« … la voix pourrait être l’équivalent de ce que la personne a de plus caché et de plus vrai. »
Italo Calvino, Sous le soleil jaguar
La direction prise par la voix de Rémy Poncet alias Chevalrex sort de l’ordinaire et convoque par la lente pulsation, la prosodie fine et la poésie du quotidien des Etienne Daho, Dominique A ou Bertrand Burgalat. Avec une mélodie estompée par une succession de noires, Rémy Poncet affirme d’une voix douce une mélodie solitaire et intimiste non résolue…
C’est son texte scandé qui invite à une écoute plus fine, éveille l’oreille poétique. L’écoute, toujours est première, babil d’un nouveau-né, voix de l’amoureux, parole fragile de l’ami. La rencontre avec la voix, le son de l’autre, est toujours une première fois. L’écho des émotions vient arpenter en nous des territoires non explorés. Écouter c’est aussi mieux se connaitre, c’est aller à la rencontre de ce qui n’a pas encore été réveillé, agité au plus profond de nos muscles, de notre ingénieux système de chair et de vibrations qui éveille le mouvement du corps et de l’âme.
La mécanique de la perception, comme la mécanique des concises chansons de Chevalrex, devient la matrice de notre potentiel créateur, patrimoine immatériel. On se lasse si vite de sa propre petite musique intérieure. La découverte de la voix et du corps de la musique fait son œuvre en filigrane, de la même manière, la pratique de la voix crée ce genre de sensation intérieure parmi beaucoup d’autres bien sûr, et quel cadeau ! L’importance d’écouter mais aussi de s’ancrer permet ne pas se faire embarquer ou ensevelir sous les voix des autres, plus hautes, plus graves, plus athlétiques… Tenir sa note recto tono tout en écoutant celles d’autrui afin de créer un bel unisson, sans les couvrir, ni disparaître, est un exercice d’autant plus complexe qu’il nécessite à la fois force et détermination, mais aussi lâcher prise et confiance en soi, en l’autre. Pari réussi de Chevalrex.
Plus je donne de la voix, plus j’écoute ma petite linguistique intérieure, Là d’où je parle, plus j’augmente ma permission d’entendre, de percevoir et de comprendre les subtilités des pulsations, des harmonies, de l’ampleur et de l’intensité dans toutes leurs nuances, plus je gagne en compétence, en pertinence et en finesse. Plus j’affine ma propre voix pour exprimer pleinement à travers elle ses connaissances, ses compétences et son humanité, plus je découvre mes émotions, mes tensions musculaires, cris, larmes ou colère.
Le son est une proximité ; il n’est pas poli, il traverse tout.