« J’vois un vide que j’comprends pas »
La cellule de groupe entièrement (ou quasi) féminine est décidément bien ancrée dans l’histoire du rock et des musiques des marges, pour la plus grande joie des grands et des petits. Considérés avec bienveillance, parfois avec un brin de condescendance par la concurrence masculine, les groupes de filles trouvent souvent un accueil chaleureux du côté des fans (hommes et femmes) énamourés pour plusieurs raisons. Vrai ou pas, elles sont souvent nimbées d’une sorte d’innocence originelle, débarrassées des poses débiles et guerrières, combats de coq à la clé, des mascus de service. À la fois dans un héritage extrême des Shaggs (et donc plus ou moins soupçonnées d’incompétence – alors que les Shaggs c’est quand même aussi bien autre chose, LA LIBERTÉ par exemple) et des girl groups des usines à tubes de Motown ou du Brill Building (donc souvent sous la coupe d’un pygmalion), les groupes de copines s’en sont émancipé, traçant leur chemin depuis une quarantaine d’années, surnageant et faisant preuve de personnalité pour éclore aux oreilles du public et le marquer durablement. Qu’on évoque toujours la larme à l’oeil les Calamités, les Bangles, Dolly Mixture, Chin-Chin ou les Shoppies, c’est la preuve que ces néo-pionnières ont posé les fondations solides d’un genre à part entière.
Que ce soit du côté de Bruxelles avec Coeur à l’index ou de Paris avec Alvilda, le genre semble retrouver une vigueur particulière en ère francophone. On connait les ingrédients, guitares dynamiques avec plus ou moins de grain, solos sommaires (les meilleurs), couplets, refrains et surtout harmonies béat(l)es pour les plus aventureuses. Un esprit garage sixties, un rendu pop saupoudré de paroles plus ou moins insouciantes à chanter en chœur dans le public. Alvilda connait ses classiques et délivre ses éclairs (soft) power pop de poche en toute décontraction et élégance. Désarmés, on ne peut qu’abdiquer devant cette fraîcheur qui reprend les codes avec bonheur, tant elles sont en plus servies par une production de la spontanéité qui leur va bien. Les britanniques ne sont s’y pas tromper puisque le groupe parisien a trouvé refuge chez le label londonien Static Shock (comme les bruxelloises de Cœur à l’index chez les voisins de La Vida Es Un Mus), troublés sans doute par ce langage exotique qui les change un peu et qui leur revient comme un boomerang.
C’est Déjà L’heure par Alvilda est disponible chez Static Shock.