Avant même d’être musiciens, auteurs et compositeurs, Sharleen Spiteri et Johnny McElhone sont des mélomanes, des passionnés qui n’ont de cesse de partager les passions en question. Alors, on trouve dans ce répertoire que résume forcément imparfaitement ce best of – troisième du genre dans la discographie du groupe – des emprunts à la soul, northern (l’un des deux inédits est la reprise du classique Keep On Talking, comme hymne rétrofuturiste destiné aux pistes de danse de Wigan) ou non (le couplet de l’éternellement euphorique Black Eyed Boy “emprunté” au The Tears Of A Clown de Smokey Robinson & The Miracles ; la reprise de So Tired Of Being Alone d’Al Green, enregistrée en 1992), voire matiné de disco (Mr Haze, single extrait du dernier album en date Hi, qui doit beaucoup au Love’s Unkind de Donna Summer et Giorgio Moroder). On trouve aussi de ces refrains qui collent aux tympans sur fond d’arrangements luxuriants, des pirouettes pop (qui rappellent avec les formes que ce diminutif signifie avant tout populaire) exécutées avec une aisance sidérante, à l’instar du carré d’as Black Eyed Boy (encore lui), Halo, Summer Son et When We Are Together.
Entre invités de luxe (le Wu-Tang Clan sur la version réorchestrée au cordeau du très sensuel – sexuel ? – Say What You Want, l’acteur Alan Rickman le temps d’un duo à la Nancy & Lee sur le trop méconnu Start A Family ou le crooner taiseux de The Blue Nile Paul Buchanan le temps de Sleep) et ballades qui portent haut les couleurs pastel d’une élégante mélancolie (In Demand avec ses boucles de guitare toutenbois et surtout Insane, qui se dévoile ad lib sur fond de cordes dramatiques comme la BO rêvée d’un James Bond imaginaire), il y a le jubilatoire Inner Smile, à la mélodie irrésistible interprétée par Sharleen en costume d’Elvis 1968 et coécrit avec l’Américain Gregg Alexander – one hit wonder comme tête pensante des New Radicals – mais aussi quelques manques. Parce qu’avec ce genre de compilations, on regrette le plus souvent qu’elles se privent d’intégrer quelques morceaux d’albums qui pourraient faire baisser la garde aux plus sceptiques. Et dans le cas présent, on pense forcément à The Hush, enregistré avec Rae & Christian, magiciens (tr)hip-hop de Manchester et patrons du label mancunien Grand Central, qui aurait pu / dû être Unfinished Sympathy à la place de Somewhere Not Here. Ou à Telephone X, titre d’ouverture du déjà cité Careful What You Wish For qui efface le nom d’Elastica de toutes les encyclopédies en très précisément 3’43. Alors voilà, en vingt-quatre titres (et quelques oublis), The Very Best Of dévoile un Texas dans (à peu près) tous ses états et qu’on le veuille ou non, rappelle le talent de Sharleen Spiteri et Johnny McElhone, dont le premier hit – éreintant dès le premier accord – fait bien trop de l’ombre à un répertoire d’une évidence mélodique, d’une pertinence artistique et d’un éclectisme assez fascinants.