramones, de Costello ou de Gainsbourg, qui réalisent aujourd’hui leur album jamais paru en 1986. Avec en guise d’entrée en matière parfaite, ce « hit » underground et nihiliste. CB

29. Alice, La fête est nulle (Les Disques Bongo Joe)

Une leçon de chanson sommaire par Sarah et ses amies Lisa et Yvonne (pas d’Alice en vue, sérieux ?). Tout ce qu’on aime : une sensation, une urgence, une expression, ça vient de Suisse et c’est à la fois kawaï et cassant. RS

30. Albin de la Simone, Les Cent Prochaines Années (Tôt ou Tard)

Avec son nom tout droit sorti d’une BD ligne claire et ses pulls à presque coucher dehors et suite à un bel album instrumental paru l’an dernier, Albin de la Simone signe une mélodie accroche-cœur, si joliment arrangée qu’on parvient à imaginer Gainsbourg au chevet des chansons de Forever Changes. CB

31. Arnold Turboust, Arpeggiator (Rue du Docteur Fontaine)

Dire qu’on éprouve une forme de tendresse extrême pour la musique d’Arnold Turboust, c’est encore loin de la vérité surtout quand cette voix inoubiable à l’éternelle jeunesse nous berce par son étrange diction et ses mots précieux. Aussi discret que nécessaire, son album s’appelle Sur la photo et il vient de sortir. RS

32. Daughter, Party (4AD/Glassnote Records)

Après 7 ans d’absence et à l’écoute de ce single, on ne peut que se féliciter du retour de Daughter dont l’album Stereo Mind Game sortira le 7 avril. CM

33. Shana Cleveland, A Ghost (Hardly Art Records)

C’est sacrément vivant un fantôme, au moins autant que le surf rock de La Luz, le groupe de Shana Cleveland. Vivement, décidément, la sortie de Manzanita, son prochain album solo. Ce sera le 10 mars. CC

34. Josephine Foster, Pendulum (Fire Records)

Un morceau habité comme une séance de spiritisme, hanté par une structure polyphonique où se mêlent les mélodies familières de tout ce qui peuple les grands espaces. VB

35. Lankum, Go Dig My Grave (Rough Trade Records)

Ce moment où les blessures deviennent cicatrices, à moins que ce soit l’inverse, où une chanson devient musique, à moins que ce soit l’inverse, ne se regarde pas dans les yeux sans être là. Lankum va sortir un nouvel album, si tant est que le terme « nouveau » ait un sens quand l’écoulement de la durée se tarit. CC


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