Pour la cinquième fois déjà, la sublime Vallée du Tarn s’anime au son des « musiques hors normes, aventureuses et inclassables », comme le précise Benjamin Maumus, responsable de la programmation de ce festival engagé et militant, où la campagne s’impose comme écrin préservé. A Ambialet, petite commune de 500 âmes située à l’est d’Albi, « la découverte est de mise, tous les projets à l’affiche tous méritent le même intérêt, le même éclairage, pas de classement ni de tête d’affiche ici », nous confirme-t il. Un choix serein détaillé dans ce selectorama estival où il ne manque que les sons de la nature.
01. Frantx (Fanny Meteier / Andrea Giordano / Pierre Pradier / Marco Luparia)
Un teaser quelque peu énigmatique, certes, qui donne à peine un avant-goût de ce que pourrait être Frantx sur scène. Pour tenter de cerner un peu mieux ce projet, il faut s’intéresser de près aux quatre protagonistes de l’histoire, et là c’est comme ouvrir une pochette surprise, on découvre une constellation de projets passionnants nourris d’influence des plus variées.
02. Noémi Boutin
On se connaît de longue date avec Noémi, c’est grâce aux loustics du Quatuor Béla que nous nous sommes rencontrés. Noémi aurait dû venir jouer au festival Baignade Interdite en 2018, et un malencontreux accident de la route nous a privé de ce moment. Depuis, chaque année on réitère l’invitation, et pour tout un tas de raisons ça n’a pu se faire jusqu’à cette année… c’est dire notre impatience !
03. Selvhenter
Chaque année, au moment de commencer à travailler sur la programmation, on échange avec d’autres organisteur·trices de festivals complices situés sur la même période pour tenter de monter des tournées avec des artistes qui ne pourraient se déplacer pour une date isolée. Et malgré la distance (kilométrique) qui nous sépare, c’est cette année les danoises de Selvhenter qui nous relieront aux festivals Météo (Mulhouse) et Teriaki (Le Mans).
04. Lice
Il suffit parfois d’une seule vidéo pour déclencher l’envie irrépressible d’inviter un groupe au festival. C’est le cas ici. Ensuite vient le temps d’écouter les albums, de fouiller pour trouver des infos. Mais surtout, concernant Lice, c’est la lecture de live reports qui ont fini de convaincre, tant il semble que leurs concerts sont aussi intenses que surprenants.
05. Thibault Florent
Il y a quelque chose de très étonnant dans ce solo de guitare, c’est qu’il sonne vraiment comme un gamelan. Sacré exploit, puisque il y a quand même un monde entre une six cordes et ce grand orchestre de percussions traditionnel indonésien. Mais Thibault Florent réussit admirablement, autant par les couleurs et les timbres qui émergent de son attirail que par la construction même de la musique, ses rythmes, sa temporalité.
06. Mélanie Loisel
Sous le nom un peu inquiétant de Borguefül, Mélanie Loisel tisse une toile musicale au crin de sa contrebasse dans laquelle il est bien confortable de se laisser prendre. Cela pourrait être un nouveau genre de musique sacrée, ou rituelle, peut-être du fait qu’elle fait écho à des forces élémentaires : montagnes, pierres, failles, vent, pluie, nuits, terre, poussière. J’en profite aussi pour passer un petit coucou ici à un super studio et label dans lequel est né ce premier disque : La République des Granges.
07. Trucs
« Estiva », l’estive, le pâturage d’été des troupeaux, longue vidéo montée sur un morceau issu du premier album de Trucs, qui réconcilie le cinéma expérimental et le documentaire animalier. À l’image du New Trad Fest dont vous parliez récemment dans ces colonnes, le paysage des musiques traditionnelles est foisonnant et un terrain d’expérimentation constante. Ici en particulier, c’est en Béarn que ça se passe, avec des structures devenues des références : le label Pagans, le collectif Hart Brut, le centre de création Cerc.
08. Gwenifer Raymond
On a beaucoup plaisanté dans l’asso sur ce clip en imaginant que la faune empaillée qu’on voit à l’écran était celle de la vallée du Tarn dans laquelle on organise le festival. Gwenifer Raymond serait alors une prêtresse vaudou, maniant quelque magie noire pour animer des cérémonies obscures et clandestines. Bref. Sinon, il est à noter que ce concert d’ouverture aura lieu au coucher du soleil, sur un site exceptionnel qui offre un des plus beaux points de vue sur la vallée.
09. Simon Henocq
Simon Henocq sera le deuxième artiste de l’histoire du festival (treize éditions tout de même…) à venir jouer ici pour la troisième fois. On l’a connu à Baignade Interdite avec Vegan Dallas en 2016, retrouvé en 2023 avec Parquet, deux concerts mémorables. Le voici donc de retour pour notre plus grand plaisir, avec le projet We Use Cookies, un solo d’abstract electronics gourmand à souhait qui s’annonce haut en couleurs.
10. Maraudeur
On finit cette sélection et ce tour d’horizon (non exhaustif !) par le groupe Maraudeur, un modèle du genre « post-àpeuprèstout ». En gros, des musiciennes qui semblent avoir digéré un peu tout ce qui s’est fait en musique entre 1974 et 1989 – peut-être même sans l’avoir forcément écouté – même si ça sonne très actuel et pas du tout passéiste. Avec un sens inné du DIY, elles retrouvent finalement ce sentiment très joyeux et frais de jouer de la musique avec les potes, juste pour le fun.