Ceux qu’on a aimés en 2024

Bilans fumeux, stats approximatives, course à la méritocratie : on ne va pas tenter de vous convaincre que ces sempiternels marronniers hivernaux en forme de classements d’artistes inclassables nous gonflent à un point plutôt saisissant. Ceci étant dit, on est évidemment fiers de défendre ceux qu’on a aimés, donc les revoici réemballés pour votre réveillon en mode playlist, pour ceux qui auraient envie de revêtir un collier de perles scintillantes pour célébrer la fin de cette année pourrie, en en attendant une autre peut-être pire. Nous, en tous cas, quoi qu’il en soit, on sera toujours là pour vous aider à digérer la soupe à la grimace. (TS)

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NDLR : Les playlists Deezer et Spotify ne comportent pas l’intégralité des titres de cette sélection.

1. Dummy, Nine Clean Nails (Trouble In Mind Records)

Extrait du second album Free Energy (sorti le 6 septembre chez Trouble In Mind) du quartet noise pop de Los Angeles. Un tempo tendu et une basse bondissante, un peu moins kraut et bruyant que dans le passé toutefois, ce qui ne nous empêchera pas de les (re)voir sur scène où ils excellent vraiment. TS

2. Good Sad Happy Bad, Shaded Tree (Textile Records)

En 2020, Shades nous avait éblouis. Si l’on a un peu tendance à réduire le quatuor (ex-Micachu & The Shapes) à son membre le plus renommé, il ne faut pas oublier de citer CJ Calderwood, Marc Pell et Raisa Khan aux côtés de Mica Levi. On reste dans les choses expérimentales avec des morceaux composés sur la base de sessions improvisées, comme ce Shaded Tree où le refrain apparait au cœur d’une superposition de guitares, claviers, batteries, saxo. L’album All Kinds Of Days est paru le 29 octobre chez Textile Records. TS

3. Astrel K, Darkness at Noon (Tough Love Records)

Si l’album d’Ulrika Spacek nous avait totalement épatés dans un registre post kaléidoscope krautisant complicado, voici leur leader en solo avec un nouvel essai particulièrement convaincant. Plus délicat, Darkness At Noon confirme l’immense talent de Rhys Edwards. TS

4. Mount Eerie, I Saw Another Bird (P.W. Elverum & Sun)

Après six ans d’absence, Phil Elverum aka Mount Eerie, ex-leader de The Microphones, revient avec un nouvel album. On retrouve sa voix organique et ses guitares un peu brouillonnes, qui se font peu à peu plus présentes pour, sur la fin, nous assourdir. « La journée, je fais tout le travail qui doit être fait, et je perds l’esprit de la nuit ». C’est poétique et – sans surprise venant de lui – magnifique. CG

5. MJ Lenderman, You Don’t Know the Shape I’m In (ANTI/Epitaph)

Sur cet extrait de son formidable album Manning Fireworks, MJ Lenderman continue à nous enchanter avec sa pop mélodique, confortable comme un vieux gilet qui serait resté intact depuis 1994. La vidéo hommage à Toy Story sera l’occasion pour les plus jeunes de découvrir l’artiste. Pour ceux qui ont raté le concert complet au Point Ephémère en novembre, on peut espérer un rattrapage au printemps, puisqu’une nouvelle tournée européenne est prévue. PR

6. Tindersticks, Always a Stranger (Lucky Dog/City Slang)

Comme le laissait présager le magnifique New World, Tindersticks renoue avec cordes et cuivres sur Soft Tissue – quelque peu délaissés sur Distractions, sorti en 2021 – sans pour autant opérer de retour en arrière, explorant de nouvelles atmosphères musicales comme on redonnerait vie à une maison de campagne chérie. L’équilibre entre les jeux d’ombres et de lumières, les dissonances et le velouté de la voix, la désillusion et l’optimisme qui caractérise l’œuvre du groupe est toujours parfait, mais remarquablement rafraîchi après trente ans de carrière. PR

7. Cabane feat. Kate Stables, Melodies of Love (Cabane Records)

Les Mélodies d’Amour, elles courent – mais en prenant leur temps quand il s’agit de Cabane… Et se nichent surtout droit au cœur – ou aux cordes qui accompagnent la guitare toutenbois du maître des lieux et la voix clémente de la fidèle Kate Stables. C’est l’un des plus beaux instants suspendus – de ceux que seul Thomas Jean Henri parvient à imaginer – du deuxième album de Cabane, qui vient de voir le jour et qui, comme son prédécesseur, a déjà hérité du titre d’ami pour la vie. Un disque à (This Is The) Kit ou double, qui rend le quotidien un peu plus doux. CB

8. Adrianne Lenker, Sadness as a Gift (4AD)

Si vous souhaitez enfin écouter quelques minutes de ce que la country a de meilleur à offrir, il y a Kris Kristofferson ou cette chanson, ce qui revient au même : paroles et musique, les larmes qui coulent tranquillement à la rencontre d’un sourire. Le nouvel album solo d’Adrianne Lenker est sublime, encore différent, encore la famille : des pianos et des violons, un coin de feu, un recoin d’âme molinesque, l’encadrure d’une fenêtre – l’univers. CC

