Selectorama : Bruno Piszczorowicz, auteur de « Kiss, paroles de fans » (Camion Blanc)

Kiss
Kiss sur la couverture du livre « Kiss, paroles de fans » de Bruno Pisczorowicz (Camion Blanc)

Au surlendemain d’un concert à Bercy, soit disant le dernier, où la présence de pas moins de deux membres de la rédaction de Section26 est encore très loin de faire débat, il m’est paru indispensable de proposer une sélection à Bruno Piszczorowicz, qui vient de publier au Camion Blanc un fort réjouissant recueil de paroles de fans du groupe new-yorkais. Déjà auteur de deux titanesques tomes intitulés L’Ère Metal chez le même éditeur soit plus de 2000 pages sur les racines du mal en long et en large, il a recueilli avec une passion sans faille cette somme ahurissante de témoignages sur ce qui fait, encore aujourd’hui, la tentaculaire attractivité d’un mythe en pré-retraite. Et dont il nous livre ici un itinéraire bis(s). Et le concert alors ? Ben, c’était super comme d’habitude, et ce n’est pas Pauline Richard qui me contredira.

01. I Stole Your Love (version de KISS Alive II, 1977)

Figurant originellement sur Love Gun, le sixième album studio du groupe paru début 1977, cette version live de I Stole Your Love illustre à merveille l’âge d’or de la première mouture du groupe, celle des four Originals et de la Kissmania alors à son apogée, entre ventes de disques par millions, gigantesque tournée à guichets fermés partout dans le pays et merchandising agressif en plein développement. Pour nombre de fans, notamment ceux qui ont connu le groupe à cette époque, le visuel intérieur de ce double vinyle reste encore aujourd’hui parmi les trésors de la KISSstory. KISS est partout en cette année 1977, et voilà en partie pourquoi.

02. Hard Luck Woman (album Rock And Roll Over,1976)

Léger retour en arrière avec un extrait de Rock And Roll Over, l’album du « retour aux sources » d’un rock basique et inspiré après le brillant et ambitieux Destroyer (pour les spécialistes, on passe d’une production de Bob Ezrin à celle d’Eddie Kramer). Après le carton du sirupeux Beth, le batteur Peter Criss reprend le micro pour cette superbe ritournelle countrysante écrite par Paul Stanley. Elle sera reprise quelques années plus tard par la star country/pop Garth Brooks sur un album hommage au groupe produit par Paul Stanley et Gene Simmons (tant qu’à faire) et judicieusement appelé Kiss My Ass.

03. God Of Thunder (Paul Stanley Demo) (albums The Box Set, compilation 2001, et Destroyer 45th Anniversary Super Deluxe Edition, 2021)

Une curiosité, la démo initiale de God Of Thunder, l’une des chansons-signatures de Gene Simmons gravé sur l’album Destroyer de 1976. Le compositeur Stanley sera fort marri quand le producteur Bob Ezrin modifiera dans les grandes largeurs son travail initial et en confiera le chant à Gene Simmons. L’éminent producteur (Alice Cooper, Lou Reed, Peter Gabriel puis plus tard Pink Floyd) va faire de cette démo initiale et sautillante qui doit beaucoup aux racines soul du jeune Stanley Eisen (le vrai nom de Paul Stanley) une pièce lourde, nauséeuse et symbolique de l’Almost Human Gene « The Demon » Simmons.

04. 100.000 Years (sur Kiss, 1974)

Avec sept classiques du groupe pour un total de dix titres gravés, il est peu dire que le premier album du groupe est un des sommets de sa discographie. Beaucoup préfèrent cependant le regain d’énergie et la légère accélération de tempo que ces titres subissent sur le double album en concert Alive ! qui va consacrer le groupe auprès du public (il sera le premier double album live à dépasser le million de ventes aux États-Unis, très peu de temps avant le carton du Frampton Comes Alive). Ce morceau est resté un titre fort des concerts de KISS, notamment par son petit break de batterie propice sur scène à une démonstration plus longue (et plus reposante pour ses comparses) de Peter Criss, Eric Carr puis Eric Singer. Si vous êtes allergiques aux solos de batterie, ce qui est mon cas, alors la version originelle de de cette perle rock vous comblera peut-être.

05. Sure Know Something (sur Dynasty, 1979)

Après une année 1978 aussi mouvementée en interne que positive au dehors (les quatre albums solo, la compilation Double Platinum, le film Kiss Meets The Phantom Of The Park, la lunch-box, les poupées, le flipper, tout ça), l’album Dynasty va être celui de la rupture avec une partie de la fanbase historique qui ne supporte pas les relents disco du tube interplanétaire (le premier du groupe, sinon le seul) I Was Made For Loving You. La musique du groupe est pourtant bien loin de coller à celle des autres figures de proue de leur label Casablanca Records (Donna Summer pour le meilleur, Village People sinon) mais le mal est fait et les salles se remplissent désormais de sorties en famille et de voyages organisés de centres de loisirs. Second single de l’album, Sure Know Something ne connaitra pas le même succès que I Was Made… sinon dans le cœur de nombreux fans, ceux sensibles à la nunucherie romantique et à l’évidence pop.

