XTC représente une certaine idée de la pop anglaise, altière, ouverte, moderne mais s’inscrivant concomitamment dans une certaine tradition locale. Le groupe de Swindon n’a en effet jamais cherché à masquer leur anglicité. Comme d’autres (Blur, Madness, The Kinks) ils en ont même fait une singularité. Après deux galops d’essai, les musiciens marquent les esprits avec le superbe Drums and Wires (1979), devenu depuis un classique de la période.
XTC se forme au début des années 70, après plusieurs noms (Star Park, Helium Kidz) et moutures, la formation se stabilise en 1975 et signe deux ans plus tard avec Virgin. Le label de Richard Branson opère à cette époque un important changement depuis le rock progressif (Tangerine Dream, Mike Oldfield, Gong, Faust) vers le punk et la new wave (The Ruts, Human League, PiL, Magazine…). Colin Moulding (bassiste), Andy Partridge (guitare), Terry Chambers (batterie) et Barry Andrews (clavier) enregistrent les deux premiers albums d’XTC, presque en tir groupé. White Music et Go 2, tous les deux publiés en 1978, donnent à entendre un groupe en quête d’une identité propre. La formation anglaise s’époumone dans un art-rock de ruptures et brisures. Celui-ci évoque parfois, par exemple, Talking Heads. Le résultat est certes attachant et charmant mais manque aussi certainement d’un peu de sérénité. Le départ de Barry Andrews et l’arrivée de Dave Gregory (deuxième guitare) transforment positivement le groupe. Andy Partridge trouve avec Gregory une complémentarité qui succède à la concurrence d’avec Andrews. Le jeu plus classique de Gregory (débarqué d’un groupe pub rock de reprises) équilibre les expériences anguleuses de Partridge. Tout ce beau monde se retrouve en studio avec Steve Lillywhite (Ultravox, Siouxsie and the Banshees) pour enregistrer Drums and Wires.
Andy Partridge s’assure la part du lion en composant les deux tiers du disque, tandis que son camarade Colin Moulding signe le reste. N’allez pourtant pas croire que la contribution du bassiste est modeste ! Moulding écrit en effet Making Plans for Nigel, l’un des morceaux signatures d’XTC et premier véritable tube du groupe. Idéalement balancé d’entrée de jeu, la chanson annonce la métamorphose. Le motif de batterie pose l’ambiance avant d’être rejointe par les autres instruments. Making Plans for Nigel est pop mais ne renonce pas à son excentricité. XTC semble alors enfin trouver le juste ton. La suite de Drums and Wires confirme cette impression. Certes le groupe ne renonce pas à ses envies de fantaisies (When You’re Near Me I Have Difficulty, Roads Girdle The Globe) mais sait aussi se faire plus nuancé et délicat (Ten Feet Tall, Day In Day Out) . XTC s’inspire de son époque et l’assimile dans une musique iconoclaste. Des échos de ska parcourt Reel by Reel tandis qu’XTC s’éprend des rythmiques disco de la bande à Byrne sur Helicopter ou l’excellente That is the Way et sa magnifique section de cuivres. En douze morceaux, parfois plus selon les versions (certains pressages ont un 45 tours en plus) XTC signe un des classiques de la new wave anglaise. Drums and Wires marque aussi un tournant dans la discographie dans le groupe de Swindon. Après des débuts tonitruants, la formation britannique s’apaise progressivement au point d’abandonner les concerts en 1982 pour se concentrer sur les disques studio. Drums and Wires saisit ainsi XTC dans un moment unique, sa passionnante phase de transition entre velléités art-rock et volonté pop.