9. Myriam Gendron, Long Way Home (Chivi Chivi)

Morceau aux couleurs folk littéraire issu du troisième album de l’autrice-compositrice basée à Montréal. Un hommage en filigrane à l’écrivaine Dorothy Parker illustré par une tonalité apaisante et un sentiment pacifié de retour dans un lieu intime et familier après un long séjour hors de soi. VB

10. Beth Gibbons, Floating on a Moment (Domino)

Et pourquoi ne pas prendre le temps qu’il faut ? Pourquoi ne pas surgir quand bon nous semble, quand il nous semble que le moment est le bon ? Beth Gibbons nous revient avec toute sa sagesse et avec le fruit d’une maturation de dix ans — lumières déchirantes du chœur, rythmes lents, les deuils et les baumes. PN

11. Julia Holter, Sun Girl (Domino)

Cinq ans après le baroque et monumental Aviary, la plus musicologue des chanteuses pop revient enfin et dévoile cet extrait brillant, rêverie concrète et chaotique avec boîte à rythme escarpée, fretless bass, field recordings, Yamaha CS-60, mellotron, flutes et cornemuses s’enchevêtrant autour d’une douce comptine enfantine. TG

12. Chanel Beads, I Think I Saw (Jagjaguwar)

Le New-Yorkais Shane Lavers présente son premier album sous l’alias Chanel Beads. Il y mêle synthétiseurs et instruments conventionnels, voix féminine et masculine, brouillant les genres pour un résultat expérimental et plutôt dark, entre dream pop et synth-wave. Un nom à suivre. CG

13. Broadcast, Follow the Light (Warp Records)

Plaisir lumineux toujours de retrouver les inflexions vocales ainsi que l’écriture flirtant avec l’ésotérisme de Trish Keenan. Un morceau flottant et mystérieux issu d’une série de démos inédits réalisés entre 2006 et 2009, compilés sur l’album Spell Blanket. VB

14. Jessica Pratt, World on a String (Mexican Summer/City Slang)

Son nouvel album depuis cinq ans, Here in The Pitch, est arrivé le 3 mai via Mexican Summer et City Slang, et c’est une véritable petite délicatesse façon Bacharach dépouillé, Bossa cold, Broadcast sous Xanax : une douceur parfaite. TS

15. Clairo, Echo (autoproduction)

Le 12 juillet, Clairo sortait son troisième album. En même temps, les indie girls transitaient de leur Brat girl summer à leur Girl-with-bangs summer. CG

16. Chris Cohen, Sunever (Hardly Art)

Du psychédélisme cotonneux, voilà ce qu’on en disait en 2019. Depuis, plus trop de nouvelles. Eh bien, ne changeons rien, continuons à nous alanguir dans cette volupté-là avec l’ex Deerhoof Chris Cohen, l’homme également aux manettes de quelques beaux disques, dont Marina Allen, récemment. TS

17. The Lemon Twigs, They Don’t Know How to Fall in Place (Captured Tracks)

Les frères d’Addario délivrent leur énième merveille d’affilée, qui s’éloigne un peu de Todd Rundgren et Alex Chilton pour lorgner vers la pop baroque, ce qu’on ne saurait qu’approuver. Pour rappel, et malgré ce cinquième album, ils ont 24 et 26 ans, ce qui confère à l’ensemble une fraîcheur salutaire. PR

18. Juniore, Elle est où ? (Le Phonographe)

Une chanson slow pour juke box lumineux, dans une salle des fêtes qui se vide. La nuit. Juniore chante à la lune. RS

19. eat-girls, Unison (Bureau B)

Le trio lyonnais est un peu notre Exek hexagonal. Après une première sortie confidentielle il y a quatre ans, plutôt rugueuse et motorique, ils reviennent avec leur premier album Area Silenzio chez Bureau B. Lancinant et cosmique, Unison est un beau mélange d’influences synthétiques, minimalistes et trippy. VDPJ

20. Cindy Lee, Flesh and Blood (autoproduction)

Le Canadien Patrick Flegel, ex-membre du très estimé groupe Women, a déjà six albums à son actif depuis la dissolution du groupe. Son nouvel album Diamond Jubilee, à l’origine écoutable uniquement sur Youtube et un site obscur, est un copieux (Triple LP) mélange très prenant d’influences pop, rock, glam et new wave, nimbé d’une voix éthérée. CM

21. Spirit of the Beehive, Duplicate Spotted (Saddle Creek)

Après le presque accessible Entertainment, Death, paru en 2021, le trio de Philadelphie dévoile un cinquième album plus étrange et déstructuré que jamais. Souvent inconfortable, par moments grisant, You’ll Have to Lose Something est un album à réécouter, à apprivoiser. Il est décrit ainsi par Zack Schwartz, l’un des deux membres fondateurs du groupe : « C’est à propos d’amour à sens unique, c’est imaginer un scénario voire toute une vie dans ta tête. Vient le moment où l’autre personne te remarque enfin et tu crois que tes problèmes sont résolus mais ils ne le sont pas, vraiment pas. » CG

