Il y a 22 ans, nous avions eu l’idée de réunir pour la RPM Françoise Hardy et Perry Blake. Parce qu’elle avait déclaré sa flamme aux chansons de l’Irlandais – parce que Françoise Hardy était aussi comme ça, à l’affut des nouveautés, une attitude qui lui avait fait avouer sa passion pour The Jesus And Mary Chain ou l’avait conduite à chanter avec Blur – mais c’était aussi parce que Damon Albarn ressemblait comme presque deux gouttes d’eau à “Jacques jeune”. Sans doute aussi parce que c’était notre façon de pouvoir croiser le chemin de cette “Discrète”, auteure d’un de nos disques de chevet, La Question – mais aujourd’hui, je me demande si je lui avais avoué ça. Un peu plus d’une semaine après le départ définitif de Françoise Hardy, on a remis la main sur cette interview croisée réalisée il me semble dans le studio photo de Philippe Lévy – un compagnon de nombre d’aventures de ces années-là –, qui avait immortalisé la rencontre. Dans l’élégance d’un noir et blanc éternel. Révélé il y a déjà quatre ans sur la foi d’un premier album alangui, l’Irlandais Perry Blake a vite trouvé dans la France une terre d’accueil et une nouvelle patrie. Mais comment aurait-il pu en être autrement puisque ce pays a toujours eu un faible avoué pour les voix de velours, les atmosphères romantiques et les histoires d’amours déchues. Autant d’éléments familiers que l’on retrouvait sur un deuxième chapitre attachant, Still Life, mais qui laissait pourtant un petit goût d’inachevé, car trop proche dans ses propos et sa douceur de son glorieux prédécesseur. Après un surprenant enregistrement live et une mini-BO pour le film du réalisateur français Sébastien Lifshitz, Presque Rien, l’homme était conscient qu’il lui fallait, à tout prix, ne pas tomber dans le piège du bégayement. Écueil qu’il a évité avec un brio déconcertant sur California, un disque d’une rare beauté, qui doit autant à la sensualité soul de Marvin Gaye qu’à la sobriété acoustique de Leonard Cohen. À Paris, Perry Blake, confiant et détendu, a retrouvé l’une de ses fans – et de ses collaboratrices, le temps du morceau War In France, présent sur Still Life –, Françoise Hardy, le temps d’une discussion où il fut question, pêle-mêle, de Frank Sinatra, Stanley Kubrick, d’astrologie et du temps qui passe.
L’homme a déboulé un jour dans notre quotidien sans crier gare. Et sans faire (trop) de bruit. C’était il y a cinq ans. Déjà. Physique chétif, voix de ténor et chansons fragiles : l’équilibre ne tenait forcément qu’à un fil et il n’en était bien sûr que plus étourdissant. D’un vulgaire revers d’une main baguée, Perry Blake écartait de son chemin le triste sire Jay-Jay Johansson et venait rejoindre une jolie lignée de têtes déjà couronnées. Scott Walker – la voix – et Kate Bush – la grâce – auraient d’ailleurs pu être les géniteurs de ce drôle de garçon. Mais, l’histoire, jusque là trop belle, ne pouvait se poursuivre sans anicroche, ni rebondissement. Comme il est de mise dans une industrie dont on se dit un peu plus chaque jour qu’elle pourrait finalement aussi bien vendre des yoghourts ou des paquets de lessive – ce qui d’ailleurs n’a rien déshonorant –, le frêle jeune homme se voyait, quelques mois après la sortie de ce premier album adoubé, remercié par son label d’alors, Polydor. Car, s’il avait su conquérir sur le Vieux Continent un public qui avait rapidement pris goût à sa pop délicate et aimait déjà à se lover dans ses compositions élégantes et racées, l’artiste Blake n’existait pour ainsi pas sur l’échiquier impitoyable de la scène musicale britannique. Mais d’être ainsi touché par le même syndrome qui avait irrémédiablement condamné à l’exil artistique des fleurons comme Moose, l’Irlandais s’en fichait.
