Lispector without a map

Lispector
Julie – Lispector / Photo : Katura Jensen

Sur un forum de Belle & Sebastian, je découvre son nom et une adresse e-mail, on est aux alentours de 2001 / Je la contacte pour sortir en France son disque Human Problems & How to Solve Them (celui avec l’image du cheval sur du papier millimétré) avec mon label Antimatière / Julie est d’accord / Je viens à Paris pour discuter avec mon distributeur Chronowax. C’est Jérôme Mestre qui me reçoit et qui me passe un savon pendant une demi-heure : on ne peut pas travailler comme ça, la pochette souple en plastique transparent, l’absence de code barre… mais finalement il veut bien le faire /

J’écoute Julie à la radio sur France Inter. Elle est dans une émission de Bernard Lenoir autour du 11 septembre 2001 parce qu’elle habite New York / Je découvre ses nombreux MP3 au fur et à mesure, je crois qu’ils sont numérisés à partir de cassettes ou de CD-R, ils sont sur un site, je ne sais plus / Je suis effaré par la profondeur de son œuvre / Je scotche sur son morceau Winona Forever que nous essayons de reprendre avec mon groupe Buggy / De passage à Paris, je croise Julie pour la première fois, je ne sais plus en quelle année, sans doute 2004. Je suis en sueur, et je suis super stressé, car je dois l’appeler au téléphone pour lui dire quand je suis dans la rue en bas de son lieu de travail / Avec d’autres gens, on a créé le label Herzfeld et on invite Julie à nos soirées concerts à la galerie Stimultania à Strasbourg. Julie déboule avec son séquenceur, joue assise par terre, et c’est hallucinant, tellement c’est bien / Elle vient au concert avec un ami, Guillaume, qui joue sous le nom de Maison Neuve / Mon but secret est de sortir un album de Lispector sur Herzfeld. Mais ça ne se fait pas / Julie fait quand même un concert avec le Herzfeld Orchestra et sort un single digital, trois titres de son répertoire réenregistrés et mixés par Vincent Robert, ça sonne d’enfer / la pochette est une photo de l’intérieur de sa maison d’alors, prise par Skype / Je revois Julie en concert, avec un groupe, mais je ne sais plus si c’est à Paris ou à Strasbourg / Elle sort un disque sur Twisted Nerve, un label de Manchester quand même, c’est en 2008 / Elle habite à Brighton à ce moment-là, comme Jean-Daniel Beauvallet, Everett True, et Vincent Vanoli qui en a fait une bande dessinée d’ailleurs et que j’offrirai plus tard à Julie / Je suis persuadé qu’il existe une injustice à propos de la reconnaissance que Julie n’obtient pas. Mais à vrai dire, Julie ne court pas après / Je me dis aussi, qu’on aime bien les artistes cultes américains ou anglais, moins ceux qu’on a sous les yeux / Mais que si on les aimait tous beaucoup, ils seraient moins cultes / Mais que le culte ne nourrit pas bien quand même / Bref / Je demande à Julie d’écrire des paroles pour mon groupe Luneville dans lequel je chante. Je lui envoie des mélodies de chant et le sujet de la chanson, et quelques jours plus tard, je reçois un petit poème étonnant en anglais qui colle parfaitement à la mélodie, c’est chaque fois un plaisir de les interpréter, en répétition et en concert / Julie est d’ailleurs reconnue par ses pairs anglo-saxons, pour son écriture (rare pour une française) et sa voix : The Go! Team, le groupe de Brighton, l’invite sur son album à chanter, notamment pour une chanson en français que j’adore : Ye Ye Yamaha (ce qu’elle ne fera jamais elle-même sauf une pub pour un joaillier new-yorkais et jusqu’à son nouveau disque) / Le groupe Whyte Horses, passionné par les années soixante, trouve en Julie une lointaine héritière de yéyés fantasmés pour notamment Astrologie Sidérale, que j’ai récemment fait écouter à un collègue érudit en astrologie. Il m’a écrit : « Excellent, j’ai kiffé » / Quand j’ai pensé à Langue pendue, mon fanzine, j’en ai parlé à Julie pour l’interviewer justement sur son rapport à sa langue natale. Elle me dit que chanter en français pour elle, c’est comme chanter en Auvergnat, c’est une langue régionale en gros / En passant, elle en a profité pour dessiner le logo du fanzine (un L et un P enchevêtré qui tire la langue). Je l’ai trouvé tellement bien, que ça m’a motivé à le faire. Depuis, Julie m’a aussi proposé de faire la mise en page / Mon disque préféré de Lispector est Life Without a Map / Sur Small Town Graffiti, son dernier disque paru sur Teenage Menopause, je craque pour Nothing to Believe, qui est un des nombreux sommets de l’œuvre de Julie : arrangements simples et clairs, mélodie imparable, rythmique super reposée / Il y a aussi ces clips, ces karaokés, et tout plein de choses à découvrir en permanence, c’est difficile de suivre Lispector, c’est ça qui est grand, c’est la vie, without a map.

L’album de Lispector, Small Town Graffiti, sort sur Teenage Menopause Records le 11 octobre, Lispector sera en concert samedi 5 octobre à l’Espace B à Paris (événement et billets ici) et Lispector sera invité de notre émission Transmission sur Rinse France dimanche 6 octobre de 12h à 14h.

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