06. Tomorrow (sur Unmasked, 1979)

Les années 80 commencent chantait alors par chez nous Michel Jonasz. Pour KISS, l’époque est synonyme de remous et de ressac de popularité, une première pour eux depuis l’explosion de 1975. Alors que Peter Criss va bientôt s’en aller et qu’Ace Frehley perd peu à peu pied tant musicalement que physiquement (il vit à plein son trip de rockstar alcoolisé et cocaïné), la paire Stanley/Simmons continue de faire équipe avec le producteur Vini Poncia, espérant retrouver le même succès qu’avec Dynasty. C’est un KISS plus power pop que jamais (The Knack cartonne alors) mais toujours ramené à son propre ADN qui figure sur ce funeste Unmasked au succès plus que décevant. L’album est pourtant globalement de qualité (oubliez la fin du disque par contre) pour qui aime ces vignettes de pop énergique à guitare qui ne semblent construites que pour exploser sur les refrains, celui de Tomorrow par exemple.

07. Mr. Blackwell (sur Music From “The Elder”, 1981)

Après deux albums grand public et une perte d’intérêt du public purement rock, KISS continue de creuser ce qui ressemble alors à sa tombe en allant quémander la respectabilité et les félicitations de l’intelligentsia rock. Le spectaculaire succès du groupe n’aura pas fait que des heureux parmi les « professionnels de la profession » qui voient un KISS un groupe insignifiant, bas du front et vulgaire. Pour la seule fois de leur carrière, Paul Stanley et Gene Simmons vont donc suivre les sirènes de la respectabilité en se lançant dans un concept album (il faut dire que The Wall est passé par là, son immense succès aussi). Si l’album a ses laudateurs, il n’en continue pas moins de diviser, sinon consterner la KISSfanbase près de trente ans après sa sortie. Il sera en tous les cas un bide complet ! Quelquefois indigeste mais assez rafraichissant par la diversité des ambiances proposées, il reste à mes yeux un très bel album. En extrait, Mr Blackwell, une pièce atmosphérique plus que réussie, l’un des trois morceaux coécrits (paroles) par un « vieux pote » du producteur Bob Ezrin, un certain Lou Reed.

08. Thrills In The Night (sur Animalize, 1984)

KISS a repris du poil de la bête avec le superbe Creatures Of the Night (1982), dernier album à faire figurer Ace Frehley au générique (même s’il n’aura joué au final sur aucun morceau du disque) avant de tenter le tout pour le tout en abandonnant les maquillages pour l’album Lick It Up. Pari gagnant avec le retour des certifications or/platine et d’un large public en tournée. KISS maintient tant bien que mal le navire à flot par la suite alors que la place de soliste bouge encore (Mark St.John, un album à la suite de Vinnie Vincent et puis s’en va) et que Gene Simmons s’obstine à vouloir poursuivre une carrière de série Z à Hollywood. KISS trace en tous les cas sa route avec un metal mélodique calibré pour MTV et le jeune public d’alors, la preuve avec ce morceau composé par Paul Stanley avec Jean « Feel The Heat » Beauvoir !

09. Tears Are Falling (sur Asylum, 1985)

L’apogée fluo du groupe avec le visuel de l’album et de la tournée Asylum de 1985. Les jeunes et fougueux bariolés de Los Angeles (Mötley Crue, Ratt etc.) sont passés par là et leur succès a inspiré le Baiser (comme Alice Cooper, le disco ou même Pink Floyd en leur temps) qui entend rivaliser tant musicalement que visuellement. L’explication à cette orgie de couleurs vives et cette tenue d’un Paul Stanley plus impliqué que jamais (il produit seul l’album et tente tant bien que mal de lui apporter les deux ou trois titres forts dont il a besoin pour connaître le succès) à côté de son comparse Gene sur pilotage automatique. Il reste de cet album deux à trois titres titres justement, donc ce Tears Are Falling qui fait son petit effet pour qui aime le heavy rock radiophonique aux couleurs de l’arc-en-ciel.

10. Reason To Live (sur Crazy Nights, 1988)

De Beth à I Still Love You, KISS s’est attaqué souvent avec bonheur à l’exercice de la balade. Sur l’album gavé de synthétiseurs FM Crazy Nights figure cette belle ritournelle renforcée d’un clip où, sans doute influencé par le film d’Yves Boisset sorti quelques moins avant, une voiture de luxe (ici une Porsche) est incendiée par un top model fort courroucée d’avoir été congédié par l’amer Paul. Pourtant promis au succès, le titre fera chou blanc auprès du public. Pour le retour au succès, il faudra attendre le ravissant Forever de l’album suivant, Hot In The Shade.

11. Silver Spoon (sur Hot In The Shade, 1989)

Vaste fourre-tout musical, Hot In The Shade entend prendre congés des « années MTV » et faire entrer KISS dans les années 90 avec un mélange de racines et de petites graines plantées ici ou là et avec plus ou moins de bonheur (un épouvantable morceau aux couplets rap notamment). Au milieu de ce flux long de près d’une heure, surnagent d’excellents morceaux donc ce très rock Silver Spoon.


KissKiss, paroles de fans par Bruno Piszczorowiczest disponible aux éditions du Camion Blanc.

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