Closer to grey

Ruth Radelet / Chromatics
Ruth Radelet / Chromatics
2 octobre 2019

Le matin, assez tôt, il m’écrit que l’album des Chromatics est en ligne. Il me parle de la reprise de The sound of silence, me dit « je sais que c’est une chanson que tu aimes », il me connaît depuis peu de temps finalement mais il sait déjà ce qui est important.

Je télécharge rapidement l’application Spotify sur mon iphone, mais je m’agace toute seule, je ne parviens à écouter que quelques secondes de chaque morceau, c’est frustrant, je reprends un autre café, en m’énervant. Je ne suis pas quelqu’un de très patient. Il m’envoie un message : « Surveille tes mails, ce sera dans ta boite dans trois minutes ».

Trois minutes après, j’écoute l’album.

Trois minutes après, je suis chez moi.

Je suis chez moi dès que je retrouve la voix de Ruth Radelet, cette voix sensuelle et quasi irréelle, cette voix qui drape le jour d’une envie de nuit. Je suis chez moi dès que le disco l’emprunte à la cold-wave, que les rythmiques mécaniques viennent perturber le rythme cardiaque jusqu’à ce qu’il se calque sur ce tempo lancinant. Je suis chez moi dès que j’entends la reprise de Jesus and Mary Chain, la mélancolie comme en plus. Je suis chez moi dès que je découvre des titres comme Move A Mountain ou Touch Red, des titres qui, je le sais, me feraient pleurer après l’amour.

Toute la matinée, l’album repasse en boucle dans ma cuisine. J’ai au moins bu un litre de café. Je voudrais savoir écrire aussi bien que cette fille chante, je voudrais trouver les mots que la musique sait si bien dire, ceux qu’on ne trouve jamais.

Sept ans que j’écoutais les mêmes chansons d’eux, sept ans sans m’en lasser. Sept ans aussi que ma vie est ponctuée par cette musique, sept ans et sans doute davantage, depuis que mes jours et mes nuits ont changé de trajectoire. Il y a parfois des groupes qui vous accompagnent, ils ne le savent pas, mais leur musique s’insinue dans l’ADN de votre quotidien, tout doucement, c’est là comme si ça avait toujours été le cas.

J’ai le cœur Chromatics, je crois.

Il m’a raconté que la première fois où il m’a aperçue, j’étais dans cette ville, cette ville balnéaire où il avait croisé Ruth dans un bar. C’était les vacances, j’étais avec quelqu’un d’autre. In the city. Une histoire, de la musique, déjà.

Peut-être n’y a-t-il pas de hasard.

1er novembre 2019

Un mois est passé depuis que j’ai abandonné l’idée de comprendre comment fonctionne Spotify. Le froid est arrivé d’un coup, le réveil qu’on retarde d’une heure, les feuilles qui tombent au sol et les mains qu’on glisse sous un pull pour les réchauffer. Les paroles de Move A Mountain résonnent dans la cuisine : I think I’ll stay awhile now that the winter’s come / It’s been a long time since you’ve been gone.

Cela fait longtemps, cela fait toujours trop longtemps quand on attend.

Ce soir, j’irai voir Chromatics au Pitchfork Festival. J’espère entendre la plupart des chansons de ce disque. Je pense que je porterai une robe qui brille, un peu comme Ruth. Les filles timides se cachent toujours sous les lumières.

Je crois que le garçon qui m’écrit sera là lui aussi.

Nous nous retrouverons dans la nuit.

Closer To Grey vient de sortir sur Italians Do It Better, et Chromatics sera en concert au Pitchfork Festival Paris vendredi 1er Novembre. À lire aussi : Les amours polychromes, impressions sur l’album et les premières dates du « Double Exposure Tour » par Thomas Bartel. Et à écouter en playlist : https://section-26.fr/playlist-johnny-jewel/

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