Il existe une lignée de guitariste improvisteur.ice dont la confrontation avec l’ instrument renvoie à quelque chose de l’ordre de la corporéité : Fred Frith, Glenn Branca, ou encore David Grubbs. Assurément, Nina Garcia appartient à cette filiation. Depuis une dizaine d’années avec Mariachi, son projet le plus emblématique, mais aussi avec Maria Bertel ou Arnaud Rivière (Autoreverse), elle explore les limites de l’instrument iconique des esthétiques électriques : la guitare, appréhendée avec un radicalisme qui la rattache au minimalisme noise − pour aboutir à une sorte de post-no wave fondamentalement mutante.

Avec Bye Bye Bird, projet pensé avec Stephen O’Malley pour son label Ideologic Organ, Nina Garcia, sous son propre nom pour ce disque, explore une zone en apparence plus apaisée. Comme sur Ballade des souffles ou Aubé, on se surprend à repérer une ébauche de mélodie, de progressions en arpèges, voire une quiétude digne des propositions ambients. Mais pour retrouver avec Le Leurre ou Pick-up tentative ce qui constitue le cœur du travail de Nina Garcia : improvisation bruitiste et travail sur les textures analogiques. Le dispositif est ici fondamentalement réductionniste : une guitare débranchée, un ampli et un micro électro-magnétique. Pour souligner la centralité du geste et du rapport physique à l’instrument : la grandeur de Bye Bye Bird réside dans la captation du son performé, avec une matérialité qui est celle de l’expérimentation live. On pense immédiatement à certains grands disques parus récemment : 1991, Summer, Huntington Garage Fire de Leila Bordreuil ou Spectral Evolution de Rafael Toral. Des disques qui incarnent chacun à leur manière la vitalité d’une scène s’attachant à dépasser l’abstraction numérique d’une Computer Music longtemps dominante dans le champ des musiques expérimentales. Et c’est précisément cette dimension qui impose le travail de Nina Garcia comme décisif, et qui dessine un territoire particulièrement fascinant.