L’explosion commerciale de la musique électronique ponctue la fin des années 90 et le début de la décennie suivante. Musique underground pour les clubs, longtemps absente des radios et chambres adolescentes, puis en quelques années, les Daft Punk, Stardust, Fatboy Slim, Chemical Brothers ou The Prodigy changent sérieusement la donne. Dans ce tintamarre vibrant, Basement Jaxx dégainent deux classiques en 1999 et 2001 : Remedy et Rooty. Avec le duo britannique, la house music n’a jamais été aussi débraillée et aguichante. Felix Buxton et Simon Ratcliffe ne cherchent en effet guère l’approbation de leurs pairs mais misent sur l’efficacité et leurs mélodies pop. Si Remedy marque de jolis points (Rendez-Vu, Red Alert, Bingo-Bango), les Londoniens trouvent leur rythme de croisière avec Rooty, son successeur en 2001. Meilleur album de leur carrière, il saisit Basement Jaxx au sommet de leur inventivité, dans une bacchanale d’idées casées au chausse pied, dans un disque compact et frénétique. Il faut dire que quand les deux producteurs forment le groupe en 1994, Simon Ratcliffe n’est pas un jeune premier. Avec une expérience dans le son breakbeat hardcore (sous le nom de Tic Tac Toe), il va trouver en Felix Buxton, rencontré dans un pub de Clapham par un ami commun, un camarade pour dérouler une musique house joueuse et fanfaronne.
Basement Jaxx se cantonnent d’abord au format maxi en publiant de nombreux classiques dans ce format (Fly Life ou Samba Magic), ils signent finalement avec XL pour leur premier album cinq après leurs débuts. Le label anglais, émanation de Beggars Banquet dédiée à la dance music, accompagne à corps perdu l’émergence d’une musique électronique populaire. XL et Basement Jaxx se sont très bien trouvés : le duo de producteurs va joindre aux paroles les actes et enquiller des tubes roturiers, un peu voyous mais surtout malins. Sur Rooty, les grands singles sont légions. L’album démarre en trombe sur la géniale Romeo chantée par Kele Le Roc. Au-delà de son clip bollywoodien, Basement Jaxx déroule un tube pop excitant et frais. Le groupe va maintenir cette exigence tout au long de Rooty, sans grosse perte d’inspiration en cours de route. Excessif, jamais dans la mesure, l’album est un train lancé à grande vitesse dans un looping de sensations. Les autres singles sont tout autant des classiques. Jus 1 Kiss donne la pêche en quelques mesures tandis que la mythique Where’s You Head At nous provoque dans un pogo. Il ne faudrait cependant pas réduire Copito de Nieve (le gorille de la couverture) à quelques tubes accompagnés de fillers. Basement Jaxx ont soigné les détails. Le R&B de SFM répond à la pop électronique mariachi de Broken Dreams. Cette dernière prend d’ailleurs presque des allures de I Monster ! Quant à Crazy Girl, elle trouverait facilement sa place sur un album de Bugz in the Attic. En onze chansons et deux interludes, Basement Jaxx signe un classique de la musique électronique des années 2000. Rooty est un disque généreux et fédérateur, et le duo s’éloigne ici des impératifs de la piste de dance pour proposer une musique pop contemporaine, étincelante et joyeuse.