22. Memorials, Acceptable Experience (Fire Records)

Le duo Verity Susman (Electrelane) et Matthew Simms (Wire) fonctionne à merveille et leur single est juste envoûtant. CM

23. Sinaive, Elégie (Antimatière)

Calvin et sa bande, désormais fixée à un trio avec Alicia Lovich à la batterie et Séverin Hutt à la basse, viennent enfin défendre un premier album, après bon nombre de EP très souvent remarqués chez nous. Avec Pop Moderne (merci pour la ref, on apprécie, et les autres en face : TG – paru le 26 octobre sur Antimatière), Sinaïve franchit une étape de plus, sans oublier l’esprit brut, noise, saturé de leurs débuts. Mieux encore, beaucoup de nouveaux apports de samples, de rythmiques, de riffs clins d’œil viennent s’ajouter ici. Et des paroles inspirées, toujours aussi Chaos-du-monde-compatibles VS. poésie noire. TS

24. Kim Deal, A Good Time Pushed (4AD/Beggars)

Avec A Good Time Pushed, troisième extrait de l’album Nobody Loves You More, Kim Deal rappelle qu’à part ses proches – Kelley, Jim MacPherson et Steve Albini – elle n’a besoin de personne pour composer de grandes chansons. PR

25. Fontaines D.C., Favourite (XL Recordings)

Fontaines D.C. dans un registre indie pop/The Cure : aussi délicat que réussi ! AGF

26. Redd Kross, The Main Attraction (In the Red Records)

Ils sont frères et ont fondé leur premier groupe avant d’entrer au lycée, ils font de la power pop, les guitares et les harmonies évoquent d’autres titres entendus ailleurs, on peut leur reprocher de faire toujours la même chose, ils n’ont pas peur du kitsch dans leurs videos, leur optimisme peut être pris pour de la naïveté… Mais ils ont 57 et 60 ans et viennent de Hawthorne, Californie, puisqu’il s’agit de Redd Kross et non des Lemon Twigs. Un enfant de 10 ans peut entendre les similitudes, et un de 13 identifier l’influence de Big Star, mais on peut aussi tout à fait AIMER LES DEUX (coucou Etienne Greib). L’album, simplement intitulé Redd Kross, est excellent. PR

27. Gruff Rhys, Bad Friend (Rough Trade Records)

Encore lui ? Extrait génial de l’album Sadness Sets Me Free sorti le 26 janvier, dans lequel Gruff Rhys s’illustre encore dans le genre doux-amer réconfortant, comme une balade au Pays de Galles sous un ciel de plomb pour un rendez-vous manqué. PR

28. Christopher Owens, No Good (True Panther Records)

Porté disparu depuis presque une décennie, l’ancien leader diaphane de Girls – l’un des groupes les plus importants à la charnière des années 2010 – revient de presque tout et par surprise avec un nouvel album, superbement intitulé I Wanna Run Barefoot Through Your Hair. Avec No Good, il signe l’une de ces chansons écorchées vives, taillée sur mesure pour tous les amoureux d’un romantisme en lambeaux. C’est beau, un peu mélancolique, un peu désabusé et bien sûr, délicieusement addictif. CB

29. Peter Perrett, Disinfectant (Domino)

Une bien belle pluie d’invités pour ce nouvel album solo de l’ex-Only Ones. Au générique de The Cleansing : Bobby Gillespie, Johnny Marr et à la manœuvre sur ce morceaux et d’autres, Carlos O’Connell de Fontaines D.C.. EG

30. Shellac, WSOD (Touch and Go Records)

STEVE ALBINI EST VIVANT ! EG

31. Amyl and the Sniffers, Big Dreams (Rough Trade Records)

Amy Taylor et sa bande d’Australiens nous sortent un hymne comme on n’en fait plus, de ceux qui donnent du courage, que l’on a envie de crier sur les routes, et ce clip à la Easy Rider ne gâche rien. CG

32. Being Dead, Van Goes (Bayonet Records)

Un single ultra-accrocheur sur lequel le groupe d’Austin démontre tout son potentiel. CG

33. Alvilda, Chômage (Static Shock)

Pas besoin d’être inscrit à l’ANPE pour apprécier le tube powerpop qui ouvre le premier album d’Alvilda, enfin disponible chez vos disquaires adorés. AGF

34. EggS, Head In Flames (Howlin’ Banana/Prefect Records)

Nos Local Heroes sont de retour ! Dans ce clip réalisé par le bassiste Manolo Freitas sur les photos d’un certain Jules Vandale (un jeune journaliste qui écrit chez la concurrence, mais bref), Charles Joujoujag nous jette à la face une pluie de guitares jangly, d’instruments variés (saxo, trompette, claviers) et de chœurs enflammés sur ses mélodies accrocheuses à la mélancolie poing levé. TS

35. Corridor, Mon Argent (Sub Pop)

Single à la ritournelle addictive pour la bande de Montréal. Leur nouvel album Mimi est sorti le 26 avril chez Sub PopTS

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