Quand une remise en cause existentielle tourne à la guerre civile, cela donne Straight To The Top!, le premier morceau du deuxième album solo de l’ami texan Josh T. Pearson. Comme si Jonathan Richman s’était réveillé un matin, poursuivi par le fantôme menaçant de Nick Cave, celui de Grinderman singeant les barbelés de sa jeunesse bruyante lors d’une fête d’anniversaire.
Alors que Last Of The Country Gentlemen (2011) évoquait avec une profondeur de champ parfaitement dépressive les hautes plaines de solitude desquelles notre bon dude avait du s’extirper suite à un mariage désastreux, The Straight Hits! tient de l’exercice de style, marquant un retour au pays des vivants.
Et il ne s’interdit rien, le bougre. Straight At Me convoque à la fois les Go-Betweens et T. Rex, alors que Give It to Me Straight donne dans un songwriting lyrique et digne, pas loin d’un Robert Forster fanfaron. Et pour bien montrer qu’on n’est pas là pour faire juste une œuvre d’art, il se permet de saloper le tout avec de fallacieux chœurs de tribunes. Mis à part Katerine, on a rarement vu un artiste faire autant de doigts à sa réputation précieuse. Le tout en trois morceaux relativement exaltants.
La transition vers un versant moins fantaisiste se fait avec beaucoup de jugeote sur le très polisson Straight Laced Come Undone, où le babil du fils de pasteur comptant fleurette à son élue, tel un Willie Nelson bourré au béguinage, ferait plus éclater de rire que pleurer. C’est avec Damn Straight, ballade country presque traditionnelle, que la deuxième partie de l’album commence, préparant le terrain au morceau central, un Loved Straight To Hell où Josh met toute sa science lacrymale à ressusciter le génie de Lift To Experience, toutes guitares brûlantes dehors, le cœur au bord des lèvres, le génie total en action. C’est du niveau de The Good Son du précité Nick Cave, la pyrotechnie sonique en plus.
Pour éteindre cet enfer soyeux qui aurait tendance à faire de l’ombre au reste, The Dire Straights Of Love tape dans la comptine au coin du feu. Mais même s’il reçoit façon saloon, on sent bien qu’il vient de pleuvoir. Whiskey Straight Love démontre également le grand talent de conteur de Pearson, même pour les choses de l’amour (You’re the best thing I ever did wrong with my life), préparant le terrain pour l’autre grand morceau du disque. A Love Song (Set Me Straight) comme un voile tiré sur le passé, où Nick Cave (encore) et Tim Buckley jetteraient un sort classieux à Lift To Experience, avec un niveau d’emphase toujours conservé dans des limites convenables malgré la bruine de cordes.
Toute la grandeur d’un pays en ruine(s), dans cet album soi-disant composé rapidement avec un cahier des charges comprenant, vous l’aurez peut être maintenant compris, la nécessité de caser le mot Straight dans chaque intitulé de chansons. Ce merveilleux salopard en aurait, on le tient de source sure, jeté deux wagons avant de s’y atteler vraiment. On ne peut qu’espérer qu’il les ressorte un jour, et pas dans sept ans.