A chacun ses gestes barrières. A défaut de pouvoir se barricader dans une suite du Normandy ou du Majestic, lieux emblématiques de l’enseigne fondée par feu Lucien B., ou de se lever et de se casser en toute impunité, on s’oblige à redorer le blason du chez soi, à polir l’harmonie du foyer, sis pour le coup aux confins de la Brie, dans cette zone floue entre banlieue et campagne – deux entités aptes à entrer en collision, au moins autant que les atomes de la famille nucléaire désormais assignée à résidence.
Parmi les gestes qui sauvent, reclus dans le bunker-bureau, celui de fouiller sans gants ni méthode dans les boîtes de 45 tours, et d’en extirper quelques vestiges oubliés. Ainsi ce (Excerpts from) The Suburbia Suite de The Sound Barrier qui tente de se rappeler à notre bon souvenir embrumé.
L’aurait-on posé sur la platine en ces dernières heures du premier jour de confinement si au moins deux mots n’avaient fait écho à la situation ? Probablement, tant se replonger dans les arcanes de The Compact Organization, label ligne claire (ou plutôt « atome » à nouveau, le graphisme le disputant ici à la musique), cousin british des belges Disques du Crépuscule, agit contre la morosité ambiante. The Compact Organization, ce fut avant tout Virna Lindt (Attention Stockholm, cri d’alerte qui pourrait bien retentir à nouveau) et Mari Wilson, ces chères têtes blondes, mais également Tot Taylor, ressuscité ces derniers mois par la grâce de l’exquis Featurette (et que Bertrand Burgalat soit remercié de nous avoir mis sur la voie de cette merveille). Tot Taylor, qui sous l’alias Teddy Johns, érige en octobre 1980 cette pacifique barrière sonore, alliage de space age pop et de jazz feutré. De quoi s’accommoder d’un calfeutrage en suburbia et d’attendre sereinement la suite – qui devrait intervenir sous forme d’un journal de quarantaine quotidien en 45RPM.
Merci pour ce rendez-vous qui va nous sortir de chez nous !
envoyez moi une notification dès qu’il y a un nouvel article. merci