Incunable nostalgique, passionné tant de cinéma que de musique – sans même parler de littérature –, il était tout heureux qu’une structure française, l’indépendante Naïve, saute sur cette belle occasion pour lui permettre de continuer à livrer ses mélodies intimistes. Ce qu’il s’est empressé de faire en enregistrant Still Life, frère jumeau – siamois ? – de son premier album, avec, comme seule variante, une approche un poil plus dénudée. Mais le principal intéressé en était à l’époque déjà conscient et ne cherche pas, aujourd’hui, à noyer le poisson. “Sincèrement, je crois que les deux premiers disques appartenaient à un même cycle. Ils sont presque indissociables, ils forment un tout, même si Still Life avait un visage plus organique”. Un aspect qui permettra à Perry Blake de se dévoiler plus à l’aise sur scène, tant et si bien que certains considéraient – sans doute jusqu’au moment l’instant où California déboulera sur leur platine – l’album live consécutif, Broken Statues, comme la plus belle réussite du chanteur à ce jour. “C’est vrai que beaucoup de gens me l’ont dit ! Et ces réactions m’ont vraiment surprises, d’autant plus que je trouve à ce concert plein de défauts… Mais ça, c’est un peu récurrent dans les jugements que je porte sur mes disques. L’idée initiale était d’enregistrer plusieurs prestations en Europe et de choisir les meilleures versions. Mais le projet a vite avorté car les dates étaient trop chères à produire, à cause de l’orchestre à cordes qui m’accompagnait. Alors, on a juste enregistré la prestation de Bruxelles et malgré ses imperfections, on l’a sortie. Encore une fois, je ne saurais pas t’expliquer pourquoi ce live a tant plu. Il doit y avoir une atmosphère particulière qui a séduit le public”.
Des atmosphères, Perry Blake n’a pas son pareil pour en créer, en imaginer, en suggérer. C’est d’ailleurs là – en sus d’un talent mélodique désarmant – que réside l’une de ses principales forces. Mais il était tout de même conscient à l’heure d’entrer en studio pour enregistrer son troisième album qu’il ne pouvait pas – ou plutôt qu’il ne devait pas – se contenter de compter sur ses seuls atouts. Qu’il lui fallait essayer de passer à autre chose. “Je savais qu’il fallait que je fasse, comment dire… Que je fasse attention pour ce nouveau disque. J’adore un groupe comme Tindersticks, qui n’a jamais enregistré une mauvaise chanson. Mais d’un autre côté, il ne m’a jamais surpris. Quelque part, cela peut-être une situation très confortable. Mais je ne veux pas de ce confort, je veux me mettre en danger, sans pour autant dénaturer mes aspirations”. Et c’est exactement ce que Perry Blake a réussi avec California, un disque où ce Petit Prince pop – épaulé par pléthore de musiciens et un producteur étonnant, un Italien nommé Marco Sabiu – a parfaitement réussi ce tour de passe-passe qu’est le changement dans la continuité. Ambiances romanesques et cordes sensibles sont toujours au rendez-vous et flattent les sens de l’auditeur en quête de repères. Mais Perry Blake y a ajouté une dimension soul, une sensualité plus moite. Il a aussi modifié sa façon de chanter, se risquant plus que de coutume à décrocher des notes hautes, qui permettent à ses compositions d’aller tutoyer les étoiles d’un peu plus près. Le morceau d’ouverture, This Life, en est l’exemple parfait. “Lorsque j’ai écrit ce disque, j’écoutais beaucoup de soul, des trucs de Tamla Motown. Et en particulier l’album de Marvin Gaye, What’s Going On. J’ai eu envie d’explorer cette direction, de rajouter une dimension plus sexy, plus féline à ma musique. C’est marrant, parce que les premières personnes qui ont écouté l’album le trouve plus léger, plus joyeux pour ainsi dire. Alors que moi, je le trouve sans doute presque plus ‘noir’ que Still Life, car il existe un contraste plus marqué entre le sujet que j’aborde et les arrangements. California raconte une histoire, celle de l’éternel rêve américain. C’est un couple qui part là-bas et va être confronté à une réalité forcément différente de ce qu’il imaginait. Mais tout est complètement imaginaire car je n’ai moi-même jamais mis les pieds sur la côte Ouest, je ne connais que l’Est des États-Unis”.
