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Faucheuse, démo (Oscuridad En Mi Vida)

« Et la nuit tombe, sans un bruit »

L’autre jour, je feuilletais un bouquin imprimé dans les années 1970 et je scotchais sur de très belles photos noir et blanc de jeunes gens de ces années-là, un peu des images d’illustration, je ne sais pas comment on appelle ça, mais avec une belle âme. On y voit des ados, les cheveux mi longs, Clarks aux pieds, avec des treillis mal foutus et des jeans à peu près pattes d’eph. Ils sont assis sur des mobylettes et se marrent. Ça m’a vachement touché,  pas de façon nostalgique, parce que je ne suis pas de cette génération, mais il y avait une sorte d’immédiateté, disons pour aller vite que je n’ai pas l’impression qu’ils avaient conscience d’être photographiés, il n’y avait pas de poses. Ils étaient juste là. En ajoutant un petit poignet à clous à l’affaire, c’est ce truc très électrique et direct que j’ai entendu dans la cassette de Faucheuse, un groupe bordelais qui envoie et qui concasse le punk, le métal et des trucs extrêmes dont je ne connais pas le nom, avec cette meuf (une certaine E.B.) qui chante à fond les ballons. Continuer la lecture de « Faucheuse, démo (Oscuridad En Mi Vida) »

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Lael Neale : « Je ne veux pas que l’on puisse dater mes chansons »

Lael Neale / Photo : Alain Bibal
Lael Neale / Photo : Alain Bibal

Après une période de remise en question artistique de presque six années, Lael Neale semble avoir trouvé la formule lui accordant une liberté musicale croissante avec pour éléments de base son Omnichord et un enregistreur cassette. Avec Star Eaters Delight, elle confirme son statut d’ovni musical. Moins dépouillé que le précédent, l’album dévoile une palette plus riche et plus agressive. Entre le passé et le présent, Lael Neal crée une atmosphère unique qui, bien qu’efficace sur disque, prend toute son ampleur sur scène grâce à une présence magnétique et des interprétations dont la puissance et la conviction bénéficient d’un son moins lo-fi. C’est d’ailleurs lors de son passage à La Boule Noire à Paris que Lael nous a accueilli dans sa loge. Loin d’être la personne timide que l’on pourrait imaginer, c’est une femme sûre d’elle, heureuse d’avoir enfin trouvé sa voie qui nous raconte en détail le chemin parcouru pour arriver à la reconnaissance critique et publique de son travail, mais aussi de ses envies pour le futur. Continuer la lecture de « Lael Neale : « Je ne veux pas que l’on puisse dater mes chansons » »

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Sinéad et moi

Elle refusait d’être filmée par des hommes. Sa directrice photo revient sur les tournages des premiers clips, avec des photos inédites.

Sinéad O'Connor sur le tournage du clip "3 Babies" par Dominique Le Rigoleur  / Photo : Seamas McSwiney
Sinéad O’Connor sur le tournage du clip « 3 Babies » par Dominique Le Rigoleur / Photo : Seamas McSwiney

Tout n’a pas été écrit sur I Do Not Want What I Haven’t Got, le deuxième album de Sinéad O’Connor. Produit par Nellee Hooper à Dublin, ce disque fut publié le 20 mars 1990 alors que le monde entier écoutait Violator de Depeche Mode sorti la veille. La machine de guerre conçue par Martin Gore n’éclipsa pas I Do Not Want What I Haven’t Got qui fut l’un des disques les plus vendus des années 90.
Enregistré avec Andy Rourke (The Smiths), Jah Wobble et Marco Pirroni (qui avait été embauché par Adam & The Ants pour Kings of the Wild Frontier), I Do Not Want What I Haven’t Got consacrait l’Irlandaise qui avait déjà marqué des points avec The Lion and the Cobra (1987). Tout n’a pas écrit sur I Do Not Want What I Haven’t Got. La photographie (ou plutôt le photogramme) utilisée par Chrysalis pour la pochette est signée, Dominique Le Rigoleur, une directrice de la photographie française. John Maybury, le réalisateur du clip, a recruté cette directrice de la photographie française car Sinéad O’Connor refuse d’être filmée par un homme. Ce premier clip sera un prélude pour Dominique Le Rigoleur. Continuer la lecture de « Sinéad et moi »

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Sweeping Promises : « Il y a toute une histoire alternative du post-punk dans laquelle nous aimerions nous inscrire »

