Sandro Perri, In Another Life (Constellation Records)

Sandro Perri In Another LifeVieux routier de la scène montréalaise, Sandro Perri a pratiqué en début de carrière une électro-acoustique ambient ascétique un rien austère au travers de son projet Polmo Polpo avant de revenir, sous son propre nom sur le célèbre label Constellation vers un format pop/folk plus conventionnel. Depuis, d’album en album, le natif de Toronto fait évoluer subtilement sa musique vers une forme d’épure de plus en plus captivante et personnelle. Si Impossible Spaces (2011), son dernier Lp en date, avait impressionné par sa maîtrise des genres, entre folk minimaliste, soul blanche, disco sous anxiolytiques et bossanova contemplative, In Another Life le voit radicaliser son propos tout en restant accessible. Preuve en est la pièce maîtresse qui donne également son titre au disque, une longue mélopée pointilliste de 24 minutes à la mélodie délicate et délicieuse qui, les minutes passant, se transforme en mantra tournoyant absolument envoûtant. On songe ainsi au vétéran no-wave Arto Lindsay et à cette aptitude à faire d’une électro-acoustique de haute volée une pièce pop pourtant facilement abordable mais aussi au désormais mythique Arthur Russell, au sujet duquel Sandro Perri n’a cessé ces dernières années de crier son admiration. De fait, on retrouve bien chez le canadien cette même propension à étirer le temps, ces mêmes ambiances cotonneuses, cette même capacité à répéter une mélodie jusqu’à l’envoûtement. La deuxième face du disque, puisque l’on ne peut imaginer qu’il ait été pensé autrement, est certes conceptuelle mais complétement ludique. Une réinterprétation en trois actes d’une unique composition (Everybody’s Paris) par trois interprètes différents (Perri lui-même suivi d’André Ethier, ex-Deadly Snake, puis du grand Dan Bejar), chaque titre jouissant d’une instrumentation sensiblement différente. Un exercice de style dont on pouvait craindre la vacuité (et la vanité) mais qui se transforme en fascinant jeu de pistes pour qui voudra s’y laisser guider. Le final assuré par Dan Bejar, dont le flot déclamatoire si caractéristique vient flotter sur les arrangements ambient de Perri, évoquera au connaisseur la longue introduction de son génial Ep Bay Of Pigs (2009), un compliment.

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