Que sa vision d’Hollywood et de ses alentours soit romancée ou non importe peu. Car l’une des autres forces de Perry se trouve justement dans son talent à raconter des histoires. Dans ses chansons, seulement : l’homme n’est pas du genre mythomane. Mais plutôt rêveur. Un rêveur qui essaye toujours de réaliser ses espoirs, même les plus fous. Lors d’une première rencontre, quelques semaines avant la sortie de son premier album, il confiait ainsi celui de pouvoir un jour “travailler avec Françoise Hardy”. Un souhait qui deviendra réalité quelque deux années plus tard, lorsque l’égérie française viendra assurer les chœurs – “J’avais toujours rêvé d’être choriste, mais je n’en avais eu jamais eu l’occasion”, avoue la principale intéressée – sur le morceau War In France. “Dès que j’ai composé ce titre, je me suis dit que sa voix pourrait apporter quelque chose. Et je ne crois pas m’être trompé. Bien sûr, j’aurais bien voulu que la collaboration aille un peu plus loin. Mais, surtout, j’étais très confiant dans le potentiel de cette chanson, j’étais persuadé que ce serait un tube, que les radios la diffuseraient en boucle… Ça n’a pas vraiment été le cas, et je ne me l’explique toujours pas”. Mais qu’importe… Car, si, entre ses deux artistes, il existait déjà une admiration réciproque, il est né de cette rencontre un début de complicité. Comme en témoigne le déroulement d’une session photo où ils ne cessent de discuter – musique, cinéma, comment pourrait-il en être autrement –, de s’esclaffer. Ils conversent ainsi, à bâtons rompus, et se trouvent, à chaque fois, un peu plus de points de communs. Morceaux choisis.
Perry Blake : J’ai beaucoup voyagé pour enregistrer California. Outre la Thaïlande, je suis aussi allé en Belgique, en Italie. D’ailleurs, comme je n’aime pas trop prendre l’avion, j’ai préféré faire toute cette route en voiture… Françoise Hardy : Je ne suis pas non plus une adepte des voyages, j’aime trop mon confort. C’est amusant parce que dans les milieux artistiques, j’ai l’impression que beaucoup de gens détestent prendre l’avion. J’ai appris que Stanley Kubrick, par exemple, était très superstitieux, il emportait toujours plein de gris-gris avec lui, pour conjurer le… mauvais sort. Je sais qu’il avait horreur du chiffre “11”. D’ailleurs, il ne prenait jamais de vol à onze heures du matin ou dont le numéro comprenait ce chiffre ! Je suppose que s’il avait vécu les événements de septembre dernier, sa phobie ne se serait pas arrangée…
Perry Blake : Je suis un peu comme cela, moi aussi ! À chaque fois, j’essaye d’obtenir le même siège, tout au fond de l’appareil.
Vous vous souvenez de votre première rencontre ?
Françoise Hardy : J’avais adoré le premier album de Perry à sa sortie, et encore aujourd’hui, je trouve que c’est un très beau disque. J’étais donc allée le voir en Black Session, à la Maison de la Radio. C’est un ami qui avait réussi à me convaincre. Vu mon âge, je ne sors plus beaucoup… Je fais surtout attention aux endroits où je vais. Je n’aime pas aller dans les salles où l’on est obligé de se tordre le cou pour apercevoir quelque chose. Après le concert, qui m’avait beaucoup plu, nous nous sommes vu backstage…
Perry Blake : Je m’en souviens très bien, car ce devait être le jour ou le lendemain de la mort de Frank Sinatra (ndlr. l’ami Perry n’a pas si bonne mémoire que cela car le chanteur du Rat Pack s’est en fait éteint le 15 mai 1998 alors que la première prestation de l’Irlandais sur les ondes de France Inter s’est déroulée le 21 avril). Cela m’avait beaucoup touché, j’adorais sa voix.
Fraçoise Hardy : Ah, mais pour moi, il était mort depuis bien longtemps !
Perry Blake : Sans doute, mais maintenant, on doit supporter des disques comme celui de Robbie Williams, qui est parvenu à berner pas mal de monde… Si lui est un crooner, moi, je suis… En fait, dans la presse, on m’a souvent accolé cette étiquette et elle m’a toujours mis mal à l’aise, car je n’ai jamais eu cette prétention. Peut-être que je m’en rapproche un peu plus avec California, surtout parce que je chante plus en falsetto que sur mes précédents disques, mais bon, j’ai encore du chemin à parcourir.