Sweeping Promises
Sweeping Promises / Photo : Shawn Brackbill

Il est des groupes qui vous explosent au visage comme une précieuse révélation, vous rappelant pourquoi et comment tout a commencé dans votre cœur. Mi-2020, les Américains de Sweeping Promises sortent en pleine pandémie Hunger For A Way Out, une délicieuse claque dans le marasme ambiant, explosion cathartique de post-punk chauffé à blanc, enregistré avec un seul micro, mais mille idées plein la tête. Trois ans plus tard et malgré une signature chez Sub Pop, le groupe laisse tous ses curseurs dans le rouge avec Good Living Is Coming For You, un deuxième album plus fort, plus sombre, plus éclectique, mais qui garde tout de leur fantastique idiosyncrasie : une production monolithique qui sonne comme la plus glorieuse cassette audio jamais entendue, un songwriting punk acéré qui vient se diffracter sur des plans new wave pleins de groove, et la voix de Lira Mondal, pur tremblement de terre pop. Le tout en s’inspirant du seul post-punk qui compte, si rare aujourd’hui, celui des débuts, qui crisse et réinvente le monde avec une audace ingénue et inspirante, et dont Sweeping Promises sont de glorieux descendants. En échangeant avec Lira Mondal (basse et chant) et Caufield Schnug (guitare et batterie), c’est le portrait d’un duo inséparable qui se dessine, deux artistes s’inspirant mutuellement et ayant une vision commune et singulière de la musique qu’ils veulent créer, dans une indépendance indéboulonnable et inspirante. Continuer la lecture de « Sweeping Promises : « Il y a toute une histoire alternative du post-punk dans laquelle nous aimerions nous inscrire » »

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Liz Stokes (The Beths) : « J’adore jouer avec les mots »

The Beths / Photo : Frances Carter
The Beths / Photo : Frances Carter

En trois albums et à peine huit années d’existence, The Beths s’est imposé comme l’un des groupes pop les plus enthousiasmants des cinq dernières années. Solidement ancré dans une tradition power-pop, le mélange de mélodies immédiatement mémorables, de guitares accrocheuses et de textes personnels et intelligents composé par Liz Stokes et ses trois camarades semble en mesure de combler tous les fossés générationnels. De passage à Paris pour la seconde fois cette semaine, les Néo-Zélandais ont également confirmé leur excellence sur scène. Et Liz Stokes a même trouvé le temps de répondre à quelques questions. Continuer la lecture de « Liz Stokes (The Beths) : « J’adore jouer avec les mots » »

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Kate Stables (This Is The Kit) : « J’adore l’effet que le rythme a sur moi »

This Is The Kit / Photo : Cedric Oberlin
This Is The Kit / Photo : Cedric Oberlin

Depuis ses débuts, il y a déjà une quinzaine d’années, Kate Stables n’a eu de cesse d’explorer les confins d’une musique dans laquelle les trames folks originelles se mêlent désormais de rythmes complexes et variés, de colorations harmoniques inattendues et, souvent d’arrangements de cuivres sobres et pertinents. Careful Of Your Keepers, sixième album de la britannique – parisienne d’adoption – et de son groupe, prolonge et intensifie le sentiment de surprise et de ravissement déjà éprouvé à l’écoute des épisodes les plus récents. D’abord parce qu’on y relève au générique la présence inattendue de Gruff Rhys, dans un rôle de producteur attentif et discret, manifestement capable de magnifier un univers musical qui semblait assez distant du sien. Surtout parce que ces comptines poétiques et parfois biscornues laissent transparaître, au fil des écoutes, un sens admirable de la mesure et de l’équilibre entre une voix et des instruments qui dialoguent en contre-point, à la fois dans la proposition singulière et l’attention respectueuse aux détails et aux nuances. Continuer la lecture de « Kate Stables (This Is The Kit) : « J’adore l’effet que le rythme a sur moi » »

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Ivy – Appartement témoins

Ivy
Ivy / Photo : Philippe Garcia

C’est un album qui, un quart de siècle après sa sortie, reste davantage que beaucoup d’autres attachés à la fois au contexte dans lequel on l’a entendu pour la première fois et à la réalité qu’il évoque. Un album qui condense encore mieux que la plupart de ceux qu’on a pu découvrir et apprécié à même période un temps provisoirement suspendu. Ces quelques années qui s’écoulent, entre la fin de l’adolescence et le début du véritable âge adulte, un peu différemment des autres : parfois plus vite, parfois plus lentement, au rythme des derniers flux et reflux de l’insouciance. Continuer la lecture de « Ivy – Appartement témoins »

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Ulrika Spacek : « Les bons groupes à guitare se font rares »

Ulrika Spacek
Ulrika Spacek / Photo : Alain Bibal

Sans avoir durablement marqué les esprits, Ulrika Spacek a sorti deux bons albums de pop DIY avant de disparaître des radars en 2018. J’ai appris leur retour en tout début d’année via la playlist des nouveautés Section 26. Écouté par curiosité plus qu’autre chose, The Sheer Drop m’a littéralement bluffé. Le son énorme, le chant unique, l’écriture aventureuse. Mais surtout, tout semblait être mis au service des guitares, comme une déclaration d’amour à un artisanat qui souhaite réhabiliter les grandes heures de la pop indépendante. Mais avec une volonté d’avancer, de casser les barrières. Les titres de ce niveau, Compact Trauma les enchaîne les uns après les autres avec ce qui semble être une facilité déconcertante. Notre rencontre avec Rhys Edwards et Syd Kemp nous apprend pourtant que tout n’a pas été aussi simple qu’on ne le pense, mais le groupe en est ressorti grandi, fier d’un disque qu’ils meurent d’envie de défendre auprès de leur public, qui avec Compact Trauma, a de fortes chances de s’agrandir. Continuer la lecture de « Ulrika Spacek : « Les bons groupes à guitare se font rares » »