« Figée comme en décembre, j’essaie toujours qu’on s’entende, j’ai perdu l’envie de sortir, sérieux faut vraiment que je le sente, je me dis que c’est normal, c’est juste que je t’aime tellement, genre tellement » (extrait du titre Magmag)
Une entrée bénéfique dans une source de solution aqueuse à une température tropicale, entouré de montagnes glacées, c’est la sensation que l’on ressent en s’immergeant dans ce disque : des basses nous secouent, des échos de voix dissimulées, des cling et des clang en stéréo et toujours ces rythmes fluides qui font bouger des hanches. Agréable, mystérieuse, la musique du groupe canadien est aimable à tous les niveaux : si une filiation lointaine avec les sirènes psychédéliques plutôt années 90 Cocteau / Slowdive serait détectée par une vieille police des racines, des retours de précipités chelous sont aussi à noter du côté d’un groove certain, à base de samples et de boucles limites jazzy (vous avez dit trip hop ?) Sur le papier, ça n’était pas gagné, dans le casque ou l’enceinte bluetooth, cette belle deuxième référence pour le label brestois, Too Good To Be True, touche à la grâce avec une élégance des voix (comme on dirait : « j’entends des voix ») : celle de cette chanteuse à la fois discrète (toujours en retrait dans le mix, comme il se doit) et féérique, celles samplées d’on ne sait où qui renforcent l’aspect cinétique de la musique : elles guident, comme la lune, lumière bienveillante et inquiétante à la fois, les insectes que nous sommes.
On n’en demande pas plus, envoutés d’emblée par un album cohérent (alors qu’il est la compilation de deux EP) et à la proximité immédiate : dans ses climax poussés et remuants (Oh oui mes amis, et son émotion house) comme dans ses profondeurs douces (Wimbledon, travaillé en profondeur par ses basses et chaudes ou Trente-cinq et ses paroles à la poésie mélancolique et dépaysante : « J’ai laissé mon siège dans l’autobus, j’ai donné mon change encore, des échanges sur Ontario, j’ai tendance à penser trop, des fois j’avance moins que je recule »). Et pourtant, Dumb Train pousse l’attachement un peu plus loin : avec un petit tube fragile imparable à écouter en boucle, Chic Promenade, comme savait en écrire l’entité Domenique Dumont, notamment sur son second album Miniatures de Auto-Rhythm. Un compagnonnage auquel on pourrait ajouter l’électro organique des allemands de To Rococo Rot. Montréal-Berlin-Riga, une idée de symposium : dub agile, chanson électronique et rêverie légère, les portes d’une nouvelle dimension.