Françoise Hardy : Je n’ai pas encore eu le temps d’entrer dans ce disque. Je n’ai pu l’écouter qu’une seule fois, et je suis incapable d’avoir une opinion aussi vite, il me faut du temps pour pouvoir savoir si j’aime un album ou non. Mais c’est vrai qu’à la première impression, je crois que je préférais les deux premiers… Ce qui serait d’ailleurs bon signe pour Perry car tous les gens qui me connaissent savent que dès que je n’aime pas un album, tu peux être sûr qu’il va avoir du succès !
Et entre le premier album et Still Life, vous avez une préférence ?
Françoise Hardy : Non, ils sont tous les deux magnifiques. Sur l’édition française du premier, il y avait un titre bonus, intitulé Killing Time je crois, que je trouve vraiment très beau. C’est sans doute ma chanson préférée de Perry.
Perry Blake : J’ai réécouté ces deux disques très récemment. Mais je suis incapable d’avoir une vision objective, les seules choses que je puisse remarquer, ce sont leurs défauts. Et il y en a vraiment beaucoup !
Françoise Hardy : Peut-être, mais tu es vraiment le seul à pouvoir les entendre. Perry Blake : Parfois, je réécoute un morceau et je me dis que je lui rendrais plus justice aujourd’hui. Mais d’un autre côté, je n’ai aucune envie d’y retoucher car je suis certain que j’arriverais juste à en donner une version différente, et pas forcément meilleure en fait.
Françoise Hardy : Je suis tout à fait d’accord ! À un moment, mon label a suggéré que je choisisse plusieurs titres que j’avais réalisés dans le passé et que je les réenregistre. Mais outre les problèmes qu’aurait pu poser le fait que ma voix a évolué, je n’en voyais pas vraiment l’intérêt…
Perry Blake : Pour moi, une chanson capture l’essence d’un moment bien précis… Même si un enregistrement n’est pas techniquement parfait, il se peut qu’il retranscrive certaines émotions que tu ne pourras jamais retrouver quelques années plus tard
Quel effet cela te fait d’être devenu, depuis ton deuxième album, un artiste “français” en quelque sorte ?
Perry Blake : J’éprouve une certaine fierté, en fait. Cela fait longtemps que je m’intéresse à votre culture. J’adore votre cinéma, que ce soit les vieux films des années 1960 ou même des longs métrages plus récents, des productions plus commerciales, comme Jean De Florette. Il existe une sensibilité, un sens de l’esthétisme dont je me suis très vite senti proche. Et musicalement, j’ai aussi eu la chance de découvrir très vite des gens comme Serge Gainsbourg, Jacques Brel et Françoise, bien sûr.
Mais tu n’avais pas que des références françaises tout de même ?
Perry Blake : Non, bien sûr. Adolescent, je vouais une passion à Leonard Cohen, un artiste que j’aime toujours beaucoup. Il a toujours été un modèle pour moi, pas forcément d’un point de vue strictement musical, mais ne serait-ce que dans la façon dont il a su mener sa carrière. L’idée que je peux avoir du succès correspond un peu à celui qu’il peut avoir.
Françoise Hardy : Leonard Cohen ? Pour moi, il a toujours eu cette image de croque-mort, il m’a toujours fait peur ! Il y a très longtemps, j’ai repris Suzanne pour un single, en version française et anglaise.
Perry Blake : Ah bon ?! Je ne le savais même pas ! Je serais bien curieux d’entendre ça.
Si vous aviez à choisir, quel morceau aimeriez-vous reprendre l’un de l’autre ? Françoise Hardy : Je ne m’y risquerais pas, je trouve les chansons de Perry trop parfaites pour oser y toucher.
Perry Blake : Je crois que je choisirais un titre de cet album du début des années 1970, La Question. J’adore ce disque…
Françoise Hardy : C’est l’un de mes préférés également. Quel morceau reprendrais-tu ?
