De Julien Thomas, nous ne savons guère de choses. Peut-être vit-il en Normandie, comme le suggère le titre de son album, Le Long De La Charentonne, une rivière de la région, affluente de la Risle.
Publié dans le grand Ouest (Rennes/Angers), par la maison iconoclaste Troglodisques, la cassette développe deux plages instrumentales, entre quinze et dix-sept minutes, chacune. Cette longueur, si généreuse, interpelle à l’écoute des deux parties du Long De La Charentonne, mais elle apparaît pourtant propice à l’épanouissement des idées du mystérieux Julien Thomas. Les mélodies semblent, en effet, se superposer, apparaître et disparaître au gré des mouvements d’eau animant un fleuve. L’ensemble séduit par sa subtile douceur : il esquisse de bucoliques perspectives de campagne, aux tons feutrés. Un Field Recording répond à un Mellotron, une guitare converse aimablement avec des arpèges de synthétiseurs. De longues notes tapissent l’espace, l’irradiant d’une lumière diaphane, tamisée par un ciel bleu d’hiver. Le Long de la Charentonne exalte la langueur et les divagations. Plus que la scène électronique française des années soixante-dix (Heldon, Zed, Zanov), l’album évoque ainsi les pérégrinations germaniques de Popol Vuh, Tangerine Dream ou Manuel Göttsching. Julien Thomas, loin d’imiter ces glorieux aînés, en assure une belle descendance, y ajoutant un peu de la rosée d’une matinée, à travers un disque élégant et intemporel, conçu comme un enivrant voyage au centre des bocages.