Perry Blake : (Il hésite.) Peut-être la deuxième chanson du disque (ndlr. il s’agit du morceau qui donne son titre à l’album). Ou bien alors… Mince, comment s’appelle-t-il ? C’est un titre très doux, sur lequel tu murmures presque.
Françoise Hardy : (Elle chantonne une intro et Perry Blake acquiesce.) Il s’agit du morceau Le Martien, qui est très beau. Je peux me permettre de le dire car je n’en suis ni l’autrice, ni la compositrice !
Comment choisissez-vous vos collaborateurs ?
Françoise Hardy : Oh, c’est vraiment en fonction de mes envies. Mais surtout, dans une collaboration, il faut avant tout que les deux parties y trouvent leur compte, j’ai toujours suivi cette ligne directrice. Il faut qu’il existe une véritable interaction, une envie partagée. Pour en revenir à La Question, la guitariste brésilienne avec laquelle j’ai enregistré, Tuca, n’était pas du tout connue et le fait de travailler avec moi pouvait lui donner un coup de pouce. De mon côté, j’avais cette chance de pouvoir interpréter de superbes compositions… Et aujourd’hui, lorsque je travaille avec quelqu’un comme Rodolphe Burger, je crois que ça lui permet de toucher un autre public que celui de son groupe, Kat Onoma.
Perry, il y a des gens avec lesquels tu aimerais collaborer plus particulièrement ?
Perry Blake : À brûle pourpoint, je n’ai pas de noms qui me viennent à l’esprit. Je suis très content de la façon dont nous travaillons avec Marco, j’aime beaucoup ce qu’il a fait sur California. Et puis, c’est un sacré personnage ! Sinon, Graham Murphy, qui est à mes côtés depuis le premier album, est toujours là et nous nous entendons vraiment très bien, nous nous comprenons à la perfection.
Françoise Hardy : Peut-être que tu devrais faire quelque chose avec quelqu’un comme Gabriel Yared ! Tu sais, il habite à Londres en ce moment.
Perry Blake : Ce serait une bonne idée, j’adore ce qu’il fait.
Françoise Hardy : Il y a quelque temps, il m’a appelé pour que nous nous voyions et m’a proposé que nous fassions de nouveau quelque chose ensemble. Malheureusement, pour des questions d’emploi du temps et parce que je travaille sur un projet qui me prend beaucoup d’énergie, cela n’a pu se concrétiser. J’ai été très flattée qu’il ait l’envie de retravailler avec moi aujourd’hui, après l’avoir déjà fait dans les années 1970. Mais bon, de toute façon, je ne suis pas sure que j’enregistrerais un autre album… Ça demande tellement d’énergie. En tout cas, l’autre jour, je me suis dit que si ça arrivait, je ferais bien un disque avec des guitares planantes…D’ailleurs, je venais de recevoir un mail de Rodolphe Burger et je lui ai soumis l’idée. Il m’a répondu immédiatement : “Je suis ton homme”.
Vous parliez d’un projet très accaparant, de quoi s’agit-il ?
Françoise Hardy : Oh, c’est un livre sur l’astrologie moderne, qui est encore très méconnue. Et ça demande vraiment un énorme travail car plus j’avance, moins j’ai l’impression de maîtriser le sujet.
Je suppose que vous connaissez le signe de Perry.
Françoise Hardy : Oh oui, il est Taureau. Tous les gens qui m’entourent sont Taureau, je suis poursuivie ! Ma mère, mon mari, mon meilleur ami…
Quels sont ces défauts dans cas ?
Françoise Hardy : Il doit être un peu borné par moments !
Perry Blake : Dans le travail, c’est vrai que je peux être très tatillon, qu’il m’arrive de ne pas démordre d’une idée, d’être sûr d’avoir raison, ce qui ne doit pas être toujours facile pour mes collaborateurs.
Françoise Hardy : Pour mon ouvrage, j’ai lu une énorme biographie de Kubrick, qui lui est Lion, et j’ai appris des choses incroyables. Il était tellement perfectionniste qu’il en devenait presque maniaque. Pour Barry Lyndon, il a demandé au chef d’orchestre de rejouer un thème car il y avait un huitième de temps de décalage entre l’image et la musique ! Le musicien n’a eu qu’une seule envie alors, c’est de frapper Kubrick avec sa baguette…
Perry Blake : Mais c’est grâce à ce perfectionnisme que ces films étaient aussi forts ! Il y avait aussi un sens de l’humour très particulier dans la plupart de ses productions, un humour noir que j’aime beaucoup. Sans bien sûr vouloir me comparer à lui et toute proportion gardée, j’ai un peu envisagé California comme The Shining. Dans le sens où il avait tourné Barry Lyndon avant, une production archi coûteuse qui fut un flop commercial, et que Shining se devait de marcher auprès du public, sans qu’il ne trahisse sa ligne artistique. Et il a réalisé l’un de ses meilleurs long métrages et l’un de ses plus gros succès… Pour ce nouvel album, je voulais vraiment ne rien avoir à regretter, j’ai même payé quelques jours de studio de ma poche pour pouvoir remixer trois morceaux dont je n’étais pas entièrement satisfait.
Et le fait d’avoir composé des chansons pour la BO du film de Sébastien Lifshitz, Presque Rien, a-t-il modifié ta façon de travailler ?
Perry Blake : Non, pas du tout. Mais ce fut une expérience un peu frustrante car on a dû écarter beaucoup de chansons au dernier moment, pour ne pas dénaturer les images du film. J’aime beaucoup Sébastien, nous sommes devenus ami. C’est quelqu’un de sincère et de très franc. Je me souviens qu’il était venu me voir en concert à Bruxelles et après, nous nous étions retrouvés dans les loges. Et devant tous les musiciens, il n’a pas arrêté de critiquer ! “Toi, tu as très bien chanté, mais le guitariste jouait trop fort, le batteur n’était pas en rythme, etc.” Les autres musiciens attendaient certainement que je les défende, mais je n’osais trop rien dire car j’avais pris quinze jours de retard sur la BO… Alors, je me suis fait tout petit et j’ai attendu qu’il s’arrête !
Tu es passionné par le cinéma, c’est un milieu qui t’attire ?
Perry Blake : Je travaille sur deux scénarii, en fait, dont l’un est presque terminé. Mais je ne sais pas encore ce que je vais en faire, je n’ai pas de plans très définis.
Et sinon, il y a des disques récents qui vous ont séduits ?
Françoise Hardy : J’ai beaucoup aimé l’album de Benjamin Biolay, il écrit de très belles chansons et je suis contente qu’il ait reçu une distinction aux Victoires de la Musique car il la méritait amplement. Mais d’une manière générale, j’ai l’impression que l’on traverse une époque calamiteuse… L’autre jour, en zappant, je suis tombé à la télé sur l’émission Top of The Pops. Et j’ai décidé de la regarder un peu, persuadée que j’allais pouvoir entendre des choses un peu meilleures de ce qui se fait en France actuellement, mais c’était aussi nul, effrayant… Et pourtant, j’ai toujours pensé, et je le pense encore, que les Britanniques sont vraiment les meilleurs en matière de musique pop…
Perry Blake : J’ai adoré Goldfrapp, mais le disque date un peu. Les arrangements sont vraiment superbes, j’en suis presque jaloux. J’aimerais bien faire quelque chose avec la chanteuse, Alison. Non, pas artistiquement, plutôt sexuellement ! Sinon, le dernier album qui m’a vraiment impressionné, c’est celui de Ian Brown, Music Of The Spheres, une sorte de mélange de rock progressif et de musique électronique. Il est vraiment très bon, alors que je n’aimais pas du tout ses deux premiers disques. C’est marrant, parce que le jour où j’ai signé mon contrat avec Polydor, le label organisait une fête pour la sortie de son premier album solo. J’y suis allé à reculons pour ne pas vexer mes… nouveaux “employeurs” d’alors. Et une fois là bas, j’ai piqué deux bouteilles de champagne, suis ressorti aussitôt et ai demandé à la Limousine qui était destinée à Ian Brown de me raccompagner chez moi.
Très intéressant ! C’est un beau souvenir ☆ merci pour ce partage ♡
Les photos sont très chouettes.
Incurable mélancolie
Très intéressant ! Superbes photos !
Incurable mélancolie et immense tristesse !
Joli souvenir ☆☆☆☆